Ce mercredi soir, des bateaux vogueront au-dessus du parterre du MTELUS au Premier Gala de l’ADISQ, que Télé-Québec présentera en réalité augmentée. Une tentative de revigorer ce type de cérémonie au terme d’une année difficile pour plusieurs d’entre elles.

Le Premier Gala de l’ADISQ n’est pas l’unique rendez-vous du genre à employer cette technologie, qui permet d’intégrer du visuel en trois dimensions aux prises de vues réelles. En 2020, pour pallier l’absence de numéros à grand déploiement en raison d’une certaine pandémie, le gala des prix Gémeaux avait tenté l’expérience. Les téléspectateurs avaient entre autres vu d’immenses trophées apparaître sur scène aux côtés des finalistes.

Cette fois, on promet d’être plus ambitieux. La réalité augmentée sera utilisée durant l’ouverture de l’animateur Pierre Lapointe (des statuettes géantes apparaîtront en hologramme), mais surtout, durant six prestations musicales. Les téléspectateurs verront notamment des érables pousser au plafond du MTELUS.

Plus tard, des nuages entreront dans l’enceinte montréalaise, avant d’être transformés en navires. La réalité augmentée s’étendra jusqu’aux éclairages.

« On va beaucoup plus loin que tout ce qui s’est fait en réalité augmentée en télé non seulement au Québec, mais au Canada, déclare le réalisateur et metteur en scène Luc Sirois [En direct de l’univers, Chanteurs masqués]. Les gens vont pogner de quoi. »

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Un aperçu des effets de réalité augmentée qu’on pourra voir au Premier Gala de l’ADISQ

Les artistes ont accueilli l’initiative avec beaucoup d’enthousiasme, affirme Luc Sirois. En lice pour trois Félix, dont celui de l’album rap de l’année, Souldia aurait « capoté » en voyant les maquettes.

Quelques minutes avant l’entrée en ondes du Premier Gala, Luc Sirois montera d’ailleurs sur scène pour expliquer aux spectateurs présents au MTELUS qu’ils verront un spectacle différent de celui qui sera offert au public à la maison.

Une piste de solution ?

Alors qu’une partie du secteur culturel se demande toujours pourquoi Radio-Canada a décidé d’arrêter de diffuser le Gala Québec Cinéma, et qu’une autre pleure encore la Soirée Artis, que TVA a torpillée au printemps, la réalité augmentée pourrait « brasser les cartes » dans l’orchestration d’une cérémonie de remise de prix, un genre télévisuel en difficulté depuis quelques années, en raison de cotes d’écoute généralement décroissantes.

« C’est peut-être en amenant de nouvelles façons de faire qu’on va réussir à capter l’attention des téléspectateurs, déclare Luc Sirois. Ça peut aider. Et pour tout ce qui peut aider à maintenir les galas en vie, je suis partant. »

Après deux éditions pandémiques préenregistrées du Premier Gala, l’occasion était parfaite pour adopter la réalité augmentée, indique Julie Gariépy, productrice exécutive des Galas de l’ADISQ.

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Julie Gariépy, productrice exécutive des Galas de l’ADISQ

On avait envie d’essayer autre chose, quelque chose de nouveau. On prend le risque.

Julie Gariépy, productrice exécutive des Galas de l’ADISQ

De son côté, le gala de dimanche ne sera pas diffusé en réalité augmentée. On promet toutefois « une touche spéciale » pour piquer la curiosité du public : un Louis-José Houde « toujours aussi en forme », une formule « un petit peu plus dynamique » et davantage de performances. « On a remanié les choses parce qu’on ne peut plus rien tenir pour acquis en télé », souligne Julie Gariépy.

« Je crois encore aux galas, ajoute Luc Sirois. Je pense qu’ils sont nécessaires pour certaines industries. Oui, je prêche pour ma paroisse, parce que je fais des galas, mais la musique, c’est important. J’ai connu plein de bands et de chanteurs en faisant la mise en scène du Premier Gala. Ça risque d’être la même chose pour plusieurs téléspectateurs. Les galas peuvent servir à révéler des artistes au grand public. »

Une commandite

Le Premier Gala de l’ADISQ profitera d’un coup de pouce technologique en raison d’une commandite de Rec4Box, une entreprise qui possède l’équipement pour inclure des éléments de réalité augmentée, au sein de laquelle Luc Sirois occupe un poste de direction.

« Au fond, je paye pour en faire durant le gala, mais je vais pouvoir m’en servir comme démo, pour dire aux producteurs d’émissions de variétés : “Regardez, c’est accessible au Québec ! Voici la qualité, voici jusqu’où on peut aller.” Parce que souvent, on regarde les États-Unis en se disant : “Wow ! Les Américains sont capables. Ils sont en avance.” Mais nous aussi, on l’est ! Il faut juste avoir les couilles pour foncer. »

Julie Gariépy, de l’ADISQ, parle d’un test. « On est tous en mode essai, parce que c’est extrêmement dispendieux. C’est un défi budgétaire d’imaginer comment on pourrait utiliser la réalité augmentée en temps normal. Mais tout ce qu’on a vu jusqu’à présent est convaincant. »

Durant sa visite des répétitions au MTELUS, La Presse a constaté à quel point les coulisses somme toute étroites n’offrent pas (ou très peu) d’espace pour entreposer des éléments de décor qui pourraient servir sur scène. Dans ce contexte, l’apport des effets de réalité augmentée est indéniable.

« Je crois que plusieurs producteurs vont réaliser qu’ils n’ont plus nécessairement à dépenser 100 000 $ pour construire un décor et qu’ils peuvent mettre 50 000 $ en décors et 50 000 $ en réalité augmentée, indique Luc Sirois. Des fois, le jumelage des deux est un beau mariage. »

Télé-Québec diffusera le Premier Gala de l’ADISQ en direct ce mercredi, à 20 h.