Les trois plantes présentées aujourd'hui rivalisent de beauté. Elles sont probablement les plus spectaculaires parmi les nouvelles élues du programme horticole les Exceptionnelles. Fruit du hasard, j'ai eu la chance de les cultiver au jardin l'été dernier sans savoir qu'elles figureraient au palmarès des vedettes 2011.

Et je ne fais évidemment pas partie du comité d'experts chargé de sélectionner les annuelles Exceptionnelles, en collaboration avec le public. Des beautés qui espèrent se retrouver dans votre jardin.

Un mutant de Floride

La première porte le nom de Colocasia «Mojito», comme le cocktail cubain qui était prisé par l'auteur Ernest Hemingway, une boisson à base de rhum, de menthe poivrée, de sucre et d'eau gazeuse. L'auteur a d'ailleurs laissé un mot écrit de sa main sur le mur de son bar préféré de La Havane. Voilà pour l'histoire.

«Mojito» est un cultivar parmi tant d'autres de Colocasia esculenta, beaucoup mieux connu sous le terme de taro, une plante originaire de l'Inde et probablement de la Polynésie, dont le tubercule est consommé depuis la nuit des temps. On le mange dans les Antilles, en Afrique et en Amérique tropicale et il est relativement facile de s'en procurer au Québec dans les épiceries asiatiques. Il faut le cuire sinon il est toxique en raison de la grande quantité de cristaux d'oxalate de calcium extrêmement irritant pour l'estomac. On peut en faire d'excellentes croustilles. Voilà pour l'aspect culinaire.

En matière horticole, le taro est souvent connu sous le nom d'oreille d'éléphant à cause de ses feuilles gigantesques remarquables au jardin. Certains cultivars possèdent des feuilles pourpres, très foncées, presque noires comme «Black Magic». Colocasia exculenta cultivé à des fins alimentaires est aussi très décoratif. On peut parfois faire germer un rhizome acheté à l'épicerie.

Pour sa part, «Mojito» se distingue par ses feuilles vert tendre parsemées de taches presque noires aux formes irrégulières. Une splendeur! Elles atteignent autour de 45 cm de longueur sur 20 à 30 cm de largeur. Le plant mesure un mètre et un peu plus. Ce mutant, découvert en Floride, se cultive facilement dans un gros pot à la condition que le terreau reste humide. Le coloris des feuilles sera plus contrasté si la plante pousse à la mi-ombre.

La saison dernière, j'avais installé mes plants sur le bord de mon bassin d'eau en les gardant dans leur pot d'origine, mais en laissant à peine 1 ou 2 cm de racines tremper dans l'eau. Il s'agit d'une plante coûteuse: 15 à 25$ pièce. Par contre, «Mojito» peut passer l'hiver à la maison sans problème si on le place devant une fenêtre ensoleillée dans un pot dont la base restera en permanence dans l'eau. Il est alors conseillé de le fertiliser de temps à autre.

Un rose vif remarquable

Il existe des dizaines de variétés d'échinacées sur le marché et de nouvelles font leur apparition chaque année. À tel point qu'il est difficile de faire la distinction entre les cultivars. On a souvent l'impression qu'ils se ressemblent tous comme c'est le cas des nombreux hostas et hémérocalles. Or, il y a toujours des exceptions et l'échinacée «PowWow» figure parmi elles.

Fait étonnant, cette échinacée est une vivace, théoriquement rustique en zone 3. Elle a tout de même été classée parmi les Exceptionnelles parce qu'elle produit des fleurs l'année même du semis. Si on sème évidemment très tôt à l'intérieur, au mois de janvier. Mais à ce compte-là, plusieurs autres vivaces pourraient aussi revendiquer une place sur la ligne de départ. D'ailleurs, «PowWow» a été primée par l'organisation All-America Selections en 2010, si bien que son statut de nouveauté commence à s'estomper.

Le coloris rose vif, la grande ramification des tiges et la hauteur réduite du plant ont séduit les juges. Les fleurs peuvent atteindre de 7 à 10 cm de diamètre dans des conditions optimales de culture. Autre atout, elles conservent leur coloris plus longtemps que les autres cultivars. Le plant mesure environ 60 cm.

«PowWow» aime le plein soleil et les longues périodes de luminosité, environ 14heures par jour, ce qui lui permettra de fleurir sans interruption et sans avoir à couper les fleurs fanées. Comme toutes les autres échinacées, elle affectionne les sols plutôt secs et résiste bien aux périodes de sécheresse. Elle est peu affectée par la maladie. Dans mon jardin, mes plants semblent avoir bien survécu à l'hiver. Reste à vérifier si la dépense énergétique occasionnée par une floraison très abondante la saison dernière affectera celle de cette année.

Un papyrus au jardin

J'ai toujours été fasciné par l'histoire de l'Égypte ancienne. Il m'a fallu toutefois un certain temps pour réaliser que les fameux papyrus égyptiens étaient fabriqués avec une plante à l'allure inusitée du moins par rapport à notre flore.

Voilà déjà quelques années que certaines variétés de Cyperus papyrus sont vendues au Québec à titre d'annuelles. Une plante cultivée pour sa hampe florale inusitée dont l'extrémité forme une sorte de bouquet composé de minuscules épis verdâtres. En 2009, j'avais planté plusieurs spécimens de «Graceful Grass King Tut», un papyrus d'environ 1 m. L'an passé, ce fut au tour de Cyperus giganteus ou papyrus du Mexique et de «Little Tut», celui choisi parmi les Exceptionelles 2011.

Même s'il s'agit de plantes aquatiques, ces papyrus s'accommodent parfaitement d'une platebande, sans exiger un arrosage plus abondant que les autres compagnes du jardin. Plus encore, «Graceful» n'a pas poussé plus vite avec les quenouilles qu'en compagnie des échinacées.

Si la plante originaire des rives du Nil peut atteindre 3 et même 5 m, «Little Tut», comme son nom l'indique, se distingue par sa petite taille, environ 70 cm. Semblable à ses cousins, il est insensible aux insectes et peu sujet aux maladies. Il peut facilement pousser dans de gros pots, au soleil ou en position légèrement ombragée. Son aspect est toujours étonnant. Chez moi, il a été cultivé en bordure de mon bassin d'eau, la base de ses racines touchant à peine l'eau.

Par ailleurs, si vous avez quelques plants à votre disposition en fin d'été, vous pourrez toujours tenter de faire votre propre papyrus. Il suffit d'enlever la couche recouvrant les tiges, de couper le centre blanc à l'intérieur de celles-ci en tranches fines et allongées que l'on conservera dans l'eau en attendant d'en avoir suffisamment. Vous disposerez alors les fines tranches côte à côte, mais de façon à ce qu'elles débordent légèrement l'une sur l'autre. La deuxième étape consiste à faire le même travail avec d'autres tranches, mais placées perpendiculairement sur les premières. Une fois le tissu terminé, vous l'insérez entre deux gros livres. Une colle naturelle devrait permettre aux tiges de se fixer les unes aux autres et de former le papier millénaire. Évidemment, il faudra être patient pour connaître la durabilité de votre papyrus. Il y a 5000 ans, les notions de temps n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui.