Constantinople aime voyager. Non seulement dans l'espace, mais aussi dans le temps, avec une musique qui mêle les influences anciennes et actuelles à différentes traditions musicales. Leur quatorzième album, Metamorfosi - Impressions baroques, réalisé sous étiquette Analekta en collaboration avec la soprano invitée Suzie Leblanc, plonge dans un répertoire italien méconnu des débuts de la période baroque.

La Presse a rencontré Suzie Leblanc et Kiya Tabassian, cofondateur de Constantinople, compositeur et joueur de sétar persan, au bar L'Escalier.

«Nos disques ont toujours une thématique, dit Kiya Tabassian. L'avant-dernier retraçait les voyages de Marco Polo en partant de la musique italienne jusqu'à la musique de l'Asie centrale. Celui d'avant était axé sur la musique mexicaine et la poésie de soeur Inés de la Cruz.»

L'inspiratrice de ce nouvel album est l'Italienne Barbara Strozzi, une rare femme compositrice de l'époque baroque à avoir laissé à la postérité une oeuvre abondante.

«Barbara Strozzi a grandi dans un milieu privilégié très littéraire avec un père poète qui l'a encouragée dans sa carrière de musicienne, dit Suzie Leblanc. Elle était très innovatrice et elle a publié, de son vivant, plusieurs recueils de sa musique qui nous sont restés. On n'a pas fini d'enregistrer toutes ses oeuvres.»

On trouve donc, sur cet album, quelques oeuvres de Strozzi, mais aussi de Claudio Monteverdi, ainsi que de compositeurs italiens moins connus comme Stefano Landi, Giovanni Girolamo Kapsberger, Tarquinio Merula et Salomone Rossi. Le tout à la manière de Constantinople, c'est-à-dire dans de nouveaux arrangements où le sétar persan et les percussions iraniennes occupent une place de choix.

«Pour certaines pièces, cela va au-delà de l'arrangement, car nous avons ajouté des parties et des mélodies, dit Kiya Tabassian. Pour d'autres, nous sommes restés plus proches de ce que les compositeurs demandaient.»

«De toute façon, pour plusieurs de ces pièces, les partitions ressemblent à des partitions de jazz, avec seulement une mélodie et une ligne de basse, et pour le reste, il y a beaucoup d'improvisation. Il y a aussi de la musique de rue et de la musique folklorique de l'époque. Ça ne ressemble pas du tout au baroque de Jean-Sébastien Bach», ajoute Suzie Leblanc.

D'ailleurs, en concert, il y a toujours des variations significatives dans l'interprétation des pièces, au gré de l'improvisation musicale.

Le projet Metamorfosi a justement vu le jour sous forme d'un concert à la Salle Bourgie, en mars dernier.Constantinople donne énormément de concerts chaque année, au Canada et à l'étranger. Fondé en 2001, l'ensemble est constitué de trois membres : Kiya Tabassian, son frère Ziya, percussionniste, et Pierre-Yves Martel, gambiste. Au gré des projets, ils invitent des musiciens d'ici et d'ailleurs à se joindre à eux.

D'origine iranienne, les Tabassian ont déménagé à Montréal à l'adolescence. Attachés aux instruments traditionnels de leur pays d'origine, auxquels ils avaient commencé à s'initier en Iran, ils ont continué de les perfectionner ici en autodidactes. Mais les deux frères ont également reçu une formation musicale classique au Conservatoire et à l'Université de Montréal. Kiya Tabassian a notamment étudié la composition avec Gilles Tremblay, et l'OSM jouera de ses oeuvres en mars prochain pour le concert thématique Orient imaginaire.

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Le prochain concert montréalais de Constantinople, Élans Flamenco, aura lieu le 30 octobre à la Salle Bourgie.

MUSIQUE DU MONDE. Metamorfosi - Impressions baroques. Constantinople. Analekta.