La fin d’avril est un moment excitant pour un enfant québécois. 

La neige fond, l’eau s’évapore. Le gazon devient assez sec pour être foulé. Le manteau reste sur un crochet dans le vestibule. Un t-shirt suffit. On cherche pendant 20 minutes la casquette préférée de l’automne dernier, enfouie dans une poche de linge au sous-sol. Ensuite, on va récupérer le gant de baseball qui a passé la nuit sous l’oreiller, avec une balle dans la paume et des élastiques tout autour «pour le casser».

Voilà. La saison de balle peut commencer.

Puis on ouvre la porte… et le vent est un peu frais. Ça serait une bonne idée de mettre un chandail à manches longues sous le t-shirt. Un «undershirt», comme en portent les joueurs des ligues majeures. Et peut-être aussi un gant mince sous la «mite», parce que la balle pince fort quand il fait 7 degrés dehors.

Au parc, c’est tout le quartier qui revit. «On dirait que les gens sortent de terre», chantait Joe Dassin à propos de notre printemps. Une image bien choisie.

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Cette première sortie au parc, il y a 30 000 jeunes baseballeurs au Québec qui l’attendent depuis longtemps. Ça fait des semaines qu’ils répètent leur mouvement de lanceur dans le salon. Qu’ils frappent des balles de plastique trouées dans un gymnase d’école secondaire.

La date était encerclée sur le calendrier depuis un mois. Le samedi 27 avril. Premier entraînement extérieur pour presque tous les clubs de la province.

Mais dans les jours précédents, il a plu.

Trop.

Tellement que des parcs ont été inondés. À Shawinigan. À Lachute. À Oka. À Gatineau. Des dizaines de terrains souillés. Encore hier, les cols bleus affectés à l’entretien des parcs étaient pour la plupart conscrits afin de donner un coup de main aux sinistrés. Les terrains ne sont donc pas prêts. Et ils ne le seront pas pour encore plusieurs jours, soleil ou pas.

Vous aurez deviné la conséquence: les inondations vont retarder le début de saison de nombreux jeunes. C’est normal. Dans le grand ordre des choses, c’est un souci bien secondaire. Présentement, il y a des besoins vraiment plus importants à combler. Manger. Dormir. Avoir un toit. Être au chaud. Se sentir épaulé. Des sinistrés en ont pour des mois de travaux. D’autres devront quitter définitivement leur résidence. 

Sauf que pour un enfant ou un adolescent, le premier entraînement extérieur, les retrouvailles des amis au parc, le début de saison de baseball, c’est souvent le centre de son univers. Au minimum, un étage dans la pyramide des besoins de Maslow.

«Il y a des jeunes qui ne saisissent pas tout ce qui se passe, c’est sûr.»

C’est Stéphane Pétronzio qui parle. Il est responsable du programme sport-études de baseball à la polyvalente Nicolas-Gatineau, en Outaouais. Une région fortement touchée par les inondations. 

Cette semaine, il a demandé à ses élèves d’aider les sinistrés. Presque tous ont vite répondu oui. Une aide qui est la bienvenue. Ces jeunes en forme peuvent accomplir beaucoup de travail. «Mais il y a des parents qui se demandent quand même pourquoi les jeunes ne jouent pas plutôt au baseball en après-midi.»

D’abord, quatre des six terrains du parc Sanscartier sont inondés. Dont celui qui sert de domicile aux équipes midget AAA et junior élite. Ensuite, la Ville n’ouvrira aucun parc avant la fin des inondations. «Et c’est normal», reconnaît-il. 

«C’est important de sensibiliser les joueurs à ce qui se passe autour d’eux. Le programme sport-études, ce n’est pas juste une école de baseball. C’est aussi une expérience de vie. Remplir des sacs de sable, c’est un travail d’équipe, c’est offrir un soutien à la communauté. Ce sont des gestes importants. Quand on a la chance de faire vivre autre chose aux jeunes, de les faire participer à la vie civique, on le fait. C’est aussi ça, l’éducation.»

Depuis le week-end, Stéphane Pétronzio a passé de nombreuses heures sur le terrain, mais aussi au téléphone. Il cherche à réorganiser les horaires de ses équipes. Les autres clubs collaborent bien. «Si tout va bien, on va pouvoir jouer ici au début juin», estime-t-il. D’ici là, les jeunes de son programme feront beaucoup de kilométrage et affronteront leurs adversaires sur la route.

En parallèle, Baseball Québec s’active pour aider les jeunes joueurs qui ont perdu des morceaux d’équipement dans les inondations. Pour remplacer un gant qui a pris l’eau, par exemple. La fédération espère trouver un partenaire qui facilitera l’achat de matériel neuf. Elle devrait procéder à une annonce prochainement. Entre-temps, si vous habitez dans la couronne nord de Montréal, notez qu’il y aura une collecte de dons d’équipement pour venir en aide aux victimes des inondations, le 18 mai, au terrain de la ville de Lorraine.

91,9 Sports: la suite

Le groupe Leclerc Communications a renoncé hier à l’achat de CHOI-FM et du 91,9 Sports. Vous trouverez les explications dans la section Affaires.

Le 91,9 reste donc une station de radio parlée entièrement consacrée à l’actualité sportive. C’est une bonne nouvelle pour ses artisans. De vrais pros qui travaillent avec passion malgré les circonstances difficiles. C’est aussi une bonne nouvelle pour le public montréalais. Une antenne spécialisée en sports est une meilleure option qu’une 10e station musicale autour de la montagne.

Maintenant, le problème reste entier. Le CRTC a souligné hier que le 91,9 Sports est une station «largement déficitaire». Le propriétaire, RNC Média, accumule «des pertes importantes» depuis 2014. La part d’écoute n’est que de 1,5% dans le marché francophone de Montréal. Et le potentiel de croissance est très limité.

Pourquoi? Parce que la fréquence du 91,9 Sports est mauvaise. À l’extérieur de l’île de Montréal, c’est aussi agréable à écouter qu’un récital de violon d’un enfant de 6 ans. La station fait partie d’un réseau (RNC) qui n’est pas présent partout sur le territoire du Québec. Ce sont deux facteurs importants dans les négociations pour les droits du Canadien, des Alouettes ou de l’Impact, qui appartiennent tous au réseau Cogeco.

La prochaine étape? Sûrement pas le statu quo. La station perd trop d’argent. Les deux options les plus réalistes sont la restructuration et la vente. L’incertitude persiste donc. Mais c’est déjà mieux que le changement de vocation qui était évoqué depuis six mois.