C’est à Zora Arkus-Duntov que l’on doit la genèse de la Corvette telle qu’on la connaît. Né à Bruxelles en 1909 et élevé à Saint-Pétersbourg, le premier ingénieur en chef de l’icône américaine a milité pour pousser son potentiel de performance à des niveaux inespérés dès son embauche en 1953. Dans les coulisses, ce pilote de course accompli s’affairait aussi à développer des prototypes de Corvette à moteur central arrière, conscient des immenses avantages que confère cette configuration. Vingt-trois ans après sa mort, sa vision est devenue réalité.

Le design

PHOTO FOURNIE PAR CHEVROLET

Il y a une très belle continuité dans ces traits qui convergent à l’avant vers un point central bien défini.

Les moments dans l’histoire de l’automobile moderne qui sont si marquants sont rares. Évidemment, cette Corvette C8 est loin d’être le premier opus populaire à faire usage d’une mécanique centrale arrière, mais c’est surtout la transition d’un design de coupé biplace connu et éprouvé vers une posture indéniablement exotique qui est chargée de sens. Cette C8 veut secouer le monde de la voiture sport. Il y a une très belle continuité dans ces traits qui convergent à l’avant vers un point central bien défini. La largeur manifeste de la voie arrière assoit une prestance indéniablement européenne, avec les branchies exposées à l’arrière mises en évidence par des crochets noirs. La version décapotable, la première à toit rigide de l’histoire du modèle, cache complètement le compartiment moteur, et présente un design plus raffiné avec un couvercle sculpté et des carénages aérodynamiques derrière les appuie-têtes. C’est prenant visuellement, surtout avec le toit rabattu, mais probablement plus complexe qu’auparavant.

À bord

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On remarque le volant quasi rectangulaire et la prédominance du thème du cockpit.

On entre tout de même assez aisément dans l’habitacle de cette Corvette, ce qui la distingue de bien des supervoitures employant une telle architecture. Bien calé dans des baquets optionnels GT2 élégants et dont le dessin assure un grand soutien sans larguer le confort, on remarque le volant quasi rectangulaire et la prédominance du thème du cockpit. Tout est centré autour du poste de pilotage, avec des commandes légèrement inclinées pour assurer leur ergonomie. La succession de touches formant un trait continu sur la console centrale a de quoi nous dérouter au premier contact, mais on s’y fait assez rapidement. Par-dessus ces divers constats, on dénote un raffinement inédit pour une Corvette. Certes, la version essayée dépasse les 100 000 $, mais l’usage de cuir surpiqué, d’aluminium et de microfibres donne l’impression d’un objet nettement plus précieux qu’auparavant. Cela dit, la ligne de toit très basse limite énormément le dégagement pour la tête, surtout si votre taille dépasse les 6 pi.

Sous le capot

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La huitième génération de la Corvette est pourvue d’une version retravaillée du V8 de 6,2 L de la génération précédente.

Sous l’impulsion d’Arkus-Duntov, Chevrolet a introduit en 1955 la toute première Corvette à moteur V8. La huitième génération de la Corvette obéit à cette convention avec une version retravaillée du V8 de 6,2 L de la génération précédente. Toujours doté de l’injection directe et de la cylindrée variable, ce moteur à culbuteurs outillé d’un carter sec produit 495 ch et 470 lb-pi. Il fait sentir sa présence dès le démarrage avec un grognement guttural. On sent toutefois une plus grande rondeur dans sa sonorité que dans la C7 et une certaine réserve sur le niveau sonore, une plus grande sophistication appréciée lors des longues balades. Ce LT2 demeure une pièce de choix dans la mesure où il livre son couple avec une constance inébranlable, sans perdre son caractère alors qu’il frétille sporadiquement d’impatience au ralenti. La vedette reste toutefois la boîte à double embrayage Tremec à huit rapports, d’une rapidité stupéfiante, ce qui rend l’exercice encore plus immersif lorsqu’on manie ses palettes.

Derrière le volant

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Lorsque le rythme s’accroît, on sent les avantages inhérents à cette configuration dans l’immense stabilité de cette Corvette.

Essentiellement composée d’aluminium, la nouvelle plateforme de cette C8 est évidemment plus rigide qu’auparavant. Nettement plus raffinée que les versions qui l’ont précédée, elle épouse à vitesse normale une attitude de grand tourisme dont la qualité d’exécution est inédite pour le modèle. Les amortisseurs électromagnétiques de quatrième génération font carrément disparaître les aspérités. Lorsque le rythme s’accroît, on sent les avantages inhérents à cette configuration dans l’immense stabilité de cette Corvette, mais surtout sa prévisibilité. Certes, le train arrière danse moins qu’avant, ce qui peut rendre l’exercice un peu moins captivant, voire intimidant, pour les puristes, mais on goûte sans doute mieux aux nuances de son pilotage, avec une excellente visibilité vers l’avant en prime. La direction à démultiplication variable taille au scalpel les virages et le freinage offre un dosage fort modulable, malgré son assistance entièrement électronique. Finalement, on ne peut passer sous silence l’immense degré de configuration de son comportement avec le groupe Z51 qui réveille le geek en vous.

