Combien doit-on accueillir d’immigrants chaque année au Québec ? Quelles catégories d’immigrants doit-on accueillir ? Ce débat est complexe. Pour vous éclairer, nous avons demandé à chacun des quatre partis représentés à l’Assemblée nationale ce qu’ils proposent pour les seuils d’immigration permanente, pour l’immigration temporaire, ainsi que leurs deux dossiers prioritaires.

La situation actuelle

Immigration permanente

Seuil d’immigration permanente : 64 600 immigrants en 2024, 56 600 immigrants en 2025

Immigration temporaire

Il n’y a pas de seuil pour les immigrants temporaires, qui comprennent les détenteurs de permis de travail temporaire, les étudiants étrangers et les demandeurs d’asile. En vertu du droit international, on ne peut pas refuser d’accueillir un demandeur d’asile avant d’étudier son dossier.

Il y a actuellement 528 000 immigrants temporaires au Québec, qui en a accueilli 94 000 nouveaux en 2022 et 167 000 en 2023.

Coalition avenir Québec

Immigration permanente

64 600 immigrants en 2024, 56 600 immigrants en 2025

Immigration temporaire

Le gouvernement Legault veut réduire le nombre d’immigrants temporaires. La CAQ veut qu’Ottawa réduise le nombre de demandeurs d’asile au Québec (on en accueille plus que notre poids démographique). Pour les travailleurs et les étudiants, le gouvernement Legault n’a pas encore pris de décision, mais étudie des moyens d’en diminuer le nombre.

Deux priorités

  • Réduire le nombre de demandeurs d’asile : La CAQ veut qu’Ottawa prenne des mesures pour que le Québec accueille à l’avenir environ 22 % des demandeurs d’asile. Actuellement, environ 55 % des demandeurs d’asile au pays sont au Québec, selon Statistique Canada⁠1. Québec veut qu’Ottawa resserre sa gestion des visas, que les demandeurs d’asile soient répartis dans l’ensemble du pays de façon volontaire et que la totalité des dépenses d’accueil des demandeurs d’asile lui soit remboursée. « Nous recevons les demandeurs d’asile avec toute la dignité qu’il faut, mais leur nombre est tel qu’on arrive à un point de rupture pour l’octroi de services adéquats », dit la ministre de l’Immigration du Québec, Christine Fréchette.
  • La francisation : La CAQ veut hausser les services de francisation, mais Francisation Québec n’a traité que 40 % des demandes depuis sa création il y a sept mois. « Nous avons investi des sommes considérables dans Francisation Québec, dit la ministre Fréchette. Nous voulons mettre les bouchées doubles pour embaucher le personnel requis afin de répondre à la vaste demande. »

Parti libéral du Québec

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le député libéral André A. Morin

Immigration permanente

70 000 immigrants par an

Immigration temporaire

Le PLQ ne donne pas de cible pour l’immigration temporaire, et ne précise pas s’il veut hausser ou diminuer le nombre d’immigrants temporaires économiques et d’étudiants étrangers.

Deux priorités

  • Avoir une politique migratoire « coordonnée et planifiée » : Selon le député libéral André A. Morin, il faut « accueillir autant d’immigrants temporaires qu’on en a besoin pour faire fonctionner l’économie québécoise, pour s’assurer qu’on restera concurrentiel. D’ici 2030, il va y avoir 1,6 million de travailleurs qui ne seront plus sur le marché du travail. »
  • Accélérer les réunifications familiales par l’immigration : Il y a actuellement 36 000 immigrants en attente d’une décision de regroupement familial, et Québec n’en accepte que 10 000 par an. On parle ici de membres de la famille directe immédiate (un conjoint, un parent ou un enfant). Résultat : le délai d’attente est d’environ 41 mois au Québec, contre 12 mois dans le reste du Canada. « Pourquoi [c’est si long] ? Parce que le gouvernement Legault limite les seuils, dit M. Morin. Les gens vont attendre trois ans pour être réunis, et ça ne demande pas de logement. Ce n’est pas normal d’avoir des familles québécoises séparées aussi longtemps. »

