Serait-ce parce que les générations précédentes ont transgressé toutes les lois et les règles que la jeunesse d'aujourd'hui s'intéresse de plus en plus à la morale? On remarque ainsi un regain de popularité du conte sur la scène montréalaise depuis quelques années. Dans la foulée des Fabien Cloutier, Yvan Bienvenue et autres Patrice Michaud, le comédien Jean-Philippe Baril Guérard explore à son tour cette forme d'écriture. Il partage son temps entre l'écriture, la mise en scène, le jeu et la codirection du Théâtre En Petites Coupures, dont la mission est d'offrir du théâtre de création aux jeunes adultes.

Son dernier recueil de quatre contes animaliers «trash», intitulé Ménageries, est défendu par les acteurs Jean-Sébastien Lavoie, Andrée-Anne Lacasse, David Strasbourg et Isabeau Blanche, dans le cadre du Zoofest à Montréal. L'auteur de la pièce Baiseries, en 2010, renoue ici avec un thème qui lui semble cher: la sexualité. Et pas n'importe laquelle! Une sexualité hard, bestiale et parfois vulgaire, à l'instar de la langue orale et crue de ses contes: on est loin de Flaubert ou de Maupassant!

Survivre dans la jungle

Dans Ménageries, chaque personnage essaie de justifier sa conduite égoïste par une conception personnelle et très intéressée du bien et du mal. L'arrivisme d'un joueur de hockey junior de Victoriaville; la dérive d'une femme solitaire; la vengeance d'une princesse de région; ou la cruauté d'un bear séropositif du Village, tout ça représente autant de moyens utilisés par les protagonistes pour justifier une seule et même finalité: survivre dans la jungle de nos villes et de nos relations. L'auteur associe chacune de ses courtes histoires [le spectacle dure 60 minutes] à un animal différent (licorne, porc, grizzly et cougar) qui hante le récit.

Dans les quatre histoires toutes aussi cruelles et immorales les unes que les autres, Baril Guérard pousse à l'extrême les limites des situations... Pour finalement exposer une morale assez simple: l'homme est un loup pour l'homme.

«On est toujours en train de se diviser entre notre animalité et notre civilité. Chacun de mes contes dévoile en quelque sorte un animal caché à l'intérieur de l'homme», a confié l'auteur en entrevue au Devoir. Au bout du compte (et du conte), une fois qu'on gratte sa couche dure et «trash», Ménageries est assez sympathique, voire tendre... Allez savoir? L'auteur a peut-être une colombe tapie au fond de son âme. On aimerait la voir s'envoler dans un de ses contes.

Ménageries, jusqu'au 24 juillet, à la Balustrade du Monument-National.