Cortina, ça vous dit quelque chose? Un indice: ce n'est pas une marque de pâtes italiennes. C'est comme dans Ford Cortina, la petite berline anglaise des années 60, 70 et 80.

Très populaire en Grande-Bretagne et en Europe, la Cortina est née en 1962 et cinq générations ont été vendues jusqu'à sa disparition en 1982. Cette Ford anglaise a d'ailleurs été reprise par Ford Allemagne et baptisée Taunus. Vendue à plus d'un million d'exemplaires pour chacune des cinq générations, la Cortina a fait les beaux jours de Ford Europe pendant 20 ans.

Ce succès commercial est en partie attribuable à la décision de Ford de créer une version sportive de la Cortina, une mission que la filiale britannique du géant américain a confiée à Colin Chapman, le créateur de la marque Lotus. Un choix logique, puisque Chapman venait d'adopter un quatre cylindres Ford modifié pour son exceptionnelle petite Lotus Elan.

C'est donc au moteur baptisé Kent que Chapman a greffé une culasse en aluminium à deux arbres à cames en tête. Les premiers moteurs ont été des 997 cc et des 1340 cc, mais Chapman est rapidement passé au nouveau Ford 1,5 L (le 116e pour les intimes), qui avait le grand avantage de tourner sur cinq paliers. Très rapidement, ce moteur est passé à 1,6 L, la cylindrée maximale autorisée par la réglementation sportive dans cette catégorie de voitures.

Deux grands esprits

Simultanément, Walter Hayes, dirigeant de Ford qui souhaitait rehausser l'image sportive de Ford, a demandé à Colin Chapman de construire 1000 berlines Ford dotées de ce moteur afin de se qualifier à l'homologation aux courses en Groupe 2. Sans hésiter un instant, Chapman a commencé à modifier les Cortina deux portes partiellement assemblées qui lui avaient été livrées par Ford dans son usine de Cheshunt, là où a été construite l'Elan.

C'est ainsi qu'est née en 1962 la Lotus Type 28, ou Lotus Cortina, selon Lotus - ou encore Cortina Lotus, selon Ford. Le secret de Chapman? Rien de très sorcier, mais des modifications bien pensées pour renforcer et alléger le châssis, l'installation du moteur de 105 chevaux (par rapport à 61 dans la Cortina de base) allié à une boîte de vitesses à rapports rapprochés, la modification en profondeur de la suspension arrière, l'abaissement de la suspension avant, l'installation de sièges sport et d'une instrumentation complète et, évidemment, l'adoption de freins à disque assistés à l'avant, ainsi que quelques changements esthétiques - notamment la bande latérale verte de la carrosserie peinte en blanc, question de donner à la paisible berline une allure un peu plus menaçante.

Un loup déguisé en agneau

Rien de révolutionnaire, certes, mais le résultat a néanmoins été percutant. Malgré ses quelques problèmes de fiabilité (notamment avec l'essieu arrière), la Lotus Cortina est devenue un véritable loup aux mains de pilotes de talent, dont le grand Jim Clark, le sympathique Jacky Ickx et le très écossais Jackie Stewart. Tant en Grande-Bretagne que sur le Continent, la Lotus Cortina a raflé tous les honneurs sur les circuits, même contre des voitures deux ou trois fois plus puissantes, son poids plume lui procurant une agilité et une tenue de route exceptionnelles. Son palmarès en rallye est d'ailleurs tout aussi impressionnant.

Ford a donc gagné son pari et la Cortina est devenue la coqueluche de toute une génération de Britanniques, d'Européens, d'Australiens et de Néo-Zélandais. Et pour boucler la boucle, Ford a proposé la Cortina GT (78 chevaux), sa berline sport abordable. La version Lotus a même été jusqu'à faire sa marque en Amérique, notamment en série Trans-Am.

C'est d'ailleurs dans cette série que la Lotus Cortina rouge à bande dorée (une couleur d'usine) que vous voyez sur la photo s'est distinguée pendant la saison 1967, une des deux voitures expédiées aux États-Unis en 1966. Celle-ci était pilotée par Sir John Whitmore, Frank Gardner, Jacky Ickx, Hubert Hahne et Richard Atwood. Un beau pedigree.