Loin de constituer un exercice gratuit, le concept Mission E Cross Turismo, présenté en avant-première au Salon de Genève de 2018, préfigurait ouvertement la version « tout-terrain » qui débarque dans les salles d’exposition le mois prochain.

La fin de la récréation

Méfiance ! Par les temps qui courent, les études de style ne sont plus des engins futuristes sans lendemain. Lorsqu’ils présentent des prototypes, les constructeurs ont souvent une idée en tête. Le concept Mission E Cross Turismo a reçu un accueil suffisamment enthousiaste pour que Porsche donne suite à ce projet. Ce faisant, la marque allemande sonne la fin de la récréation pour tous ces véhicules sportifs à vocation familiale qui avalent de l’essence à grande lampée.

Avec la sortie du Taycan, Porsche a réussi la première étape de son pari électrique et tire déjà certaines conclusions. Retenons celles-ci : 50 % des acheteurs n’avaient jamais posé les fesses dans une Porsche et leur moyenne d’âge est inférieure de sept ans à la moyenne de la marque.

Rassurée, la firme de Zuffenhausen entreprend, sans trop de risques, la deuxième phase de son plan avec le lancement du polyvalent Cross Turismo. Ce dernier promène une silhouette plus élancée, plus familiale, à la manière d’une Panamera Sport Turismo qui procure au Cross Turismo une polyvalence accrue par rapport au Taycan duquel il dérive assez étroitement.

  • Le Cross Turismo peut compter sur une polyvalence accrue par rapport au Taycan duquel il dérive assez étroitement.

    PHOTO FOURNIE PAR PORSCHE AG

    Le Cross Turismo peut compter sur une polyvalence accrue par rapport au Taycan duquel il dérive assez étroitement.

  • Le Cross Turismo dévore la route pratiquement en silence.

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    Le Cross Turismo dévore la route pratiquement en silence.

  • La silhouette – à la fois élancée et familiale – du Cross Turismo peut se coiffer de barres de toit (en option).

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    La silhouette – à la fois élancée et familiale – du Cross Turismo peut se coiffer de barres de toit (en option).

  • Le tableau de bord est le même que l’on retrouve à bord des autres véhicules Porsche. L’ameublement dispose également d’une console centrale.

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    Le tableau de bord est le même que l’on retrouve à bord des autres véhicules Porsche. L’ameublement dispose également d’une console centrale.

  • La fonction Gravel permet de négocier un terrain plus difficile.

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    La fonction Gravel permet de négocier un terrain plus difficile.

  • Les sièges arrière témoignent de la nature sportive du Cross Turismo.

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    Les sièges arrière témoignent de la nature sportive du Cross Turismo.

  • Le coffre dispose d’un volume de 446 L.

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    Le coffre dispose d’un volume de 446 L.

  • La récupération d’énergie au freinage n’est pas maximisée. Porsche justifie ce manque d’efficacité par son refus de dénaturer les sensations sportives recherchées par sa clientèle.

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    La récupération d’énergie au freinage n’est pas maximisée. Porsche justifie ce manque d’efficacité par son refus de dénaturer les sensations sportives recherchées par sa clientèle.

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À l’arrière, la garde au toit progresse de 45 mm, tandis que le coffre accessible par l’entremise d’un hayon ouvrant atteint un volume de 446 L (dossiers arrière en place). C’est 39 L de plus que celui du Taycan. À ces différences s’ajoute une garde au sol plus élevée capable d’assurer au Cross Turismo des passages plus fluides sur des parcours accidentés. D’ailleurs, Porsche pousse l’enveloppe un peu plus loin en proposant, moyennant un supplément de quelque 2000 $, un groupe d’options tout-terrain. Celui-ci comprend des éléments de style assurant une meilleure protection contre le gravier et relève la garde au sol de 10 mm en mode normal.

À ce sujet, le Cross Turismo compte un paramètre de conduite additionnel (Gravel) par rapport au Taycan afin d’affronter un terrain plus difficile, pour peu que celui-ci ne soit pas extrême. Cette fonction, une fois enclenchée, régule ou étrangle, c’est selon, l’impétuosité de la mécanique. Le Cross Turismo n’a aucune aptitude à grimper aux arbres ni à traverser un gué. Pas même avec les pneus « toutes saisons » offerts, vous l’aurez deviné, en option.

