Le sommelier québécois Hugo Duchesne était tout près du but : il est arrivé deuxième au concours Meilleur sommelier des Amériques, la semaine dernière, au Chili.

C’est à Santiago que se déroulait l’édition 2022 de ce concours, où Hugo Duchesne s’est envolé pour représenter le Canada, du 16 au 19 février. Celui qui a été sacré Meilleur sommelier du Québec en 2020 espérait mettre la main sur ce titre convoité par une vingtaine de candidats, mais c’est la sommelière argentine Valeria Gamper qui a remporté les honneurs. Le Québécois, lui, a terminé sur la deuxième marche du podium, la médaille d’argent au cou.

Déçu ? « J’allais là pour gagner, c’est sûr et certain, mais ce que j’ai appris là-bas est incommensurable. J’ai fait une finale internationale, c’est rentré dans mon corps ! J’ai eu le sentiment de donner un bon show, j’ai tout donné sur le stage », lance-t-il au bout du fil.

Gagner ce concours lui aurait permis de devenir le deuxième représentant québécois au concours Meilleur sommelier du monde, qui se déroulera à Paris en 2023. Le Canada y sera représenté par Pier-Alexis Soulière, qui a remporté le titre de Meilleur sommelier du Canada 2021.

La piqûre des concours

Plus jeune, Hugo Duchesne se vouait à une carrière d’enseignement en littérature. Après sa maîtrise à McGill, il avait l’intention de partir en France pour compléter son doctorat, mais il a décidé de prendre une petite pause… et un cours de sommellerie.

C’est alors qu’il était employé à la fromagerie Hamel, au Marché Jean-Talon, qu’il a été initié au monde du vin, raconte-t-il. « Le propriétaire était un passionné, un collectionneur de vin. Il m’a réellement inculqué la simplicité, le plaisir, la modestie de la découverte du vin. Le vin est devenu un écho à la littérature pour moi, à ce désir d’apprendre, au langage. J’avais toujours eu cette envie secrètement de quitter le littéraire pour la sommellerie, et je me suis permis ça à un certain moment. »

Enseignant à l’ITHQ en sommellerie jusqu’à tout récemment, Hugo Duchesne a eu la piqûre des concours en accompagnant ses étudiants en tant que mentor dans diverses compétitions, dont le sommelier Carl Villeneune Lepage au concours de Meilleur sommelier des Amériques en 2018, puis à celui de Meilleur sommelier du monde en 2019, en Belgique.

C’est un peu arrivé comme accident. Je ne suis pas un gars de concours, ce n’était pas une corde qui me faisait vibrer, jusqu’à ce que j’enseigne. C’est en Belgique que je me suis rendu compte que je n’étais pas sur la bonne chaise ; ce n’était pas coach que je voulais être, mais candidat !

Hugo Duchesne, sommelier

À partir de cet instant, M. Duchesne s’est donné comme objectif de participer au concours provincial, qu’il a gagné. Même s’il n’a pas répété l’exploit au concours canadien en octobre dernier, il a été sélectionné pour participer à celui des Amériques, où le Canada pouvait envoyer deux candidats.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Hugo Duchesne, dans la cave à vins du Restaurant h3.

Entre-temps, le professeur a pris la difficile décision de quitter son poste à l’ITHQ et d’accepter celui de directeur expérience client et opérations pour le groupe qui détient notamment Le Coureur des bois, à Belœil, et Restaurant h3, au centre-ville. Il officiait déjà depuis six ans à titre de sommelier, à temps partiel, pour ces endroits reconnus pour leurs programmes de vin.

Depuis plusieurs mois, le père de trois enfants s’est donc consacré intensivement à la préparation pour le concours canadien, puis celui des Amériques. Comment étudie-t-on, justement, pour des compétitions de cette envergure ?

« Je peux facilement mettre de trois à quatre heures d’étude le matin, puis arriver au travail, où je me fais faire des vins, des spiritueux à l’aveugle, des situations de passage en carafe, de décantation, de service de mousseux, de magnums, sur des tables de 16, de 8… Toutes les mises en scène de concours, au quotidien, on les fait au restaurant », détaille-t-il.

L’aventure est loin d’être terminée pour le sommelier. Il compte se replonger dès la semaine prochaine dans les études, en vue d’obtenir sa certification de Master Sommelier — seulement deux personnes peuvent se targuer d’avoir ce diplôme au Québec, nous apprend-il. Il a aussi les yeux rivés sur le prochain concours du Meilleur sommelier du Canada, qui aura lieu en 2023 ; son titre de Meilleur sommelier québécois lui assure une participation.

« Les concours, ce n’est pas une fin en soi. Je n’ai rien à prouver, je le fais, car ça fait de moi un meilleur professionnel, plus hospitalier, plus humain. Pousser le côté compétitif à son paroxysme dans des concours décomplexe la profession et fait qu’une fois en salle, il ne reste que le plaisir simple du vin. »

Consultez le site de ASI-Association de la sommellerie internationale