«C'est une grande dame.» C'est en ces termes que la harpiste Valérie Milot nous présente la prestigieuse Apollonia, sa nouvelle complice de scène, obtenue grâce à un généreux mécénat.

Nul besoin d'entendre ses 47 cordes vibrer pour comprendre qu'il s'agit d'un instrument d'exception, tant son éclat vous éblouit. Bois superbement travaillé, dorures de 23 carats, fioritures d'une grande finesse; on croirait Apollonia tout droit chue d'un Olympe musical. Pourtant, elle provient d'un lieu bien plus proche et familier.

«En 2017, je me suis rendue à Chicago où se trouve la plus grande salle d'exposition de harpes. Je cherchais un instrument plus puissant que ceux que je possédais jusqu'à maintenant», raconte la soliste, qui compte presque autant de projets et collaborations qu'elle a de cordes à sa harpe; que ce soit avec l'Orchestre Métropolitain de Montréal, Les Violons du Roy ou encore Orbis, une production novatrice de son cru.

Quand la harpiste a passé en revue les diverses candidates, la proverbiale «chimie» n'a pas tardé à opérer.

«Quand un instrument nous convient, on le sait et on se l'approprie rapidement, dès les premières notes, explique Valérie Milot. Sur cette harpe, j'ai senti une différence immense, mais pas seulement au niveau de la puissance: elle avait une chaleur incroyable.» Des sonorités dont seul un instrument de haute voltige recèle le secret. Conçue par le luthier italien Salvi, Apollonia, oiseau rare appartenant à une fratrie de 13 soeurs seulement, a nécessité, sans surprise, un an de travail et l'intervention de 15 artisans.

D'accord avec ses cordes

Un instrument de rêve, mais dont la valeur marchande nous ramène vite à la réalité: quelque 120 000 $. C'est ici que le mécénat vient apporter sa note à la partition. Roger Dubois, à la tête de l'entreprise Canimex, s'est porté acquéreur de la harpe pour la confier à la jeune artiste, qui se trouve désormais on ne peut mieux armée pour ses premiers pas de soliste au sein de l'Orchestre symphonique de Montréal, prévus ce printemps.

«Elle arrive à un bon moment dans ma carrière. Si je l'avais eue plus tôt, je n'aurais pas aussi bien compris sa valeur.»

La talentueuse musicienne dit d'ailleurs noter un regain d'intérêt au Québec pour son instrument de prédilection.

Une fois notre entrevue avec la harpiste terminée, c'est au tour d'Apollonia de prendre le relais et de donner de la voix. Dans la solennelle Chapelle historique du Bon-Pasteur, trônant sous un faisceau de lumière, elle ne tarde pas à faire résonner ses profondes basses, égrener ses aigus cristallins et gazouiller de puissantes et précises mélodies.

Un secret trop mélodieux pour être bien gardé: une série de concerts mettront Apollonia en vedette au cours des prochains mois. L'occasion d'admirer non seulement une «grande dame», mais bien deux; car sans le doigté de l'une, l'autre serait condamnée au silence.

Où écouter Apollonia?

La musicienne a officiellement présenté sa nouvelle harpe hier soir, dans le cadre d'un récital sur invitation à la Chapelle historique du Bon-Pasteur. Mais les occasions pour le public d'en apprécier les vibrations ne manqueront pas. Voici quelques dates de concerts bientôt prévus:

- Le 15 février: au Conservatoire de musique de Montréal

- Le 8 mars: à la salle Bourgie à Montréal

- Le 1er avril: au Collège LaSalle-Montréal

- Le 18 avril: à la Maison symphonique de Montréal avec l'OSM

Photo David Boily, La Presse

Une mécanique de haute précision maintient les 47 cordes de cette harpe de concert.