Algues, soleil, beurre, peuplier: les sources de carburant de l'avenir sont multiples et inusitées. Aux quatre coins du monde, des chercheurs planchent sur le successeur du pétrole dans les stations-services. Mon Volant vous présente au cours des prochains jours un portrait des recherches dans le domaine, dans la foulé du récent Congrès mondial de l'énergie. Aujourd'hui, l'énergie solaire.

Chaque année, des ingénieurs des quatre coins du monde se réunissent en Australie pour le World Solar Challenge, une course de 3000 km du nord au sud du pays. L'an dernier, une équipe de l'école Polytechnique y a participé avec sa voiture solaire Esteban.

Mais pour des ingénieurs allemands, l'énergie solaire ne s'arrête pas aux panneaux photovoltaïques. À la mi-août, dans une section spéciale de la revue Science sur les carburants de l'avenir, ils ont décrit comment produire des carburants à partir de centrales solaires.

«On sait déjà que la seule manière de produire proprement de l'hydrogène, si ce carburant parvient à s'imposer pour les transports, est l'énergie solaire, explique Martin Roeb, de l'Institut de thermodynamique technique de Cologne, en entrevue téléphonique. Mais il est aussi possible de combiner cet hydrogène avec du CO2 émis par les usines utilisant des hydrocarbures pour faire n'importe quel type de carburant, du diesel, de l'essence ou de l'éthanol.»

Depuis le début du millénaire, l'équipe de M. Roeb teste dans son simulateur solaire une minicentrale thermique de 10 kW jumelée à une usine de production de carburants. Plus tôt cette année, une version de 100 kW a été installée dans un complexe solaire expérimental à Almeria, en Espagne.

«Nous avons fait beaucoup de progrès pour l'efficacité du processus, dit M. Roeb. Mais il est encore cinq fois trop cher. Je crois que d'ici 10 à 20 ans, on pourrait y arriver. Il faut aussi comprendre que les progrès des panneaux solaires nous aident aussi. À mon avis, les panneaux les plus avancés permettent de produire de l'électricité à un coût concurrentiel, sans qu'on ait besoin de subventions, dans certains marchés très ensoleillés comme l'Espagne ou le sud-est des États-Unis.»

Le type de centrale solaire qui sera utilisé pour produire du carburant est un cercle concave entourant une colonne, un design appelé «concentration de la puissance solaire». Les températures au centre de la centrale varient de 200 à 1000ºC, ce qui permet une production d'électricité maximale, en matière de surface occupée par l'équipement. «Si on veut minimiser les coûts de transport d'électricité et de carburant, pour réduire l'impact sur l'environnement et la population, c'est la seule manière viable pour l'énergie solaire», dit M. Roeb.

Cette approche permettra-t-elle au Moyen-Orient de survivre à l'épuisement inévitable de ses ressources en hydrocarbures? «On peut certainement l'imaginer, dit M. Roeb. C'est encore plus prometteur pour l'Afrique. Un immense projet africain de génération d'électricité à destination de l'Europe, Desertec, pourrait d'ailleurs comprendre un volet carburants.»