L'industrie du camionnage du Québec demande l'aide du gouvernement Charest pour compléter son «virage vert», par l'adoption de nouvelles mesures fiscales et des subventions qui pourraient totaliser 120 millions sur 5 ans.

Selon le PDG de l'Association du camionnage du Québec, Marc Cadieux, cette contribution permettra à l'industrie d'accélérer l'achat de nouveaux camions plus «propres» et de doter les véhicules de divers équipements qui réduisent la consommation de carburant et, par conséquent, les émissions de gaz à effet de serre (GES).

 

Selon des estimations obtenues par La Presse, les réductions d'émissions de GES pourraient s'élever à plus de 600 000 tonnes par année, pour l'ensemble des transporteurs, soit l'équivalent des émissions d'environ 120 000 automobiles, roulant chacune 20 000 kilomètres en un an.

Frappée de plein fouet par la récession, l'industrie du transport par camion prévoit investir près de 3,8 milliards, au cours des 5 prochaines années, pour acquérir de nouveaux véhicules équipés de moteurs qui émettent 90% moins de particules fines et 95% moins d'oxyde d'azote que les moteurs conventionnels.

Ces deux polluants sont considérés comme les principaux vecteurs du smog.

Le virage vert du camionnage amorcé en 2007, alors que l'économie avait le vent dans les voiles et que les carnets de commandes des transporteurs étaient pleins, a déjà généré des coûts environnementaux de 100 millions, entièrement assumés par l'industrie, a affirmé hier M. Cadieux, en entrevue à La Presse.

«La situation économique a toutefois complètement changé depuis, et les entreprises de camionnage ont vu leur niveau d'activité fondre comme neige au soleil, affirme-t-il. Il y a deux ans, on parlait d'embaucher 10 000 chauffeurs pour remplacer ceux qui partaient à la retraite. Aujourd'hui, on parle de licenciements.»

Selon un conseiller en affaires économiques et fiscales spécialisé dans le camionnage, Frédéric François, «certains transporteurs qui faisaient l'essentiel de leurs affaires aux États-Unis ont vu leurs commandes chuter de 50%. À l'échelle du Québec, c'est plus difficile à évaluer, mais je dirais que les activités ont chuté de 20% à 25%, tous types de camionnage confondus.»

Un budget attendu

Le président de l'ACQ précise par ailleurs que si son association a pris l'initiative du dialogue avec Québec sur des questions fiscales et le financement de son virage vert, les mesures demandées, en prévision du dépôt du budget du Québec jeudi prochain, touchent tous les transporteurs, et pas seulement les plus gros qui sont regroupés dans l'ACQ.

En 2007, il y avait près de 120 000 camions lourds et tracteurs routiers en circulation sur les routes québécoises, selon les données d'immatriculation de la Société de l'assurance automobile. Ces véhicules commerciaux sont exploités par plus de 52 000 propriétaires et exploitants dûment enregistrés à la Commission des transports du Québec.

En 2010, l'entrée en vigueur de nouvelles normes environnementales, qui réduiront considérablement les niveaux d'émissions polluantes des camions aux États-Unis et au Canada, entraînera ainsi des investissements estimés à plus de 3,8 milliards pour l'achat de nouveaux camions équipés de moteurs à émissions réduites.

Sur ce point, les entreprises de camionnage demandent au gouvernement Charest de hausser de 40% à 60% le taux d'amortissement de ces acquisitions de matériel. Selon Frédéric François, une telle mesure n'aurait qu'une incidence mineure sur les finances de l'État, puisqu'elle permettrait seulement d'accélérer le niveau des dépenses d'exploitation déductibles aux fins d'impôts.

Le coût administratif de cette mesure a été estimé par l'industrie à environ 10 millions sur cinq ans.

Les transporteurs demandent également une «déduction additionnelle» qui représenterait, pour l'État, environ 1% du coût d'achat de ces véhicules à faibles émissions polluantes, soit 35 millions sur cinq ans.

La plus coûteuse des mesures demandées concerne l'achat d'équipement tels des génératrices, des pneus à larges bandes ou des déflecteurs et des jupes pour améliorer l'aérodynamisme des tracteurs et remorques. De tels équipements permettent des économies de carburant substantielles.

L'industrie du camionnage, a précisé M. Cadieux, souhaiterait avoir accès à des subventions «vertes» permettant le remboursement d'une partie des coûts d'acquisitions de ces équipements. En supposant un taux de renouvellement de 7000 camions par année, cette mesure pourrait coûter 60 millions sur cinq ans à l'État.

Enfin, les entreprises de camionnage souhaitent que Québec prenne à sa charge 50% des coûts de formation (15 millions sur cinq ans) pour sensibiliser les 10 0000 chauffeurs professionnels du Québec à des méthodes de «conduite écologique» réduisant notamment le gaspillage de carburant.