Il a travaillé à la réalisation d’albums d’Hubert Lenoir, de Lou-Adriane Cassidy et de Thierry Larose. Mais voilà qu’Anatole lance un troisième album qui porte son nom de naissance, Alexandre Martel, dans lequel il délaisse la représentation pour l’authenticité, toujours avec une posture sans compromis. Il sera en spectacle vendredi à l’Esco dans le cadre de Coup de cœur francophone.

Quand Alexandre Martel entreprend une démarche artistique, c’est jusqu’au bout.

En entrevue dans un café, quelques heures avant le premier Gala de l’ADISQ, le musicien trentenaire était posé et plutôt réservé. Difficile de croire qu’il s’est fait connaître sous l’alter ego Anatole, maquillé et tout en excentricité. « Il fallait que je me fasse violence, mais aujourd’hui, je me demande comment j’ai pu arriver à faire ça », lance-t-il.

Tellement que pour son troisième album, qui a comme titre son nom de naissance Alexandre Martel, une photo de lui au naturel fait office de pochette, alors que les chansons n’ont pas de titre. Le tout s’amorce par Toune 10 et se termine par Toune 3 (même pas dans l’ordre).

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Ce sont des compositions « sans masque ». « C’est ce qui peut se rapprocher le plus du degré zéro de la représentation : les tounes ne devraient pas être en représentation d’elles-mêmes », estime-t-il.

Une véritable mise à nu de l’auteur-compositeur-interprète, après un album qui s’appelait Testament où il annonçait sa renaissance ? « Une mort de l’ambition », corrige-t-il.

Vers le folk-rock

Des prestations très théâtrales comme il en faisait, ce n’est plus rarissime. « C’était une proposition qu’il y avait peu à l’époque, mais aujourd’hui, il y a un sens de la scène qui s’est développé, expose-t-il. Alors pourquoi ne pas faire un contrepied à ce que je faisais avant, m’acheter une 12-cordes et écrire des tounes ? »

C’est ainsi qu’Anatole délaisse les sonorités électro synth-pop et une attitude glam pour s’en tenir à un son sans ambages : des cordes organiques folk-rock de l’époque où John Lennon était vivant.

Avoir été aux premières loges « du tourbillon Hubert Lenoir » a changé la vision du succès d’Alexandre Martel. Il a vu le revers de la médaille du succès. « Je ne souhaite pas ça, dit-il. Je ne ressens plus la pression de convaincre tout le monde. »

Il faut savoir qu’Alexandre Martel travaillait avec Lenoir à l’époque du groupe de ce dernier The Seasons. C’est lui qui a coréalisé Darlène, l’album qui a révélé au grand public celui qui a été sacré interprète de l’année dimanche dernier au Gala de l’ADISQ.

Depuis, Alexandre Martel multiplie les mandats de réalisation pour de nombreux amis artistes de la nouvelle génération au-devant de la scène musicale du Québec : Thierry Larose, Lysandre, Lou-Adriane Cassidy, Lumière, Alex Burger, sans compter le vétéran Keith Kouna.

« Une posture plus authentique »

En studio, la même « posture authentique » a guidé les choix d’Alexandre Martel.

Toutes les chansons sont des takes live et se terminent par des improvisations. Les harmonies vocales, c’est tout le monde autour du micro. Je voulais remettre l’humain au centre du processus.

Alexandre Martel, alias Anatole

Sa voix est aussi sans le moindre artifice avec « un ton plus conversationnel ».

La spontanéité permet d’accéder au vrai, fait valoir le musicien. « Quand les gens doutent de quelque chose, c’est parce qu’ils se révèlent [...] et c’est là qu’on touche les gens. »

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Toune 7 rappelle A Day In The Life des Beatles alors que Toune 9 donne le même effet réconfortant que Two of Us. « C’est la première fois que je fais une chanson qui devient meilleure à cause du texte, confie Anatole. C’est ma chanson la plus ouverte sur mon intimité. »

Extrait du clip de Toune 9, d’Anatole

Dans le clip, émouvant hommage à la quotidienneté, on voit l’auteur-compositeur avec sa fille de 7 ans et son amoureuse Lou-Adriane Cassidy, à qui il doit beaucoup, car elle a coécrit la majorité des textes (le couple était en nomination pour le Félix du meilleur auteur-compositeur).

« Je ne me vois pas écrire autrement maintenant. [...] J’ai tendance à prendre beaucoup de détours, et Lou-Adriane aime ça quand c’est direct. On se complète bien, et j’ai 100 % confiance en son goût et en son jugement. »

Toune 5 porte sur le deuil alors que Toune 2 s’avère « une dénonciation de la pensée Instagram ». « Il y a une pensée slogan qui se déguise en pensée profonde. Cela se joue autant à droite qu’à gauche dans le spectre politique, et ça me dérange. »

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« Jusqu’au bout »

Tant qu’à se dévoiler, Anatole a tenu à ce que les photos pour la sortie de l’album soient prises chez lui à Québec dans le quartier Limoilou. Mais pourquoi aller autant au bout de ses intentions ? « Ça m’aide d’avoir un concept pour asseoir mon album, et je crois vraiment en l’idée de respecter ton intention première. Je fais des choix drastiques qui font en sorte que je ne peux pas reculer. »

« Il faut y aller jusqu’au bout », croit-il.