Rares sont les marques américaines qui ont exploité le sport automobile comme outil de marketing, cette pratique étant bien plus courante chez les marques d'outre-Atlantique. Mais l'exception existe et c'est précisément le sujet de notre chronique.

Rares sont les marques américaines qui ont exploité le sport automobile comme outil de marketing, cette pratique étant bien plus courante chez les marques d'outre-Atlantique. Mais l'exception existe et c'est précisément le sujet de notre chronique.

Si vous avez plus de 50 ans, vous vous souvenez peut-être de la marque Hudson. Née en 1909, la Hudson Motor Car Company a survécu jusqu'en 1957, se classant troisième en 1929 (derrière Ford et Chevrolet) avec plus 300 000 voitures vendues. Après la Deuxième Guerre mondiale, Hudson a éprouvé des difficultés et a fusionné en 1954 avec Nash Motors, qui est alors devenue American Motors. Les derniers modèles portant la marque Hudson sont sortis de l'usine en 1957 et ce, malgré les succès retentissants de la remarquable Hudson Hornet (la guêpe) et de son célèbre Super Six en courses de stock-cars (NASCAR).

Précisons qu'à l'époque, les voitures qui couraient dans cette série étaient véritablement des stock-cars, des voitures de série pratiquement identiques aux modèles exposés chez les concessionnaires, et non les bolides construits strictement pour la course et qui courent aujourd'hui sous le déguisement de modèles de série...

Championne de NASCAR

Mais comment une voiture animée par un vieux six cylindres parvenait-elle à battre des Cadillac et des Oldsmobile propulsées par les nouveaux V8 à haute compression, signant au passage plus de 80 victoires en NASCAR entre 1951 et 1955? La réponse: une structure monocoque et un moteur robuste habilement modifié pour la course.

À une époque où ses rivales étaient montées sur l'antique châssis-poutre, la Hudson Hornet bénéficiait d'une structure monocoque (la célèbre «mono-built») qui n'est devenue monnaie courante que bien plus tard. Les avantages d'une telle architecture: rigidité, légèreté, centre de gravité abaissé, ce qui se traduisait par une tenue de route remarquable. Quant au vénérable six cylindres en ligne de 5 litres, les ingénieurs ont réussi à lui greffer un système d'admission à deux carburateurs (Twin H-Power), des échappements doubles, un arbre à cames plus agressif, une culasse polie à compression plus élevée et à plus grosses soupapes. La puissance: 220 chevaux en version compétition (désignée 7-X), soit 75 de plus que la version strictement de série, tout en conservant un excellent couple à bas régime. Ajoutons à ce cocktail une carrosserie aux formes arrondies et particulièrement profilées, et nous sommes en présence d'une machine capable d'atteindre 180 km/h en vitesse de pointe, laissant ses rivales se morfondre loin derrière.

Plusieurs pilotes se sont distingués au volant des Hudson Hornet, notamment Marshall Teague et Herb Thomas, dont nous avons pu admirer la Hornet no 92 dans le cadre d'une exposition de voitures anciennes l'an dernier, en Ontario.

Pourquoi disparue?

Sachant la supériorité technique de ces voitures, on peut se demander pourquoi elles ont disparu quelques années plus tard. Certes, American Motors n'avait pas les reins aussi solides que ses trois grands concurrents, mais il est intéressant de noter que c'est précisément la supériorité technique des Hudson au chapitre de la structure monocoque qui a été l'une des raisons de son déclin.

En effet, dans les années 50 et pendant plusieurs décennies, l'industrie automobile américaine carburait aux «changements» annuels de modèles, ces changements presque strictement esthétiques faisant croire au public que la technologie avançait aussi. Or, pour pouvoir modifier rapidement et à coût abordable la forme d'une voiture, il est nettement préférable de disposer d'un châssis distinct sur lequel on boulonne la carrosserie par la suite. Et puisque la carrosserie constitue la partie visible, on prétend que le modèle est «nouveau», alors qu'il est monté sur un châssis qui n'évolue presque pas d'une année à l'autre. Et cela pendant des décennies.

Ce qui, cher lecteur, explique en partie le retard technologique que l'automobile américaine n'a jamais vraiment réussi à combler. Le public automobiliste étant sorti de sa torpeur sous l'effet de la concurrence étrangère, Ford et GM en payent aujourd'hui le prix, tandis que Chrysler, en devenant presque allemande, l'a échappé belle...

Face au feu roulant des «changements» annuels, la pauvre Hudson Hornet à structure monocoque était donc forcée de conserver plus ou moins la même forme pendant plusieurs années à cause du coût très élevé de modification d'une structure monocoque. À présent que la monocoque est devenue la norme (sauf pour les camions), vous comprenez sans doute pourquoi la «mode» des changements annuels a disparu... avec le châssis-poutre.

Hélas, Hudson et quelques autres audacieux ont dû en faire les frais.

Encadré(s) :

DANS LE RÉTROVISEUR DE LA HUDSON HORNET 1952, VERSION COMPÉTITION

Empattement / longueur / largeur / hauteur (cm): 315 / 518 / 197 / 153

Poids : 1610 kg

Moteur : 6 cyl. en ligne, 5 L (308 po 3 ), 220 ch. (version course 7-X); 145 ch. à 3800 tr/min et 257 lb-pi à 1800 tr/min (version de série)

Transmission : manuelle, 3 vitesses, pont arrière Dana 44 (4,27 à 1)

Freins : tambours

Pneus : 7.10 x 15

Vitesse maximum: 180 km/h

Prix (1952) : entre 2500 et 3300$ (version route)

Valeur (2006) : environ 120 000$

LA MÊME ANNÉE (1952):

> Élisabeth II succède au roi Georges VI sur le trône d'Angleterre.

> Les Jeux olympiques d'Helsinki (Finlande) accueillent le retour de l'Union soviétique après une absence de 40 ans. Le héros des Jeux : le Tchèque Emil Zatopek, qui remporte le 10 000 mètres, le 5000 mètres et le marathon, et qui établit un nouveau record olympique à chacune de ces trois courses.

> Les États-Unis construisent leur première bombe à hydrogène.

> Au Québec, c'est la réélection de Maurice Duplessis et le début de la télévision de Radio-Canada.

> Ernest Hemingway publie Le Vieil Homme et la mer.