Michel Desjoyeaux est passé cette nuit sous le cap Leeuwin, au sud-ouest de l'Australie, et file à vitesse Grand V vers le Pacifique. Jean Le Cam réapparaît sur le podium provisoire tandis que les 19 concurrents en course auront droit à de forts coups de vent tout au long de la journée.

Au moment du passage cette nuit sous le cap Leeuwin, le groupe des cinq est devenu le groupe des quatre.Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec) n'a pas eu le choix de se dérouter de manière importante. Dick a été forcé de virer à 90 degrés de la route normale vers le Pacifique puisqu'il lui est impossible d'effectuer la réparation de son safran handicapé dans la grosseur de mer actuelle. Dans le but d'assurer une remise en état durable de son gouvernail, le skipper se doit d'effectuer la réparation à sec; dès lors, la recherche d'une mer calme est devenue critique afin de lui permettre la poursuite l'épreuve.

Le quatuor de tête qui dicte maintenant le rythme de la course en est un de talent et d'expérience. En fait, à eux quatre, les marins cumulent neuf Vendée Globe et des dizaines de régates en solitaire.

Michel Desjoyeaux (Foncia), fort de sa spectaculaire remontée jusqu'à la première position, conservait respectivement une avance de 36 milles sur Roland Jourdain (Veolia) et de 99 milles sur Jean Le Cam. Ce trio est suivi de très près par Sébastien Josse (BT) qui se positionne à tout juste 5 milles derrière Le Cam. Josse, fidèle à lui-même dans sa manière de naviguer, indiquait être satisfait de sa position à l'avant :

« La mer est très formée, plus grosse que la force correspondante du vent. Je suis bien heureux d'avoir réussi à me maintenir dans le peloton tout en préservant la machine. Je fais ma course depuis le début et pour l'instant je suis satisfait. Je ne crois pas que nos 200 milles d'avance sur le groupe de chasse soit très significatifs. Nous verrons. Tout dépend du temps qui va mollir dans 3 ou 4 jours et de comment on en ressortira. »

Faisant partie du groupe de chasse, Vincent Riou (PRB) avait quant à lui retrouvé de sa vigueur ce matin malgré une collision sans conséquence fâcheuse avec un growler (une glace dérivante).

« Je suis en phase de transition et le vent va en augmentant. J'ai tapé un growler de 10 m de long et 1 m de haut et du coup mon safran s'est relevé. Je suis chanceux puisque je n'ai rien cassé autre que le puits de ma dérive qui a maintenant un peu de jeu. Pour recoller le peloton, les coups météo à jouer seront nombreux à partir de la Nouvelle-Zélande. J'ai refusé de jouer le jeu du pied au fond depuis une semaine alors ce n'est pas maintenant que je vais commencer. Mon pied va mieux et je me sens moins handicapé. Je ne suis pas à 100 %, mais c'est vraiment mieux.»

La bête à sang froid et analytique au possible qu'est Riou n'a pas dit son dernier mot. Gagnant de l'édition 2004, il sait parfaitement qu'on ne gagne pas un Vendée Globe avec 21 000 km encore à faire. Relégué pour l'instant à 340 milles derrière la première position, ne comptez pas le compagnon d'arme de Michel Desjoyeaux sorti de la course.

Animal à sang froid que je vous dis...

Une belle bagarre est à surveiller dans le groupe de retardataires. L'Anglaise Samantha Davies (Roxy) a en effet pris la mesure de Brian Thompson (Team Pindar) et le match en cours en est aussi un d'architecture navale.

Davies navigue sur le bateau gagnant des éditions 2000 et 2005 du Vendée Globe alors que Brian Thompson pilote celui qui est le plus puissant de l'édition actuelle. En fait, Team Pindar est tellement puissant que le Britannique ne parvient pas à gérer sa puissance convenablement depuis le départ alors que l'Anglaise tire un maximum de son ancienne, mais très noble monture.

Au dernier classement officiel, la sympathique Anglaise conservait 100 milles d'avance sur Thompson. Il est à noter que la construction de Team Pindar a été financée par le royaume de Bahreïn et le propriétaire ne peut que constater que les dollars investis tardent à acheter des positions, Thompson étant 11e sur 19.