C’est sur la route que le Cross Turismo excelle le plus. Dans ses déclinaisons les plus rageuses et à l’aide de la fonction démarrage éclair (Launch Control), le Cross Turismo ne fait qu’une bouchée de ses homologues qui carburent à l’énergie fossile. À l’accélération comme en reprises, le Cross Turismo franchit le fil d’arrivée en premier.

Naturellement, cette performance est accomplie pratiquement en silence. Et sans émotion particulière, à l’exception de l’enclenchement automatique, vers 80 km/h, du deuxième rapport de la boîte de vitesse. La Cross Turismo délivre une furie à donner le haut-le-cœur à ses occupants tellement c’est violent ! Et contre toute attente, cette poussée demeure constante, linéaire, imperturbable. Un trait de caractère propre à tous les véhicules électriques, sans exception.

Dès lors, la véritable prouesse de ce Cross Turismo est d’exprimer cette puissance, sans compromettre la dynamique du châssis, d’une part, et l’image de la marque, d’autre part. Le Cross Turismo pèse en effet plus de 2 tonnes. C’est beaucoup, mais c’est très relatif dans le cas présent.

En effet, ses rivaux à moteur thermique n’en pèsent pas moins. Tout comme ces derniers, ce Porsche fait appel à des liaisons au sol pneumatiques pour masquer efficacement cet embonpoint. Il tire aussi profit – chose que la concurrence ne peut pas toujours revendiquer – d’un centre de gravité plus bas et d’une distribution de masses optimisée. Tous ces facteurs concourent à rendre le Cross Turismo extrêmement stable et prévisible à conduire. Un peu corseté sans doute dans les changements d’appui, mais efficace.

La direction, aidée en cela par un dispositif à quatre roues directrices (elles sont aussi motrices), guide avec précision ce « faux tout-terrain » dans les virages. Les adorateurs de l’électrique déploreront, pour d’évidentes raisons d’efficacité, la trop faible récupération d’énergie au freinage. Porsche se garde pour l’instant de maximiser cette fonction sous prétexte qu’elle dénature les sensations sportives recherchées par sa clientèle.

Reste la question de l’autonomie, prétexte souvent invoqué pour se ranger du côté des moteurs à combustion interne. Dans sa configuration actuelle et en tenant compte de sa nature sportive, le Cross Turismo ne soutient pas la comparaison. Avec une autonomie mesurée à 374 km, il lui manque quelque 150 km pour faire jeu égal avec des véhicules à essence comparables. C’est beaucoup et peu à la fois, considérant le coût des ravitaillements (le plein d’un Cross Turismo coûte une quinzaine de dollars) et la rapidité à laquelle il est impossible de le recharger. À cet effet, il s’agit sans doute là d’un des désagréments de ce véhicule : le temps d’attente sur une borne de recharge standard.

Pas de révolution

Tout comme le Taycan, le Cross Turismo se garde bien de créer un environnement qui relève de la science-fiction. Le tableau de bord est le même que l’on retrouve à bord des autres créations de la marque, son combiné d’instruments n’est pas toujours très lisible – mais paramétrable à souhait. L’ameublement se complète d’une console centrale où les principales commandes se trouvent enfouies sous une dalle électroluminescente à retour haptique.

Les rangements à bord sont épars et peu pratiques. Quant aux porte-gobelets, leur positionnement reflète parfaitement le dédain qu’entretiennent depuis toujours les stylistes de la marque à leur égard.

Découvrez le Taycan Cross Turismo sur le site de Porsche Canada

Fourchette de prix

De 119 900 $ à 218 000 $

Visible dans les concessions

Septembre 2021

On aime

Tenue de route phénoménale
Accélération à couper le souffle (Turbo S)
Polyvalence accrue

On aime moins

Prix élevé et options coûteuses
Autonomie mesurée
Sens pratique pas si développé

Notre verdict

Preuve supplémentaire que l’électricité peut supplanter l’essence.

Fiche technique

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Porsche Cross Turismo

Moteur

Électrique synchrone à aimants permanents

429 ch (469 ch*) et 369 lb-pi de couple (4)

482 ch (562 ch*)/479 lb-pi de couple (4S)

616 ch (670 ch*)/774 lb-pi de couple (Turbo)

616 ch (750 ch*)/626 lb-pi de couple (Turbo S)

* Puissance maximale avec contrôle de lancement activé (Launch control)

Performances

Poids : 2245 kg (4 et 4 S), 2320 kg (Turbo et Turbo S)

Accélération (0-100 km/h) : 5,1 s (4), 4,1 s (4S), 3,3 s (Turbo), 2,9 s (Turbo S)