Les technologies embarquées

PHOTO JESSICA LYNN WALKER, FOURNIE PAR CHEVROLET

L’écran tactile est fort lisible grâce à son angle qui pointe vers le conducteur.

Porte-étendard d’un géant de l’industrie, cette Corvette C8 se veut également une vitrine technologique. Elle embarque donc une toute nouvelle architecture électrique cherchant à augmenter la vitesse de transmission des données en conduite et permettre les mises à jour à distance. Elle s’appuie évidemment sur la dernière mouture du système d’infodivertissement de General Motors, toujours aussi agréable à utiliser et surtout fort intuitif. Son écran tactile est fort lisible grâce à son angle qui pointe vers le conducteur. Cela le rend cependant quasi inaccessible au passager. Le tout est doublé d’un second écran projetant les mesures de conduite. Tout aussi lisible, il présente cependant une vitesse de rafraîchissement un peu plus lente que le premier écran, mais est tout aussi simple à consulter. La seule réelle faute concerne les commandes du volant pour le volume et les changements des pistes de chansons, situées au bas du volant, ce qui nous force à déplacer nos mains.

Le verdict

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Cette Corvette C8 témoigne de l’immense force créatrice de General Motors lorsqu’elle s’accorde les moyens nécessaires pour arriver à ses fins.

Il est sans doute encore trop tôt pour saisir l’étendue et la pérennité de l’impact qu’aura cette Corvette C8 sur l’histoire automobile. Qu’à cela ne tienne, elle témoigne de l’immense force créatrice de General Motors lorsqu’elle s’accorde les moyens nécessaires pour arriver à ses fins. C’est un grand cru, c’est indéniable. La version décapotable essayée en témoigne grâce à une qualité de fabrication extraordinaire se traduisant par une absence de bruits suspects malgré les 14 000 km éreintants à son compteur. Son design appuie une extravagance calculée dont personne dans son segment ne peut se targuer. Et il y a cette acuité dans les mouvements, constamment prévisibles, qui complète le portrait. Le V8 LT2 n’est peut-être pas la mécanique la plus passionnante, pour ça il faudra attendre l’arrivée de la version Z06, mais il fait le travail avec ténacité tout en assurant une consommation raisonnable. Chose certaine, cette Corvette est remarquable, dans le bon sens du terme. Elle aurait sans doute arraché un sourire en coin à Zora Arkus-Duntov.

Carnet de notes

Une Corvette Z06 bientôt dévoilée

Chevrolet dévoilera le 26 octobre prochain la version Z06 de la Corvette C8, qui devrait être mue par un V8 issu du programme de course du modèle de cylindrée moindre dont la configuration à vilebrequin à plat lui permettra de grimper à très haut régime.

La répartition du poids, son atout caché

Grâce à la motricité que confère la répartition des masses de cette Corvette (40 % à l’avant et 60 % à l’arrière), cette dernière est la deuxième Corvette parmi les plus rapides de l’histoire en matière d’accélération selon les mesures de General Motors. Avec un 0-97 km/h bouclé en 2,9 s, seule la C7 ZR1 disposant d’un avantage considérable de 260 ch (755 ch) est plus vive sur cette mesure.

Deux coffres pour un

Bien des voitures à moteur central arrière n’ont qu’un coffre placé à l’avant. À l’instar de la première Acura NSX, la Corvette C8 en a deux : un à l’avant et l’autre derrière le moteur à l’arrière. Le volume total obtenu est de 358 L, autant pour le coupé que pour la décapotable.

Pour négocier les obstacles quotidiens

La Corvette C8 peut être pourvue d’un système hydraulique permettant d’augmenter la garde au sol à l’avant de 40 mm. Le conducteur peut présélectionner pas moins de 1000 endroits où il peut s’activer automatiquement. Une option de 2495 $ qui peut éviter bien des maux de tête.

Beaucoup de vent dans l’habitacle

Malgré le fait que Chevrolet nous affirme que la carrosserie a été dessinée pour diminuer le plus possible l’incursion du vent dans l’habitacle une fois le toit rabattu, l’essai nous a confirmé que la C8 décapotable n’est pas une première de classe à ce chapitre.

Fiche technique

Modèle à l’essai : Chevrolet Corvette C8 décapotable 3LT Z51
Moteur : V8 ACC 6,2 L
Puissance : 495 ch à 6450 tr/min
Couple : 470 lb-pi à 5150 tr/min
Transmission : automatique à double embrayage à huit rapports avec mode manuel
Architecture motrice : moteur central arrière, propulsion
Consommation (ÉnerGuide) : 12,4 L/100 km (octane 91)
Fourchette de prix (décapotable) : de 80 748 $ à 96 248 $ (version essayée avec options : 113 463 $)
Concurrentes (fourchette de prix semblable) : Jaguar F-Type et Porsche Cayman/Boxster
Du nouveau en 2021 ? Nouvelles couleurs, suspension adaptative offerte en option à la carte, Android Auto et Apple CarPlay sans fil intégrés

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