Quand Pierre Beaudoin a besoin d'un exemple concret pour se représenter l'impact des voitures hybrides et électriques sur l'industrie des services automobiles, il pense à une voiture en particulier qui fait partie du parc automobile du CAA-Québec.

M. Beaudoin est directeur technique du CAA-Québec et la voiture en question est une Toyota Prius 2002. «Elle n'est plus sous garantie. Si elle avait un problème mécanique majeur demain matin, personne chez nous ne saurait la réparer», dit M. Beaudoin, qui est responsable de la formation continue des experts en mécanique des 10 centres de vérification technique et à l'assistance routière du Club automobile. Il fait aussi le contrôle de la qualité du service dans les 425 garages que recommande le CAA-Québec.

«Malgré toute l'expertise automobile qu'on a ici, on ne pourrait rien faire d'autre que la tirer sur la plateforme d'un camion d'assistance routière et l'amener chez le concessionnaire.»

L'industrie a des défis plus immédiats, mais au moment où GM s'apprête à lancer la Chevrolet Volt et que Toyota aura vendu un demi-million de Prius dans le monde juste cette année, M. Beaudoin dit que la Prius 2002 du CAA-Québec annonce une vague qui va déferler sur ce qu'on appelle «le marché secondaire» de l'automobile (garages, distributeurs de pièces, écoles de mécanique). «Ça va venir plus vite qu'on pense et ça va toucher d'ici peu tous les artisans qui travaillent hors des concessions automobiles et qui ne sont pas liés aux grands constructeurs.»

Samedi dernier, il était l'invité d'une association de marchands d'automobiles d'occasion et sa présentation a prévenu les auditeurs de prévoir des budgets pour la formation et l'achat d'équipement dans les prochaines années.

«Nous-mêmes, au CAA, on pourrait voir arriver une Leaf ou une Volt dans un de nos centres de vérification en 2012. Des voitures de six mois à vendre, qu'un acheteur veut nous faire inspecter, on en voit régulièrement.»

M. Beaudoin dit que personne dans son secteur n'est encore équipé pour répondre à ces besoins. «Pourtant, ça va venir très vite. Et ça va changer les besoins d'une bonne partie de nos clients.»

«Il y a déjà 25 modèles hybrides ou électriques actuellement sur le marché, partout dans le monde, et 12 autres sont annoncés d'ici un an, dit-il. La plupart ne sont pas offerts ici, mais il faut se préparer à la révolution technique qui s'en vient. Et à l'heure actuelle, personne dans le marché secondaire (hors des concessionnaires) n'a de technicien capable de faire une réparation touchant le moteur ou les batteries. Ici, au CAA-Québec, nos techniciens ont reçu des formations en sécurité pour ne pas s'électrocuter et, dans certains cas, pour de l'entretien léger. Mais pas plus. Et on est en avance sur le reste du marché secondaire.»

Le CAA-Québec réfléchit à divers programmes de formation plus poussés. Mais, pour le moment, il n'y a pas grand-chose à faire à part prévoir des budgets futurs et se tenir informé de l'évolution des technologies. «C'est un peu le néant pour l'industrie, parce qu'il n'y a pas encore de paramètres pour savoir où investir. Par exemple, on sait que ça pourrait valoir la peine, un jour, d'avoir quelques dépanneuses équipées de génératrices pour faire des recharges rapides au 240 volts, sur le bord de la route, sur des voitures électriques dont les batteries seraient à plat. Mais même si on décidait de faire un projet-pilote à ce sujet, on ne saurait pas quoi acheter parce que de nombreux constructeurs se dirigent vers des chargeurs différents. La standardisation n'est pas encore faite. Et on ne pourrait pas avoir une pieuvre avec huit chargeurs différents au bout.»