(Washington) Pendant que les républicains s’entredéchirent, Joe Biden prépare un discours « important » sur la nécessité d’aider l’Ukraine : le démocrate de 80 ans, en campagne pour 2024, voit dans le chaos du camp adverse l’occasion de renforcer sa stature présidentielle.

« Il faut changer l’atmosphère empoisonnée à Washington », a déclaré le président américain à la Maison-Blanche mercredi. « Nous avons de profonds désaccords, mais nous devons cesser de nous considérer comme des ennemis. »

Au lendemain de la destitution inédite du président de la Chambre des représentants, à l’initiative d’un petit groupe d’élus de la droite dure, Joe Biden a clairement voulu se placer au-dessus de la mêlée.

Ce qui ne l’a pas empêché d’admettre, pour la première fois, une certaine préoccupation sur le devenir de l’aide à l’Ukraine.

« Cela m’inquiète, mais je sais qu’il y a une majorité d’élus à la Chambre des représentants et au Sénat, dans les deux partis, qui ont dit qu’ils soutenaient le financement de l’aide à l’Ukraine », a déclaré Joe Biden, interrogé à propos du chaos qui paralyse, de fait, la Chambre basse.

« Discours majeur »

Il a promis un « discours majeur » pour démontrer qu’il était « extrêmement important » de continuer de soutenir militairement et financièrement l’Ukraine, une décision qui revient au Congrès, en vertu de sa compétence en matière de budget.

Joe Biden « doit juste montrer qu’il est un président fort et laisser le bain de sang chez les républicains se poursuivre. Comme il ne peut rien y faire, autant qu’il laisse le camp démocrate en profiter », analyse Robert Rowland, professeur de l’Université du Kansas et expert en communication politique.

Cette posture ne se joue pas seulement sur l’aide à l’Ukraine, mais aussi sur des sujets plus concrets de politique économique et sociale.

Mardi, pendant que le sort du président de la Chambre des représentants Kevin McCarthy se jouait au Capitole, Joe Biden ne s’est pas montré, mais la Maison-Blanche a abondamment communiqué sur l’un de ses grands projets, à savoir faire baisser le coût souvent exorbitant de la santé pour les Américains.

Mercredi, il a annoncé de nouvelles mesures d’allègement de la dette étudiante, un sujet cher au démocrate qui espère, en dépit de son âge, convaincre la jeunesse américaine de voter pour lui l’an prochain.

« Robuste »

Mais s’il veut jouer le contraste avec ses adversaires républicains – que ce soit les parlementaires ou Donald Trump, en plein procès civil à New York –, le président américain doit « s’assurer de toujours paraître confiant et robuste », avertit Robert Rowland.

Il rappelle que dans l’opinion publique, l’ancien président républicain, aussi en lice pour 2024, « apparaît comme beaucoup plus solide et en meilleure santé » que Joe Biden.

Qu’il s’agisse de trouver un nouveau président de la Chambre ou de négocier un nouveau budget – sans quoi l’État fédéral risque d’être à court de financement le 17 novembre –, Joe Biden a décidé de ne pas s’impliquer dans les tractations, en pariant que le Parti républicain subira toutes les conséquences politiques.

Mais cette stratégie restera-t-elle tenable si les États-Unis font face à une paralysie budgétaire fédérale prolongée ? Et si le Congrès américain s’avère incapable de débloquer des fonds supplémentaires pour aider l’Ukraine ?

Sans reprendre ses assurances habituelles sur le fait que les États-Unis continueraient à soutenir Kyiv « aussi longtemps qu’il le faudra », le président américain a plutôt insisté sur le fait qu’il était « dans l’intérêt [du pays] que l’Ukraine réussisse » face à l’invasion de la Russie.

« Il est extrêmement important pour les États-Unis et nos alliés que nous tenions nos promesses », a dit Joe Biden, conscient du risque de lassitude, non seulement au Congrès, mais plus généralement dans l’opinion publique américaine.

Le démocrate n’a pas voulu dire combien de temps les États-Unis seraient en mesure de poursuivre leur assistance si le Congrès n’adoptait pas une nouvelle enveloppe, comme le réclame la Maison-Blanche.

Joe Biden a seulement laissé entendre qu’il existait d’autres modes de financement, sans passer par la procédure parlementaire, mais il n’a pas donné de détails.