Le groupe indien Tata a lancé lundi la voiture la moins chère au monde, la Nano, un véhicule «révolutionnaire» à 2000 dollars pour les classes moyennes émergentes de l'Inde, mais aussi pour l'Occident en pleine crise économique.

«Nous sommes en passe d'offrir un nouveau moyen de transport au peuple indien et plus tard, je l'espère, à d'autres marchés ailleurs dans le monde», a déclaré Ratan Tata, président du conglomérat éponyme, lors d'une conférence de presse à Bombay, suivie du lancement officiel de cette mini-automobile à ultra bas coûts.

Promise aux Indiens au tarif record de 100 000 roupies (2000 dollars) dans sa version la plus rudimentaire, la Nano pourrait être vendue en Europe en 2010-2011 - mais à 5000 euros - compte tenu d'équipements répondant aux normes de sécurité et de pollution, avait déclaré M. Tata au salon automobile de Genève en mars.

Alors que l'industrie automobile en Europe et aux États-Unis souffre de la récession, «la situation économique actuelle rend en quelque sorte (la Nano) plus attractive», a relevé M. Tata.

Les commandes en Inde débuteront le 9 avril pour des livraisons en juillet, a précisé le patron de la filiale Tata Motors, Ravi Kant.

Tata vise les dizaines de millions de foyers indiens positionnés entre les classes urbaines bourgeoises et les milieux défavorisés et qui ne peuvent pas s'offrir une voiture classique.

«J'ai observé ces familles sur des deux-roues: le père au guidon d'un scooter, son fils assis devant lui, sa femme juchée derrière et tenant leur bébé», expliquait M. Tata l'an passé. «Je me suis alors demandé comment concevoir pour ces familles un mode de transport sûr, abordable et pour tous les climats», avait-il raconté.

Mais seulement 30 000 à 50 000 exemplaires devraient être produits cette année, contre une prévision de 250 000 unités par an, à cause d'obstacles rencontrés par Tata Motors et qui a dû repousser de plusieurs mois la mise en production.

En octobre, le premier groupe automobile indien avait dû abandonner l'usine de la Nano quasiment achevée dans l'État du Bengale occidental (est) et en construire une autre au Gujarat (ouest). Après y avoir investi 350 millions de dollars, Tata avait été poussé hors du Bengale par des paysans ulcérés par la réquisition de leurs terres pour en faire une zone industrielle.

Déjà présentée au monde entier en janvier 2008, la Nano est munie d'un minuscule moteur de 624 cm3 - celui d'une bonne moto - qui la fera plafonner à 105 km/h, sans climatisation, ni vitres électriques, ni direction assistée.

L'usine du Gujarat ne sera pas terminée avant la fin de l'année, a reconnu Tata, qui a donc assemblé ses premiers modèles dans ses autres sites.

«C'est un lancement à la va-vite, puisque la principale chaîne de production n'est même pas prête», a critiqué Mahantesh Sabarad, du courtier Centrum Broking. Et «nous sommes vraiment préoccupés par la demande des consommateurs», a-t-il expliqué à l'AFP en pointant «la contraction des salaires ces derniers mois et les grosses craintes pour l'emploi».

De fait, la dixième puissance économique de la planète est violemment frappée par la crise mondiale et au bord de la déflation, c'est-à-dire d'une baisse prolongée des prix risquant de plomber l'ensemble de l'activité.

Déjà, les ventes de voitures en Inde ont chuté de 20% fin 2008, après des années de croissance à deux chiffres.

Toutefois avec la Nano, «j'en aurai pour mon argent», s'est félicité Hasmukh Kakadia, un cadre financier qui veut se débarrasser de sa Ford Fiesta achetée à 13 000 dollars. «Dans une économie en berne, je réfléchirais à deux fois avant de mettre de l'argent dans une nouvelle voiture. Mais pas pour celle-là», a-t-il dit.