Il y a une dizaine de jours au salon de l'automobile de Detroit, Bob Lutz a reconnu que la filiale suédoise du groupe se trouvait «depuis un bon moment déjà sous respirateur artificiel». Ce n'est un secret pour personne: GM cherche à céder les commandes de Saab à un nouveau conducteur.

Certes, des repreneurs chinois, notamment, ont été évoqués, mais on voit mal dans le contexte actuel qui financerait une telle acquisition. Même le gouvernement suédois n'est pas intéressé par l'affaire. Le sort en est jeté? Chose certaine, si on voulait faire disparaître cette marque, on ne s'y prendrait pas autrement.

 

Dans ces circonstances, est-il besoin d'écrire que GM n'envisage plus aucun modèle mis au point en solo par les ingénieurs suédois. Ces derniers sont plutôt invités à revoir les copies - parfois anciennes - de leurs homologues de chez Opel, une autre filiale du géant américain. Du coup, le caractère insolite de la marque au griffon est en voie de s'éteindre complètement. GM a certes promis de continuer à construire des Saab à Trollhättan jusqu'en 2010. Après?

Fatale conjoncture économique

Sans la conjoncture économique, la marque scandinave pourrait voir des jours meilleurs. D'une part, toutes les études de style (9-4x, 9-X Air, etc.) réalisées ces dernières années par le constructeur suédois ont été bien accueillies par le public et la presse. D'autre part, Saab est parvenue, à mettre un terme au comportement anémique de sa 9-3 sur une chaussée à faible coefficient d'adhérence en lui greffant un rouage intégral. Baptisé XWD, ce dispositif basé sur le système mis au point par la firme Haldex et qui équipe bon nombre de voitures concurrentes, se compose d'un embrayage multidisque Haldex de quatrième génération répartissant le couple entre les roues avant et arrière et, c'est la nouveauté, d'un second embrayage faisant office de différentiel à glissement limité entre les roues arrière désigné sous le label eLSD. Ce dernier, hélas, n'est agrafé qu'aux livrées Aero, les plus coûteuses. Dommage puisque ce système de répartition électronique entre les roues arrière améliore non seulement l'agilité du véhicule, mais aussi sa motricité dans les virages.

Sur route sèche et en conduite ordinaire, 90% du couple est appliqué aux roues avant et la voiture se conduit donc comme une simple traction. Mais le système est toujours en veille. Son ordinateur, capable d'interpréter plus de 100 fois par seconde les données transmises par 20 capteurs (roues, moteur, volant, freins, ABS, etc.), veille à répartir le couple de manière idéale entre les trains roulants. Ainsi, à la moindre amorce de patinage du train avant, il reporte instantanément le couple vers les roues arrière. La voiture préserve alors sa motricité et son équilibre, tant en accélération qu'en courbe, ce qui améliore la tenue de route et la sécurité active. À ce sujet, il est bon de préciser que les modèles équipés de XWD bénéficient également d'une meilleure répartition des masses que les versions «tractées», ce qui ne peut pas nuire.

Au quotidien, ce dispositif (offert moyennant un supplément de 2975$ dans les versions Aero) redonne des couleurs à cette berline suédoise. Finies les errances du train avant, désormais il est possible de bénéficier, en tout temps, des performances du moteur V62,8 litres suralimenté par turbocompresseur. Ce moteur, construit à partir d'un bloc V6 Opel largement modifié, fait appel à un turbo qui fournit un couple copieux de 295 livres/pied à 2000 tours/minute... À l'usage, le déploiement onctueux et charpenté du V6 le rapproche d'un petit V8. Quelle sensation de réserve de puissance et de sécurité active! Mentionnons que le quatre-cylindres 2 litres (également offert avec le rouage intégral) moins véloce s'avère un choix plus judicieux encore (plus économique à l'achat comme à la pompe), mais hélas, en le privilégiant, vous vous priverez de la carte maîtresse de ce rouage intégral, à savoir le différentiel électronique eLSD.