Première communication radio avec le Canadien Derek Hatfield (Spirit of Canada) depuis 4 jours. Le Canadien était reposé alors que les vents augmentaient en force en vue d'affronter sa troisième tempête des 8 derniers jours. Toute chose étant relative, il naviguait dans des vents « doux » de 31 noeuds (60 km/h) lorsque joint :

« Je deviens meilleur et plus confiant à naviguer le bateau dans les conditions difficiles. Les mers du sud sont une école pour joueur sérieux. Mes craintes du gros temps sont diminuées, mais je demeure peu confiant envers mes pilotes automatiques dans ces conditions. Aussi bizarre que cela puisse sembler, la vitesse et ton meilleur ami dans le gros temps, car le bateau est beaucoup moins secoué lorsqu'il file au lieu d'être balloté par la vague dans tout les sens. Merci à la direction de course qui est très professionnelle. J'ai eu à m'arrêter une heure en pleine tempête et le téléphone du Q.G. course a sonné très rapidement pour s'informer si tout était O.K. à bord. C'est rassurant de voir qu'on nous surveille 24 heures sur 24. »

Avec 11 abandons à ce jour et deux bateaux avec des problèmes techniques toujours en course, la relation amour-haine entre l'Océan indien et les régatiers est à son paroxysme.

Sur cet océan, la machine à vent australe y est toujours en fonction.

Ce vent, créé par des dépressions allant en tous sens, s'additionne à la réflexion de la mer générée par le mouvement de la grande houle et des vagues entre les côtes du Mozambique et de Madagascar. Dès lors, une mer croisée permanente se forme et le coeur des skippers balance constamment entre le parfum des immenses surfs qui ne feront que forcir à l'approche du Pacifique et la sensation inquiétante de la grosse mer casse bateau qui n'offre absolument aucun pardon à l'embarcation mal réglée ou en mauvais état.

Météo France nous informait ce matin que l'ensemble de la flotte serait encore sous l'influence de grosses dépressions aujourd'hui. Une première dépression touchera l'avant de la flotte avec des vents moyens de 40 à 45 noeuds alors qu'une deuxième touchera la queue de flotte en soufflant quant à elle à une force moyenne de 35 à 40 noeuds.

Le méchant Indien poursuivra donc son travail...

Quelques vidéos :

Dématâge de Mike Golding (Ecover)

Bernard Stamm (Cheminée Poujoulat) évacue son bateau échoué

Suivez la position des skippers

Les positions + retard sur le 1er (milles nautiques)

1- Michel Desjoyeaux-FRA (Foncia),

2- Roland Jourdain-FRA (Veolia Environnement), 36

3- Jean Le Cam-FRA (VM Matériaux), 99

4- Sébastien Josse -FRA (BT) 104

5- Armel Le Cléac'h-FRA (Brit Air), 314

6- Vincent Riou-FRA (PRB), 352

7- Jean-Pierre Dick-FRA (Paprec-Virbac), 419

8- Yann Eliès-FRA (Generali), 421

9- Marc Guillemot-FRA (Safran), 426

10- Samantha Davies-GB (Roxy), 928

11- Brian Thompson-GB (Team Pindar), 1049

12- Dee Caffari-GB (Aviva), 1448

13- Arnaud Boissières-FR (Akena Verandas), 1466

14- Steve White-GB (Toe in Water), 2020

15- Jonny Malbon-GB (Artemis), 2377

16- Rich Wilson-USA (Great American), 2445

17- Derek Hatfield-CAN (Spirit of Canada), 2713

18- Raphaël Dinelli-FRA (Océan Vital), 3277

19- Norbert Sedlacek-AUT (Nauticsport), 3347

20-Jean-Baptiste Dejeantly-FRA (Maisonneuve), Abandon, multiples problèmes d'usure

21- Mike Golding-GB (Ecover), idem, Dématâge

22- Bernard Stamm-SUI (Cheminée Poujoulat), idem, Échouage

23- Dominique Wavre-SUI (Temenos), idem Ennuis de quille

24- Loïc Peyron-FRA (Gitana Eighty), idem, Démâtage

25- Una Basurko-ESP (Pakea Bizkaia), idem, Bris au puits de safran tribord

26- Jérémie Beyou-FRA (Delta Dore), idem, Barre de flèche cassée

27- Alex Thompson-GB (Hugo Boss), idem, Dommages structurels

28- Kito de Pavent-FRA (Groupe Bel), idem, Démâtage

29- Marc Thiercelin-FRA (DCNS), idem, Démâtage

30- Yannick Bestaven-FRA (Aquarelle.com), idem, Démâtage