Québec solidaire

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard

Immigration permanente

Seuil entre 60 000 et 80 000 immigrants par an

Immigration temporaire

QS estime qu’il faut réduire le nombre d’immigrants temporaires. Le parti suggère de former un comité d’experts pour déterminer la capacité d’accueil de chaque région. Il demande aussi à Ottawa de répartir les demandeurs d’asile de façon volontaire à travers le pays au prorata du poids démographique des provinces.

Deux priorités

  • Faire respecter les pouvoirs du Québec en matière d’immigration : Selon Québec solidaire, l’accord Canada-Québec sur l’immigration donne au Québec le pouvoir de contrôler l’immigration temporaire. « À très court terme, le Québec doit faire respecter son pouvoir d’autoriser les travailleurs étrangers temporaires, comme l’accord le prévoit, dit le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard. Pour une raison que je ne comprends pas, la CAQ refuse d’utiliser ses leviers. »
  • Avoir un comité d’experts qui établit la capacité d’accueil : « On est rendu à 530 000 immigrants temporaires, la capacité d’accueil actuelle est dépassée, dit M. Cliche-Rivard. On veut que les économistes, des démographes, des gens des services publics, des experts en francisation qualifient la capacité d’accueil de chacune des régions en fonction de la disponibilité du logement, des services publics, de la capacité de francisation et aussi de l’apport de l’immigration dans l’économie. À partir de là, on pourra prendre nos décisions politiques. Et si on veut augmenter notre capacité d’accueil, il faut investir. »

Parti québécois

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le député péquiste Pascal Bérubé

Immigration permanente

35 000 immigrants par an

Immigration temporaire

Le PQ croit qu’il faut réduire l’immigration temporaire, autant pour les demandeurs d’asile, les travailleurs que les étudiants. Le PQ imposerait des seuils d’immigration temporaire dans plusieurs secteurs de l’économie.

Deux priorités

  • Établir la capacité d’accueil pour l’ensemble de l’immigration (permanente et temporaire) : « Ça va dépendre de la capacité de loger les gens, de francisation, des services d’accueil pour les enfants, dit le député péquiste Pascal Bérubé. On souhaite que l’immigration soit une expérience réussie. Pour que les gens soient heureux, ça implique de dire la vérité : il y a un seuil au-delà duquel on ne pourra pas accueillir correctement. La véritable responsabilité, c’est que les gens [les immigrants] soient heureux, et non de se lancer dans une surenchère clientéliste et électoraliste. Ça implique de dire la vérité. C’est l’attitude la plus responsable. »
  • Une cérémonie québécoise pour les nouveaux arrivants : Le PQ suggère aussi d’organiser des cérémonies d’accueil, sur une base volontaire, pour les nouveaux arrivants, afin de leur présenter les valeurs fondamentales du Québec comme l’égalité hommes-femmes, la primauté du français et la laïcité des institutions. « On veut la possibilité d’avoir une cérémonie d’accueil, car je suis loin d’être certain qu’on insiste sur les valeurs québécoises dans les cérémonies officielles du fédéral [sur la citoyenneté]. Les députés qui le souhaitent pourraient organiser de telles cérémonies », dit M. Bérubé.

1. Ces chiffres de Statistique Canada ne tiennent pas compte du fait qu’un certain pourcentage des demandeurs d’asile déménagent dans une autre province après leur arrivée au Québec. Selon des chiffres répertoriés par Le Devoir, le Québec a accueilli 35 % des nouveaux demandeurs d’asile au pays en 2023 en tenant compte des mouvements interprovinciaux, plutôt que 45 % (si on ne tient pas compte des mouvements interprovinciaux après l’arrivée au Québec). Le Québec représente 22 % del la population canadienne.

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