Deux boîtes se chargent de relayer puissance et couple aux roues motrices. La boîte semi-automatique à six rapports est, à notre humble avis, celle avec laquelle il faut prendre rendez-vous. Sa gestion électronique permet de mieux exploiter la courbe de puissance du moteur que la manuelle, dont l'imprécision du levier n'a d'égal que la longueur encore exagérée de la course. Revers de la médaille: la semi-automatique est plus gourmande (environ 1 L/100 km) et du coup réduit l'autonomie de cette voiture dont le réservoir ne contient que 62 litres de super...

L'addition d'un rouage intégral ne corrige pas tout. Face à des rivales plus jeunes et parfois plus aguerries, la 9-3 se laisse guider par une direction un peu trop assistée et repose sur un châssis qui gagnerait à être rigidifié.

Habitabilité

Rapprocher cette Saab de la production de BMW, Mercedes voire Audi ne vient pas immédiatement à l'esprit. La 9-3 ne joue a priori pas dans la même catégorie que la Série 3, la Classe C ou l'A4. Il est vrai que son empattement de 2675 mm et certaines de ses dimensions extérieures (la largeur surtout) fait paraître la suédoise plus frêle que ses concurrentes germaniques. Pourtant, un examen plus détaillé révèle que la Saab a, en matière de volume intérieur, ce qu'il faut pour se rapprocher des grandes routières allemandes. Par rapport à ces dernières toujours, la 9-3 se révèle généreuse sur le plan de l'habitabilité et n'a rien vraiment à leur envier. Ce qui n'est pas le cas sur le plan de la qualité perçue. Les plastiques employés manquent d'élégance et on se désole de croiser du regard, certaines vis (au pied de la console par exemple) qui chez la concurrence sont habilement masquées.

Même si les baquets ont perdu un peu de leur moelleux d'antan, ils figurent toujours parmi les mieux dessinés de l'industrie. Appuie-tête compris! Folklorique peut être, reste que de retrouver la clef de contact entre les sièges avant ou encore le panneau «Night Panel» qui, une fois la nuit venue, permet d'illuminer strictement les fonctions dites essentielles, font toujours plaisir à découvrir. Pour retrouver sa saveur originelle, on se met à rêver au retour des commandes des glaces sur la console, de l'obligation d'embrayer la marche arrière (boîte manuelle) pour retirer la clé du contact ou de retrouver cette ambiance «cockpit», qualificatif longtemps utilisé pour décrire la sensation ressentie à bord des créations de ce constructeur suédois qui, au temps de son indépendance, s'était toujours engagé à ne rien faire comme les autres. On peut encore rêver.

 

On aime

L'efficacité de son rouage intégral

Le souffle de sa mécanique

Les possibilités de bénéficier de rabais intéressants

On aime moins

L'incertitude de GM envers la marque

La faible valeur de revente

La qualité de la finition pas assez poussée

Ce qu'il faut retenir

Fourchette de prix : 38 730 $ à 48 970 $

Frais de transport : 1 795 $

Consommation moyenne obtenue au cours de l'essai : 12,2 L/100 km

Concurrentes : Audi A4, BMW Série 3, Mercedes C

Pour en savoir plus : www.saab.ca

Moteur : V6 DACT 2,8 litres suralimenté (Turbo)

Puissance : 280 ch à 5 500 tr/mn

Couple : 295 lb-pi à 2 000 tr/mn

Poids : 1735 kg

Rapport poids/puissance : 6,1 kg/ch

Accélération 0-100 km/h : 6,67 secondes *

Mode : intégral (mode temporaire)

Transmission de série : manuelle 6 rapports

Transmission optionnelle : semi-automatique 6 rapports

Direction / Diamètre de braquage : crémaillère / 11,9 mètres

Freins avant / arrière : disque / disque ( ABS de série)

Pneus : 235/45R18

Capacité du réservoir de carburant/

Carburant recommandé : 62 litres / super

*Véhicule chaussé de pneus d'hiver - chaussée partiellement enneigée