Le Quatuor Jérusalem était de retour au Ladies’ Morning Musical Club (LMMC) dimanche après-midi. Un concert qui a dépassé toutes nos espérances.

La formation israélienne fondée il y a près de 30 ans est une habituée de la métropole, ayant été invitée dans le passé par Pro Musica, le LMMC et le Festival de musique de chambre de Montréal. Sa dernière venue, il y a deux ans, était sous l’égide de ce dernier, presque au même moment que le Quatuor Dover qui, hasard du calendrier, jouait aussi de nouveau mercredi passé à la salle Bourgie.

La salle Pollack était bien pleine aux deux tiers en cette journée quasi estivale pour accueillir le quatuor, en tournée nord-américaine. Le programme, on ne peut plus alléchant, comprenait le Quatuor no 1 en mi bémol majeur, op. 12, de Mendelssohn, le Quatuor no 1, op. 21, de Paul Ben-Haim, et le Quatuor en sol mineur, op. 10, de Debussy, ce dernier ayant été immortalisé chez Harmonia Mundi il y a cinq ans.

Paul qui ? Paul Frankenburger (1897-1984) de son nom, un Juif allemand qui a quitté son pays natal en 1933 après avoir été l’assistant de Walter et Knappertsbusch pour s’installer dans ce qui allait devenir 15 ans plus tard l’État d’Israël, dont il est devenu l’une des principales figures musicales sous le patronyme Ben-Haim.

Son Quatuor no 1, très influencé par la musique française « impressionniste », date de ses premiers temps au Proche-Orient et marque une volonté de se distancier de son héritage germanique et d’embrasser la tradition musicale de sa région d’adoption (en particulier dans le dernier mouvement).

En quatre mouvements, l’œuvre se laisse facilement écouter avec son inspiration mélodique généreuse et son écriture aussi experte qu’accessible. Surtout jouée avec autant d’inspiration que l’ont fait les musiciens du Quatuor Jérusalem.

Car ce groupe est une force de la nature. Pas force dans le style « brute de décoffrage ». Enfin si, mais quand il faut : ils savent aussi se faire petits quand la musique l’exige.

C’est notamment le cas dans le mouvement lent du quatuor de Debussy, comme susurré au creux de l’oreille. On a droit à l’opposé dans l’Andante du Mendelssohn, à la sonorité opulente.

Ce n’est pas qu’une question de son. La perfection de l’exécution laisse pantois. Il y a bien quelques petits problèmes d’intonation à l’occasion (on pense aux deux premiers mouvements du Mendelssohn, problème réglé après que le premier violon Alexander Pavlovsky s’est réaccordé), mais quel quatuor n’en connaît pas en concert ?

Les attaques sont à peine perceptibles, tellement les archets entrent dans la corde d’une manière subtile. C’est ce qui donne un sens du chant à décrocher la mâchoire, comme dans le premier mouvement du Mendelssohn, où les barres de mesure semblent abolies.

Les tempos semblent pour leur part toujours bien compris. Point d’empressement dans l’introduction du premier mouvement « adagio non troppo » du Mendelssohn, tout comme dans l’Allegro non tardante qui forme le mouvement comme tel.

Si la Canzonetta reste un brin sage pour un Allegretto, le finale, pris sur les chapeaux de roues, est bien « molto allegro e vivace » (pas si fréquent…). On pourrait tout aussi bien dire la même chose pour chacune des parties du Debussy.

Et tout est fait avec une admirable souplesse rythmique, et ce, autant individuellement (le violon 1 !) qu’en groupe.

L’altiste Ori Kam, le seul musicien à ne pas figurer parmi les membres fondateurs, a annoncé le rappel dans un excellent français (il est professeur à l’Université de Genève) : l’Andante du Quatuor no 21 en ré majeur, K. 575, de Mozart, joué comme en suspension.

Le prochain concert du LMMC, avec le pianiste français Rémi Geniet, se tiendra le 22 octobre à 15 h 30.

Consultez le site du Quatuor Jérusalem (en anglais) Consultez le site du LMMC