Plus de 40 ans après sa création, et après avoir fait l'objet de cinq séries et de 10 longs métrages, l'univers imaginé par Gene Roddenberry prend un nouvel envol - et il est décisif. Sonia Sarfati a rencontré ceux qui ont piloté l'Enterprise là où l'homme n'est jamais allé: au moment du vol inaugural du mythique vaisseau mené par son légendaire équipage.

ll y a eu Generations et Insurrection. Le 11e film Star Trek, qui navigue sans titre secondaire, est, lui, à l'enseigne de la résurrection. C'était la mission de ses créateurs, parmi lesquels J.J. Abrams, l'homme derrière Lost, Alias et Cloverfield: faire revivre une franchise moribonde. Histoire d'un petit miracle.

J.J. Abrams l'avoue d'emblée: il n'a jamais été un fan de Star Trek. Et il n'a pas honte de ce crime de lèse-trekkies. D'autant plus que dans cette «faille» se trouvent le pourquoi et le comment de sa présence aux commandes de ce qui aurait pu être une galère mais qui est plutôt la résurrection d'une franchise sur laquelle, depuis l'échec commercial de Nemesis en 2002, Paramount envisageait de fermer le cercueil.

«Je n'ai jamais compris cette série mais, à l'école, j'avais des amis qui ne juraient que par elle. Quand on m'a demandé d'être producteur du 11e long métrage, j'ai accepté en me disant que ce serait en défi intéressant de travailler à un Star Trek qui m'intéresserait», a raconté l'homme, entre autres à l'origine de Lost, Alias et Cloverfield. Nous l'avons rencontré à Los Angeles à quelques jours de la sortie de Star Trek... qu'il a également réalisé. Parce qu'en lisant le scénario de Roberto Orci et Alex Kurtzman (avec qui il avait travaillé sur Mission: Impossible III), il a compris qu'il jalouserait quiconque porterait cette histoire à l'écran.

L'histoire en question est campée là où ceux qui ont oeuvré aux 5 séries et aux 10 films précédents ne sont jamais allés: aux tout débuts de l'Enterprise, dont on explore la première mission; et de son équipage, éclectique en ce qui concerne les caractères, les nationalités... et même, les espèces. Un pari audacieux que J.J.

Abrams a relevé en compagnie d'une équipe elle aussi variée quant aux relations «star-trekkiennes»: «Je connaissais mais de l'extérieur. Roberto est un fan fini et Alex, un fan moyen. Quant à Bryan (Burk, le producteur délégué du film), il n'en avait jamais vu un épisode», résume le réalisateur. Comment, mieux que ça, avoir des points de vue différents sur le long métrage à faire?

Un long métrage qui, croit Roberto Orci, sera perçu comme une suite par les fans - «Cela en dit beaucoup sur le destin et le cheminement de Spock» et, par les autres, comme une prequel «qui explore les origines des personnages».

Résultat: un scénario qui salue au passage des moments et des phrases-cultes de la mythologie «trekkienne» et qui aussi comporte assez d'action et de suspense pour les novices comme pour les experts - contrairement à Star Wars, par exemple, dont les chapitres un, deux et trois menaient à des événements connus de tous ceux qui avaient vu la trilogie originale. «Pas terrible pour le suspense», résume J.J. Abrams.

Finalement, pour lui, l'aventure a été une partie de plaisir ponctuée de la bagatelle de... «de quelque 80 millions de décisions à prendre», pouffe-t-il, conscient que «si tu décides de faire Star Trek, tu fais Star Trek à fond».

Pour cela, il fallait endosser la vision du futur de l'humanité tel qu'imaginé par Gene Roddenberry quand il a créé la série en 1966: une vision positive qui dit l'audace, le courage des hommes partis en exploration pacifique de l'univers; et l'émerveillement qui découle de cette quête d'étoiles désormais accessibles. En ce sens, Roddenberry fait preuve d'un optimisme qui tranche avec la plupart des oeuvres de science-fiction, d'hier comme d'aujourd'hui.

Voilà pour le contenu. Il fallait faire la même chose avec le contenant. Certaines choses se devaient d'être là, point final. «La silhouette de l'Enterprise, par exemple, doit être la silhouette de l'Enterprise; et les uniformes de Starfleet, les uniformes de Starfleet, poursuit le réalisateur. Mais quand vous y regardez de près, vous vous rendez compte que tout ça a été adapté à aujourd'hui.»

En douceur et avec respect, par des gens conscients dès le départ que «la principale difficulté du projet ne serait pas dans les effets spéciaux (note: avec un budget de plus de 150 millions, on comprend), mais, une fois que nous aurions un scénario, dans la continuité visuelle de l'univers et celle des personnages».

Là a commencé un épisode clé. Celui de la distribution des rôles...