Mais dans la réalité, quand l'envol est finalement entrepris, c'est toute l'organisation de la cellule familiale qui est revue, à commencer par le rôle qu'occupe désormais la résidence qui regroupait le clan.

Mais dans la réalité, quand l'envol est finalement entrepris, c'est toute l'organisation de la cellule familiale qui est revue, à commencer par le rôle qu'occupe désormais la résidence qui regroupait le clan.

À l'opposé du «syndrome Tanguy», il y a celui du «nid vide» que peuvent ressentir les parents, décrit Richard Cloutier, spécialiste en psychologie sociale et professeur titulaire à l'Université Laval. «Et entre les deux, tout est possible!»

Le questionnement est souvent le même devant l'écho des pièces vides. «Partir ou rester», s'interrogent à leur tour les parents? Pour certains, l'envie de quitter et de recommencer dans du neuf est grande. Chez d'autres, alors que le milieu de la rénovation n'a jamais été aussi dynamique, une reconversion de la demeure semble le choix judicieux.

«C'est extrêmement difficile de généraliser», poursuit le psychologue à propos du processus qui amène les parents à s'interroger, au moment du départ des enfants. Alors, c'est triste ou non? Difficile à dire... Même chose quant aux choix dictés par cette transition marquante. «C'est une étape importante, point.» Car si on sait que la progéniture quitte la maison plus tard qu'autrefois, il est plutôt délicat de prédire ce que feront les parents.

Plans précis

«Les besoins de la famille changent et c'est à nous de nous y adapter», constate Alain Hallée, attablé dans la cuisine de sa résidence de l'arrondissement Neufchâtel. Parents de trois jeunes femmes, sa conjointe Chantal et lui ont déjà des plans bien précis pour cette nouvelle étape de leur vie familiale. Alors que Geneviève, 25 ans, vient de quitter pour son premier appartement, que Véronique, 22 ans, s'apprête à l'imiter durant l'été et qu'il ne restera que Caroline, tout juste 21 ans, le couple Hallée est en voie de transformer la maison.

L'idée? Aménager le tout pour rendre le nouveau point de rassemblement le plus accueillant possible. «Moi, je suis mère poule. Je veux être capable de les recevoir», observe Chantal. «On fait les modifications pour lorsqu'ils viendront nous voir. On veut les intéresser à revenir.»

Ainsi, le sous-sol deviendra un séjour encore plus spacieux et M. Hallée croit déjà savoir comment attirer... ses gendres! Au coeur des nouveautés à venir, la table de billard et le cinéma maison semblent déjà créer beaucoup d'enthousiasme. On ne s'ennuiera pas chez les Hallée! Déjà, on pense aux réunions de Noël avec un plaisir renouvelé.

Les travaux terminés, les filles perdront fort probablement leur chambre d'autrefois. Mais elles savent bien qu'après leur départ, le changement des serrures de la maison n'est pas prévu! Les nouvelles pièces pour les invités ne laisseront personne sur le trottoir, garantit-on. «Notre place est encore là», observe sans amertume Véronique.

Une évidence pour Alain et Chantal qui s'enthousiasment à voir ce qui survient à leurs filles. Du moment qu'elles reviennent les visiter! «Après l'éclatement des familles, je pense qu'il y a actuellement un retour à des bases plus familiales», constate M. Hallée.

Se gâter

La situation est fort semblable du côté de Sainte-Foy, chez les Filion-Ouellet. Depuis déjà un moment, les trois enfants du couple, âgés de 24, 26 et 27 ans, ont pris le large. «Il s'agit d'une autre étape», remarque simplement la mère, Suzanne Filion.

Partis, mais ils ne sont jamais bien loin. Même Nathalie qui habite désormais Montréal, revient régulièrement, tandis que Pierre et Isabelle, tous deux installés à Québec, passent eux aussi souvent à la maison.

«Je n'ai pas fait de gros changements», précise Mme Filion, au sujet des modifications qui ont été apportées à la résidence depuis qu'elle s'est retrouvée seule avec Claude, son mari. Néanmoins, les cinq chambres à coucher ont été revisitées; un boudoir et un bureau/salle de couture y ont été aménagés. La décoration a été retouchée et des meubles ont été renouvelés (ceux d'origine ont été offerts aux enfants).

Là encore, la conversion des pièces est pensée pour favoriser les réunions avec les enfants. Et même, depuis à peine un mois, pour les petits-enfants alors qu'Isabelle vient d'avoir son premier bébé! Un coin spécial pour les tout-petits est d'ailleurs en préparation, tandis que s'amorce la réfection du sous-sol dans les semaines à venir. «J'en espère d'autres», rêve déjà Mme Filion.

«La maison n'est pas trop grande», affirme-t-elle. «J'en profite plus maintenant!» Et pour cause, avec moins d'obligations et plus de temps, le couple à vraiment l'impression de se gâter tout en mettant à son goût la demeure achetée en 1987. Un moment attendu par Mme Filion. «C'était déjà tout planifié dans mon esprit.»

Option condo

Puis il y a ceux qui décident de tout laisser derrière pour repartir à neuf. Ginette Michaud, directrice de La Capitale Sélect, à Québec, observe que c'est souvent la même histoire qui se répète chez ceux qui font appel à ses services. «Au départ des enfants, les parents veulent vendre la maison parce qu'elle est tout à coup trop grande!»

Souvent, le premier choix est alors le condo. Une option qui est fort populaire, souligne Mme Michaud. «Plus petit, plus pratique», est alors le mot d'ordre pour ce nombre grandissant de baby-boomers qui voient leurs rejetons quitter le nid familial pour de bon.

Une décision qui est mûrie et qui se fait rarement en traînant les souvenirs. Contrairement à ce à quoi on pourrait s'attendre, les transactions sont complétées rapidement et sans grande difficulté, constate la femme de La Capitale. Ont-ils des regrets à abandonner la demeure? «Non, on voit plus ça chez les personnes âgées qui quittent parce qu'elles ne peuvent plus rester dans leur maison.» Ce qui n'est pas le cas de ces couples qui amorcent cette nouvelle étape active de leur vie.

Après le condo, la maison «régulière» est l'autre solution de choix dans une telle situation, raconte Mme Michaud. Elle sera tout de même plus petite que celle quittée. Et l'agente d'immeuble est catégorique: «chose certaine, ceux qui ont été propriétaires, achètent. Rares sont ceux qui s'en vont en appartement!»

Condo ou réno, alors? Pour avoir discuté de la question dans son entourage, Chantal Hallée a observé la pertinence des deux options. «C'est vraiment divisé!» Enfin, pour ceux qui seraient tentés de conserver leur maison, mais qui craignent de créer des Tanguy, de par leurs nouvelles installations un peu trop agréables, M. Hallée lance cette suggestion, qui ne manque pas de faire rire la famille. «Je vais peut-être acheter une table de pool... mais payante!»