L'acteur ontarien Dan Aykroyd a réalisé un seul film. Dans Nothing But Trouble, tourné en 1991, le shérif et le juge d'un petit village envoient en prison un banquier et sa maîtresse qui ont commis l'erreur de brûler un panneau d'arrêt. Leur crime, on le voit bien, c'est de venir de la grande ville.

Des économistes de la Virginie viennent de confirmer la prémisse de ce navet: le risque d'écoper d'une contravention est beaucoup plus grand quand on est étranger, particulièrement dans les petites municipalités. Si on traverse une ville de taille moyenne à bord d'une voiture immatriculée «ailleurs», le risque d'écoper d'une contravention augmente de 20%, selon les chercheurs de l'Université John Mason.

«Curieusement, personne n'avait jamais cherché à vérifier cette situation connue de la plupart des automobilistes qui voyagent», explique Michael Makowsky, l'un des coauteurs de l'étude à paraître dans la revue American Economic Review. «Nous établissons la preuve que des facteurs autres que la sécurité semblent dicter les actions des policiers dans le contrôle de la vitesse sur les routes.» La seule autre étude qui faisait une telle analyse, selon M. Makowsky, comprenait différentes infractions et avait donc des résultats mitigés.

À partir d'un échantillon de 68 000 interventions policières pour excès de vitesse, les chercheurs ont déterminé le risque d'avoir une contravention ou un avertissement. Globalement, il était de 45%. Si l'automobiliste n'habitait pas les environs, il grimpait à 55%, et s'il venait d'un autre État, à 65%. La taille de la municipalité jouait un rôle important: un automobiliste d'un autre État arrêté dans un petit village avait 75% de risques d'avoir une contravention. Les données ont été recueillies sur une période de deux mois au Massachusetts, où toutes les interventions policières relatives à la sécurité routière sont compilées dans une base de données.

À noter, l'État de résidence jouait un rôle encore plus élevé que la race. Les automobilistes d'origine hispanique avaient 15% plus de risques de recevoir une contravention. «Nous n'avons pas vu de différence pour les Afro-Américains, dit M. Makowsky. Ça signifie peut-être que notre échantillon était trop petit pour faire une analyse raciale.» Par ailleurs, une femme a 32% moins de risques qu'un homme d'avoir une contravention.

Seuls les policiers de l'État - les «State troopers» - semblaient indifférents au lieu de résidence du conducteur intercepté. Selon les économistes, cela signifie que leur hypothèse de départ était appropriée. «Nous pensons que les policiers sont moins susceptibles de donner une contravention à quelqu'un qui a de l'influence sur leurs conditions de travail et sur celles de leur patron.

Au Massachusetts, les chefs de police locaux sont nommés par les élus pour une période de trois ans. D'ailleurs, la probabilité de recevoir une contravention était de 20% plus élevée dans les villes qui connaissaient des difficultés budgétaires. Ça ne veut pas nécessairement dire qu'il y a un mot d'ordre clair de donner plus de contraventions, particulièrement aux étrangers. Mais dans les petits villages, tout le monde se connaît bien et certaines choses n'ont pas besoin d'être dites pour être comprises.»

M. Makowsky a eu l'idée de faire cette analyse après s'être fait arrêter pour excès de vitesse lors de vacances au Massachusetts. «Je suivais les autres conducteurs et beaucoup allaient plus vite que moi. Je me suis demandé pourquoi l'agent m'avait arrêté, moi, en particulier.»

Il veut maintenant vérifier si les variations du nombre de contraventions ont un impact sur la sécurité routière.