Plus de 1600 kilomètres, des températures souvent glaciales, un sentier impraticable, sauf en hiver. Un seul véhicule, le même pour tous les concurrents: un traîneau, tiré par 16 chiens. Bienvenue à l'Iditarod, «la dernière grande course sur terre».

Ça fait 40 ans cette année que les mushers célèbrent ainsi le sentier de l'Iditarod, chemin de ravitaillement hivernal utilisé à la fin du XIXe siècle entre la métropole de l'Alaska, Anchorage, et Nome, face au détroit de Bering, à un jet de pierre de la Russie.

Mercredi matin, les premiers concurrents ont franchi le fil d'arrivée, au terme d'un périple de près de 10 jours que rêvent d'accomplir tous les mushers de longue distance.

C'est le cas de Marcelle Fressineau, meneuse de chiens originaire du Jura suisse qui s'est établie au Yukon il y a cinq ans après avoir passé 12 années au Québec. Elle a complété en février le Yukon Quest, l'autre grande course internationale de traîneaux à chiens, qui se déroule entre Whitehorse, au Yukon, et Fairbanks, dans le centre de l'Alaska. Mme Fressineau avait pourtant dit qu'il s'agissait de sa dernière course. Mais ses chiens en veulent encore plus et elle songe maintenant à faire l'Iditarod. «Si j'avais le budget, je le ferais dès 2013, mais ça risque d'attendre à 2014, soutient la musher de 57 ans. On veut continuer, parce que le plus important pour un musher est la relation qu'il développe avec ses bêtes. Les chiens de longue distance ont besoin de courir.»

Voilà un incroyable euphémisme. Ce que les chiens réussissent à faire est tout simplement inimaginable. C'est comme si l'on arrivait à boucler 38 marathons en 10 jours. En tirant un traîneau transportant jusqu'à 100 kilos de matériel, sans compter le poids du meneur de chiens. La dépense énergétique des chiens est huit fois supérieure à celle d'un marathonien olympique. Leur effort est intense, parfois trop. Ainsi, il a fallu attendre 2010 et 2011 pour ne voir aucun chien perdre la vie pendant l'Iditarod. C'est pourquoi certains organismes de défense des animaux s'insurgent du sort réservé aux chiens de traîneau. «Il y avait peut-être de mauvais traitements il y a 15 ans, reconnaît Mme Fressineau. Mais aujourd'hui, tous les mushers ont compris qu'il faut soigner ses chiens.»

Les bêtes sont en effet traitées aux petits oignons: on les masse quotidiennement, on soigne leurs moindres petits bobos, leur alimentation est étudiée avec soin, leur menu est personnalisé en fonction du leur âge, de leur état de santé et de leur période de croissance. Chaque équipage dispose de quelque 800 kilos de nourriture qui sont livrés avant la course dans les différents points de contrôle le long du trajet. Tout ça est à la mesure de ces athlètes d'exception. De toute façon, les mushers ont tout avantage à ne pas surtaxer leurs chiens, car ils peuvent être contraints de laisser aux points de contrôle ceux qui ne peuvent pas poursuivre l'aventure aux yeux des vétérinaires.

L'entraînement est rigoureux, autant pour les chiens que pour les mushers. «J'ai mis deux ans à préparer mon équipage, explique Marcelle Fressineau. Il faut faire beaucoup de kilomètres, un entraînement à la fois physique et psychologique. En fait, au moins 50% du travail est mental. Il faut allonger les trajets un peu plus à chaque fois, toujours en s'assurant que les chiens ont du plaisir. En gros, c'est la même chose que lorsque l'on entraîne de jeunes sportifs.»

Quant au musher, son pire ennemi est le manque de sommeil. «On roule jour et nuit, on dort en moyenne trois heures, affirme Mme Fressineau. À partir du mois d'août, je m'entraîne à dormir seulement cinq heures par nuit. Si t'as besoin de nuits de 8 ou 9 heures, tu ne tiens pas le coup.»

Dallas Seavey a remporté l'épreuve de 2012 en 9 jours 4 heures 29 minutes.

www.iditarod.com