Vitesse de pointe : 220 km/h (4), 240 km/h (4S), 250 km/h (Turbo et Turbo S)

Boîte de vitesse

De série : automatique à 2 rapports

Optionnelle : aucune

Mode d’entraînement : intégral

Pneus

225/55R19 – 275/45R19 (4 et 4S)

245/45R20 – 285/40R20 (Turbo)

265/35ZR21 – 305/30ZR21 (Turbo S)

Capacité de la batterie et autonomie

93,4 kWh (83,7 kWh utiles)

374 km

Meilleur résultat obtenu dans le cadre de cet essai

Dimensions

Empattement : 2904 mm,

Longueur : 4974 mm,

Hauteur : 1409 mm,

Largeur : 1967mm1

1 Rétroviseurs extérieurs exclus

Sortez votre chéquier

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Porsche Cross Turismo

Dans les « on aime moins », il est question du coût des nombreuses options. Voici des exemples. Un Cross Turismo blanc ou noir n’entraîne aucun débours additionnel. Le vert « mamba » (notre photo) coûte 910 $ de plus. Le support à vélo qui se détache partiellement pour pouvoir accéder au coffre agrandi : 2552 $. Et le coffre de toit conçu en soufflerie : 1524 $.

Tout-terrain léger

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Porsche Cross Turismo

Grâce à l’option « off-road », le Cross Turismo permet d’affronter sans trop d’inquiétude les chemins rocailleux ou de terre. Cette option relève de 20 mm supplémentaires l’assiette du véhicule, qui alors se compare avantageusement au Taos de Volkswagen essayé dans nos pages la semaine dernière.

L’avis des propriétaires

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Porsche Cross Turismo

L’expérience du Taycan

Après 9000 km, je suis tout à fait satisfait de mon Taycan [le Cross Turismo dérive très étroitement de ce modèle]. J’accorde une note parfaite ou presque pour le ressenti et la précision de la direction, la tenue de cap, le confort (roues de 20 po), le silence de roulement, le freinage. En mode sport, la tenue de route et les accélérations sont à l’avenant.

La finition est excellente, sauf pour quelques pièces de plastique comme le pilier B. En manœuvre serrée, la direction aux roues arrière nous donne l’impression de conduire une voiture beaucoup plus courte. Le toit panoramique est très apprécié des passagers à l’arrière. La voiture dégage une impression de grande solidité.

Comme critique, quelques problèmes électroniques sans gravité. Toutefois, le système de conduite assistée (Porsche Innodrive) n’est vraiment pas au point et peut même devenir dangereux en détectant par erreur des limites de vitesse très basses sur autoroute ; la voiture ralentit alors brusquement sans avertissement. Le système de navigation n’est pas à jour autant pour les directions que pour la recherche de bornes de recharge. Une application comme ABRP est essentielle lors de voyages.

Pour ce qui est de la batterie, il faut baisser l’ampérage du chargeur Porsche par temps très chaud, sinon la recharge peut s’interrompre.

Selon mon expérience, l’autonomie varie autour de 375 km (-15 °C) à 490 km (30 °C) sur des trajets comparables en conduite assez détendue avec la batterie de 93 kW.

Veuillez noter que certains commentaires peuvent s’appliquer à des options… la voiture en a « seulement » pour 40 000 $…

Christian T.

Des bornes plus rapides

J’ai le plaisir (et le privilège, j’en conviens) de conduire un Taycan. Merveilleuse voiture. Quand je l’ai commandé il y a trois ans, j’avais établi trois critères : 4 portières, 4 roues motrices et 500 km d’autonomie… Cela correspondait aux promesses de Porsche !

L’autonomie était importante, car je voyage souvent par affaires entre Montréal et La Malbaie (412 km). Donc j’ai quand même maintenu ma commande quand ils ont confirmé une autonomie réelle plutôt aux alentours de 385 km… en mode « pas de folie ». Avec la marge de sûreté, il me manque 80 bons kilomètres.

Cette semaine, j’ai donc fait mon premier aller-retour Montréal et La Malbaie. J’ai rechargé à Saint-Nicolas à une borne BRCC de 50 kW (30 min) et au retour à Saint-Apollinaire, 50 kW (40 min)…

Trois observations. D’abord, il ne faut pas être pressé. Ensuite, les deux arrêts auraient été plus agréables si un restaurant (quand la pandémie sera finie) était adjacent aux bornes. Et enfin, j’ai hâte de trouver des bornes plus rapides.

Jacquelin B.

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