L'homme a un curriculum assez éclaté. Il est ingénieur en métallurgie, photographe à ses heures, passionné d'architecture et possède une galerie d'art à l'île d'Orléans. En 2003, il a formé le Groupe pour la conservation de l'architecture vernaculaire (GCAV).

L'homme a un curriculum assez éclaté. Il est ingénieur en métallurgie, photographe à ses heures, passionné d'architecture et possède une galerie d'art à l'île d'Orléans. En 2003, il a formé le Groupe pour la conservation de l'architecture vernaculaire (GCAV).

L'architecture vernaculaire, un nom savant pour présenter un concept somme toute assez simple. «C'est l'architecture qui est issue du peuple plutôt que des grands courants classiques. Chaque pays a son architecture vernaculaire ou, pourrait-on dire, traditionnelle. Elle est développée par les gens en fonction de leurs besoins particuliers», explique M. Plumpton.

Les meilleurs exemples sont sans doute les maisons construites en pierres des champs coiffées d'un toit en bardeaux de cèdre, à l'île d'Orléans. Les agriculteurs se sont servis des matériaux disponibles sur place pour bâtir leurs demeures. Les murs en crépi, les toits canadiens ou en métal, le colombage pierroté des maisons de bois sont aussi des éléments d'architecture vernaculaire.

Au Québec, l'architecture traditionnelle est généralement inspirée des méthodes françaises, mais les techniques ont été adaptées au climat et aux matériaux d'ici.

Encore aujourd'hui, des traces de ces oeuvres d'autrefois sont visibles dans les villes et villages du Québec. Mais pour le GCAV, il y a beaucoup de travail à faire pour assurer la pérennité de cet art, qui a tendance à se perdre au profit des méthodes de construction modernes, rapides, efficaces et peu dispendieuses.

Depuis sa fondation, le groupe, composé d'une dizaine de personnes, concentre ses efforts sur le patrimoine de l'île d'Orléans. Il a entrepris de dresser la liste des immeubles qui présentent des traits architecturaux vernaculaires.

En 1979, une étude avait recensé 12 bâtiments ayant un «intérêt exceptionnel». Aujourd'hui, il n'en reste que huit debout, a constaté M. Plumpton.

Non seulement l'architecture traditionnelle se perd petit à petit, mais «des grandes corporations viennent s'établir sur l'île et ne tiennent pas toujours compte de l'environnement visuel», déplore-t-il.

Pour Arthur Plumpton, il est primordial de préserver le patrimoine bâti et les caractéristiques qui sont propres au Québec. «Nous sommes très fiers de nos artistes, de nos chansonniers, En contrepartie, nous ne sommes pas si fiers de cet autre type d'art que sont les maisons que nous habitons», dit-il. Selon lui, c'est une question d'identité culturelle.

Or, précise M. Plumpton, tradition n'exclut pas nécessairement modernité. «Il est tout à fait possible d'appliquer les meilleures techniques traditionnelles et les matériaux locaux pour construire des édifices dernier cri», plaide-t-il.

Côté restauration, l'ingénieur s'y connaît un brin. Il a lui-même restauré sa maison de style colonial français et le hangar, situé juste à côté, dans lequel on rangeait autrefois la machinerie agricole. Ce dernier est devenu une coquette galerie d'art.

À l'intérieur, l'oeil est attiré vers la charpente du toit composée de solides madriers. D'épaisses racines d'arbres en forme d'équerre fixent la structure du toit aux murs. Une méthode très efficace puisque aucune poutre n'est nécessaire au centre de la pièce.

À l'extérieur, des planches verticales peintes en blanc forment le revêtement, alors que le toit est recouvert de bardeaux de cèdre, tout comme celui de la résidence de M. Plumpton.

La maison de pierres, avec ses fenêtres carrelées, a été bâtie de façon à être fonctionnelle. Aucune ouverture du côté ouest, pour la protéger des grands vents.

Devant, une toute petite fenêtre se démarque des autres. «Probablement parce que dans cette pièce, on effectuait une tâche particulière qui ne nécessitait qu'une petite fenêtre, avance M. Plumpton. C'est un bon exemple d'architecture vernaculaire. Les habitants plaçaient les fenêtres où ils en avaient besoin.»

Le GCAV compte bien rencontrer les propriétaires de bâtiments patrimoniaux pour les sensibiliser à l'importance de préserver le joyau qu'ils ont entre les mains.

Déjà, des efforts sont déployés pour préserver le patrimoine. La Commission des bien culturels dresse depuis des années une liste d'édifices à protéger.

Au ministère de la Culture, on fait l'inventaire des sites dignes d'intérêt. «Les recherches se font par thématiques», explique Daniel Lauzon, conseiller à la Direction du patrimoine du ministère.

«Dans la catégorie des édifices menacés de disparition, on a recensé, par exemple, les lieux de culte, les anciennes gares ferroviaires, les moulins à farine et à eau, les chapelles de procession. Évidemment, on peut y retrouver des éléments d'architecture vernaculaire.»

Les toits canadiens ou en métal sont des éléments d'architecture vernaculaire. Encore faudra-t-il conserver le savoir-faire pour fabriquer ces toits.

À la Ville de Québec, différents programmes sont en place pour aider les propriétaires à restaurer leur immeuble patrimonial. Le programme Maître d'oeuvre, d'abord mis sur pied pour le secteur du Vieux-Québec, a été récemment élargi à d'autres arrondissements tels Beauport, Charlesbourg et Sillery, explique Jacques Madore, de la Direction du design et du patrimoine.

André Casault, professeur à l'école d'architecture de l'Université Laval, juge que malgré les efforts des villes et des gouvernements, la conservation de l'art vernaculaire est dans un piètre état au Québec. «En ce moment, l'accent est mis sur la consommation. Quand ce n'est pas nouveau, ce n'est pas bon. On a l'impression que l'architecture d'autrefois, c'est sympathique et folklorique, mais qu'elle ne peut pas répondre aux besoins d'aujourd'hui.»

Pourtant, poursuit-il, sans se figer dans le passé, on devrait accorder une attention particulière pour réutiliser ou réinterpréter certaines caractéristiques qui sont propres aux constructions québécoises et qui témoignent de la richesse culturelle.

Pour France Vanlaethem, professeure d'architecture à l'Université du Québec à Montréal et commissaire à la Commission des biens culturels, un autre problème qui se pose est la disparition graduelle du savoir-faire et des techniques d'autrefois. «Ce type de main-d'oeuvre se fait de plus en plus rare au Québec», dit-elle. Une lacune que le GCAV aimerait bien contribuer à corriger. Mais il faudra encore du temps, convient Arthur Plumpton.