Backxwash propose une musique décapante qui ne ressemble qu’à elle, qui détruit tous les codes de son genre qu’elle remplace par ses propres règles. Au fil de son épopée musicale, l’artiste montréalaise se départit de ses démons intérieurs, exorcise ses douleurs et chemine, nous menant avec elle dans un périple aussi intense que nécessaire. His Happiness Shall Come First Even Though We Are Suffering est la superbe conclusion d’une aventure qui a duré trois ans.

His Happiness… est le dernier volet de la trilogie que Backxwash a amorcée en 2020 avec l’album God Has Nothing to Do with This Leave Him Out of It, lauréat du prix Polaris. Alors qu’elle abordait son présent sur ce premier disque, elle s’est plongée dans ses souvenirs d’adolescence pour le deuxième, I Lie Here Buried With my Rings and My Dresses, paru en 2021. Cette trilogie cathartique la mène cette fois à explorer son enfance et même les temps qui ont précédé sa naissance.

Au terme de cette quête, Backxwash (Ashanti Mutinta) est plus que jamais consciente de qui elle est, ayant retracé en musique et en mots les jalons de sa vie qui l’ont façonnée. La foi, l’identité (queer et noire), la mort, l’enfer, la quête de mieux : les thèmes de His Happiness… font écho à ceux des précédents disques. La poésie d’Ashanti est toujours aussi frappante, ses paroles sont intelligentes, sensibles, marquantes.

Cet album (autoproduit, soulignons-le) n’est pas pour les sensibles d’oreille, ceux qui ne supportent pas la musique qui écorche. Car Backxwash, avec ses sons industriels en arrière-plan et ses cris gutturaux à l’avant, ne cherche pas à nous bercer. Encore une fois, comme avec ses parutions précédentes, l’horrorcore ne fait qu’un avec le trap, les couches de textures sont complexes et l’artiste parvient à nous soutirer des frissons, tant son interprétation est intense et sentie.

Les rythmes entraînants ne manquent pas, le hip-hop est toujours aussi central à l’œuvre, tant dans le rap de Backxwash que dans la production. L’album, plus mélodique que les précédents, se conclut d’ailleurs avec Mukazi (qui veut dire femme en nyanja, langue parlée dans la Zambie natale de l’artiste), très old school et conforme, qui détonne, mais offre une bouffée de fraîcheur aussi. Backxwash s’affirme. Elle n’est pas qu’une chose, qu’un style. Elle peut tout faire.

Un chapitre se clôt avec His Happiness…, mais il nous tarde d’entendre la suite de la prolifique artiste.

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His Happiness Shall Come First Even Though We Are Suffering

Rap/Horrorcore

His Happiness Shall Come First Even Though We Are Suffering

Backxwash

Ugly Hag

8,5/10