Ce soir au Gesù, Dorothy Rhau fera la première partie du spectacle de Boucar Diouf. Elle en est à ses premières armes en humour, mais elle possède beaucoup de munitions : une différence qu'elle affiche fièrement, une confiance en elle qui irradie, un rire communicatif et, bien entendu, le popotin inégalable de la femme noire... De quoi piquer notre curiosité.

Ce soir au Gesù, Dorothy Rhau fera la première partie du spectacle de Boucar Diouf. Elle en est à ses premières armes en humour, mais elle possède beaucoup de munitions: une différence qu'elle affiche fièrement, une confiance en elle qui irradie, un rire communicatif et, bien entendu, le popotin inégalable de la femme noire... De quoi piquer notre curiosité.

«Je rêve de gagner l'Olivier de la révélation de l'année, confie spontanément la jeune femme tirée à quatre épingles. Je me pratique déjà à ne pas pleurer... Et je vais évidemment remercier Dieu!»

Dorothy Rhau éclate de rire. Un rire contagieux, chaleureux. Pourtant, sa grand-mère lui a dit un jour qu'elle ne trouverait jamais de mari parce qu'elle riait trop et qu'elle faisait trop de grimaces. C'est que, paraît-il, on demande à la femme haïtienne d'être plus réservée. «J'ai peur que la malédiction de ma grand-mère soit en train de se réaliser» lance-t-elle, en riant encore plus, lorsqu'elle parle de sa vie de mère seule, responsable d'un garçon de 4 ans. C'est lui son premier public, d'ailleurs, et il raffole de ses grimaces.

Née au Québec de parents haïtiens, Dorothy Rhau a grandi dans le quartier Saint-Michel. Encouragée par ses amis qui lui ont toujours trouvé un talent comique, elle se lance à 36 ans dans le monde de l'humour. Elle a déjà voulu être une «femme d'affaires», notamment parce qu'elle «voulait entendre ses talons hauts claquer dans son bureau», a étudié en administration à McGill, travaillé entre autres pour Bell, et après quelques stages dans les communications (à Radio-Énergie, à l'émission Sucré salé), elle travaille à temps plein aux ressources humaines d'une compagnie pharmaceutique.

Mais elle suit les cours du soir à l'École nationale de l'humour. Une recommandation de François Avard qui l'a convaincue. Et si elle fait aujourd'hui la première partie de Boucar Diouf, c'est en raison d'une sympathique méprise. Un soir qu'elle devait présenter un spectacle à Joliette, elle s'est trompée de salle et s'est retrouvée dans les loges du spectacle de Boucar, qui a dû lui dire qu'il n'avait jamais demandé une première partie à son show. «Il a tellement dû rire de moi!» Mais le contact était fait, et l'idée est née.

Dorothy Rhau propose un humour fortement ancré dans sa double culture, haïtienne et québécoise. Elle ose aborder le sujet du séisme du 12 janvier, en riant du traitement médiatique qui a suivi le drame, qu'elle a vécu, comme tout le monde au Québec, par la télévision. «J'ai trouvé qu'il y avait beaucoup de voyeurisme, avec tous ces gens qui courent avec des micros vers la catastrophe.». Mais elle veut rire aussi des figures haïtiennes connues, comme Luck Mervil, «devenu le spécialiste de tout ce qui concerne Haïti!».

Son autre sujet de prédilection: les relations homme-femme. Et les relations entre Blancs et Noirs. Il faut l'entendre enfiler les blagues sur sa première date avec un Blanc. «Il m'embrassait dans la rue, ce que je trouvais vraiment étrange, car ça ne se fait pas en public chez les Haïtiens. Et une fois au lit, la lumière éteinte, je lui ai dit: Man, t'es tellement blanc! On a beaucoup ri.» Quant aux hommes noirs, «je compte bien les stooler et révéler tous leurs défauts», lance-t-elle, hilare. «Je vais expliquer aux hommes blancs comment séduire une femme noire. Parce que tout le monde veut faire l'amour avec une négresse, quitte à se fatiguer!» dit-elle, en détournant le titre du premier roman de Dany Laferrière. «Je vais partir un nouveau fantasme.»

Le ton est donné, mais sans vulgarité, c'est une chose qu'elle ne supporte pas. «Disons que mon public est plus près de celui de Boucar Diouf que de celui de Mike Ward», résume-t-elle. Elle se dit d'ailleurs très coquette et passionnée de mode: elle ne porte jamais les mêmes vêtements pour ses spectacles. Elle fait l'éloge des rondeurs, particulièrement des fesses, arme de séduction massive de la femme noire. Son modèle féminin: Michaëlle Jean. Ses influences en humour sont diverses: au Québec, elle aime beaucoup Marc Labrèche, et elle était fan de RBO - «comme tout le monde quand j'étais adolescente». Du côté américain, elle a une grande admiration pour Bill Cosby et Chris Rock.

Une chose est sûre, c'est que Dorothy Rhau ne veut pas être confinée seulement au public montréalais multiculturel, car aller en région est une priorité pour elle. Tout simplement parce que ses particularités lui donnent une grande liberté. «En ce qui me concerne, j'ai carte blanche.» C'est à suivre.

Dorothy Rhau, en première partie du spectacle de Boucar Diouf, ce soir, 20h, au Gesù.