Avec un chef-d'oeuvre tel que La bohème, pas besoin de grands artifices. Tout ce que l'on demande, ce sont des chanteurs qui soient à la hauteur de la musique de Puccini. Nous avons ri et pleuré à la première, samedi soir, et sommes sortis du spectacle avec les yeux rouges et le sourire.

À peu de choses près, l'Opéra de Montréal a repris la production de 2011 : mêmes décors, costumes traditionnels. Toutefois, la distribution est supérieure et dans l'ensemble, plus égale vocalement que celle de 2011.

Le décor est le même que la dernière fois, avec une grande verrière à carreaux en arrière-plan qui change de couleur avec les scènes, grâce à de superbes éclairages passant du bleu à l'orangé. Bien que cela ne corresponde pas à ce que l'on imagine d'une mansarde d'artiste pauvre à Paris en 1830, il faut bien admettre que ce fond est très beau. Sa présence apporte une unité esthétique d'un acte à l'autre. Les costumes d'époque sont corrects ; on aime particulièrement la robe et le chapeau écarlates de Musetta.

On est frappé par la direction d'acteurs particulièrement soignée d'Alain Gauthier.

Avec son sens du détail, il a pensé à une foule de petits gestes ou déplacements qui ajoutent du comique ou du réalisme à chaque scène.

DES VOIX D'OR

La distribution, entièrement canadienne, est fort satisfaisante. Il est difficile de rester insensible à la Mimi si émouvante de France Bellemare, qui semble née pour chanter ce rôle. Elle forme un couple théâtral de rêve avec Luc Robert, en Rodolfo, une véritable révélation. Le miraculeux ténor abitibien, ancien pompier qui a découvert sa vocation de chanteur d'opéra sur le tard, a un timbre tout simplement sublime. On rêve déjà de le réentendre.

Le baryton canadien Justin Welsh, qui lui donne la réplique en Marcello, a une voix profonde et agréable. La soprano Lucia Cesaroni, en Musetta, est toutefois décevante dans le fameux air Quando me'n vo', qui sonne métallique et manque de corps dans les aigus. Elle s'avère plus convaincante au dernier acte. Dans les personnages secondaires, tous les chanteurs, dont Christopher Dunham (Schaunard) et Alexandre Sylvestre (Colline), font du beau travail, tout comme le chef James Meena et l'Orchestre Métropolitain.

RÉUSSITE SANS PRÉTENTION

Inutile de disserter davantage : ceux qui aiment La bohème et les belles voix ne seront pas déçus par cette magnifique production qui comporte tous les ingrédients artistiques d'une réussite sans prétention.

Ceux qui n'ont pas réussi à obtenir de billets pour les représentations qui restent à Wilfrid-Pelletier (23, 25 et 27 mai) auront peut-être l'occasion d'en avoir pour la projection de l'opéra soulignant le 375e anniversaire de Montréal, en direct, au stade Mémorial Percival-Molson, le 27 mai prochain à 19 h 30.