L'industrie du gaz de schiste a violé plus de 1400 fois la réglementation environnementale en Pennsylvanie entre janvier 2008 et juin 2010, selon une compilation inédite d'un groupe local voué à la conservation.

Le rapport, dévoilé au début du mois, a suscité de nouveaux appels au resserrement de la surveillance de l'industrie en Pennsylvanie, qui vit un boom gazier depuis environ cinq ans.

Selon la Pennsylvania Land Trust Association, qui a compilé les données officielles, 1435 infractions ont été enregistrées en deux ans et demi lors de forages. Une quarantaine d'entreprises font des forages gaziers en Pennsylvanie, dont la firme Talisman, de l'Alberta, qui est aussi active au Québec. Cette dernière a commis 65 infractions lors de 121 forages.

Des 1435 infractions, 953 ont eu un impact sur l'environnement ou ont constitué une menace, selon l'association. Les autres sont de nature administrative (par exemple, avoir omis d'afficher le permis de forage de façon visible).

Dans 277 cas, les plans de lutte contre l'érosion étaient inadéquats ou mal mis en oeuvre. Dans 268 cas, les bassins de rétention des eaux usées étaient mal construits. Dans 154 cas, il y a eu des rejets de résidus industriels dans l'environnement.

L'association recense aussi 100 manquements aux règles de protection des ruisseaux et 67 violations des mesures de prévention de la pollution.

Selon les données compilées par l'organisme et consultées par La Presse, la firme Talisman Energy USA a commis 10 infractions relatives au rejet de résidus industriels, 11 relatives à l'étanchéité à des bassins d'eaux usées, deux pour des bassins trop pleins et deux pour des problèmes d'érosion.

«Nous prenons le temps de tirer des leçons de chacune de ces infractions, a affirmé à La Presse Phoebe Buckland, porte-parole de Talisman. Quand il y a une infraction, nous agissons immédiatement.»

L'entreprise, qui a fait deux forages à Lotbinière, affirme qu'elle n'a commis aucune infraction au Québec.

«Le ministère de l'Environnement a visité certaines de nos installations au Québec, affirme Vincent Perron, porte-parole de Talisman au Québec. Les responsables de la Faune ont surveillé nos prélèvements d'eau, et la Commission de protection du territoire agricole a vérifié la conformité de nos activités. Aucune infraction n'a été constatée.»

En Pennsylvanie, d'autres violations sont moins fréquentes, mais potentiellement plus dangereuses.

On a recensé 16 défauts dans l'obturateur antiéruption (blowout preventer). C'est ce type de lacune qui a causé une éruption dans un puits près de Pittsburgh en juin dernier. La fuite a été colmatée 16 heures plus tard, après que des millions de litres d'eau contaminée eurent été déversés dans l'environnement.

Il y a eu 10 cas de blindage défectueux du puits, ce qui peut causer une contamination des nappes d'eau souterraines.

C'est en Pennsylvanie que sont apparus les cas les plus patents de contamination d'eau potable liés à l'exploitation du gaz de schiste. Une douzaine de puits d'eau potable ont été condamnés dans la région de Dimock. Après enquête, les autorités ont conclu que des défauts dans le blindage des puits de la société texane Cabot Oil&Gaz avaient causé la contamination de l'eau.

Selon la compilation de la Pennsylvania Land Trust Association, Cabot a commis 94 infractions aux 60 puits qu'elle a forés pendant la période examinée.

Réglementation

Le rapport a provoqué de nouveaux appels à un resserrement de la réglementation, selon la presse locale. La formation rocheuse appelée shale de Marcellus, semblable au shale d'Utica que l'on trouve au Québec, a attiré de nombreuses entreprises en Pennsylvanie. Elles y font chaque année des centaines de nouveaux forages.

L'industrie aurait créé environ 57 000 emplois dans cet État. Il y a plus de 100 000 puits de pétrole ou de gaz en Pennsylvanie, qui est le berceau de l'industrie pétrolière aux États-Unis.

Selon le Pittsburgh Post-Gazette, un projet de loi présenté en Pennsylvanie propose de rendre obligatoire l'inspection des puits d'eau potable avant et après les forages.

On suggère aussi d'interdire tout forage gazier à moins de 300 m d'un puits d'eau potable.

Il y aurait des mesures supplémentaires de protection pour toute source d'eau potable située à moins d'un demi-mille (environ 800 mètres) d'un puits de gaz.

Le projet de loi obligerait aussi la divulgation complète des produits chimiques employés lors des forages.