(Toronto) Le rockeur canadien Jacob Hoggard a été condamné jeudi à cinq ans de prison pour une agression sexuelle qualifiée par la juge de « viol particulièrement dégradant ».

En prononçant sa peine, la juge Gillian Roberts, de la Cour supérieure de l’Ontario, a déclaré que le crime commis par Hoggard, âgé de 38 ans, impliquait une « dégradation gratuite » et une « violence gratuite ».

« Il n’est pas exagéré de dire que (la plaignante) n’est plus la même personne qu’elle était avant l’agression. Elle a été blessée physiquement […] mais sa blessure psychologique a été bien pire, a déclaré la juge Roberts.

« Quels que soient les moments de satisfaction éphémères que M. Hoggard a tirés de sa conduite, ils ont été obtenus à un prix colossal et tout à fait inacceptable : changer à jamais la vie (de cette femme). »

L’agression sexuelle commise par le chanteur du groupe Hedley avait eu lieu en 2016 dans une chambre d’hôtel de Toronto. La femme d’Ottawa a déclaré à l’audience de détermination de la peine que ce qui s’était passé ce jour-là la hanterait pour le reste de sa vie.

La Couronne avait demandé une peine de six à sept ans – au-dessus de la fourchette normale pour une agression sexuelle commise par une personne sans casier judiciaire, a appris le tribunal. La poursuite soutenait que Hoggard représentait un risque pour la société.

Évaluation psychiatrique contestée

La défense avait recommandé une peine de trois à quatre ans, brandissant un rapport d’évaluation psychiatrique présententiel indiquant que Hoggard présentait un faible risque de récidive et qu’il avait de bonnes chances de réhabilitation.

Mais la juge a déclaré jeudi qu’elle n’acceptait pas le rapport du psychiatre médico-légal Hy Bloom, retenu par la défense, selon lequel Hoggard présentait un faible risque de récidive.

« La Couronne souligne à juste titre que M. Hoggard a toujours été impulsif et qu’il a fait preuve de promiscuité, avant et en dehors de sa vie de rock star, a déclaré la juge Roberts. Je suis d’accord avec la Couronne : nous ne pouvons pas dire que M. Hoggard ne se retrouvera plus jamais dans une situation où il a une opportunité sexuelle, qu’il veut se valider et que l’impulsion prendra le dessus. »

La juge a précisé que la peine devait être proportionnée à la gravité de l’infraction et aux circonstances, y compris le degré de responsabilité de Hoggard. « (La peine) doit être suffisante pour refléter la nocivité inhérente d’un viol manipulateur et particulièrement dégradant », a-t-elle déclaré.

À l’extérieur du tribunal, la procureure de la Couronne Jill Witkin a salué le verdict du jury et la peine imposée ensuite par la juge. « Le verdict de culpabilité et la peine envoient un message à notre communauté que la violence sexuelle ne sera tolérée de personne », a déclaré Me Witkin.

Hoggard avait également été accusé d’agression sexuelle causant des lésions corporelles à une adolescente, ainsi que de contacts sexuels impliquant cette plaignante mineure, mais il avait été déclaré non coupable de ces infractions par le jury. Hoggard avait plaidé non coupable à toutes les accusations.

La procureure Witkin a d’ailleurs remercié et félicité jeudi les deux femmes d’avoir porté plainte contre Hoggard en 2018. « C’est un processus difficile, mais nécessaire », a-t-elle dit.

L’agression a duré « des heures »

Un jury avait délibéré pendant six jours et s’était retrouvé deux fois dans une impasse sur « certains chefs », avant de déclarer Hoggard coupable en juin d’agression sexuelle causant des lésions corporelles dans l’affaire de la femme d’Ottawa.

Cette femme, qui avait au début de la vingtaine à l’époque, a déclaré que Hoggard l’avait étranglée si fort qu’elle pensait mourir. Elle a déclaré au procès que l’agression sexuelle avait duré des heures.

Hoggard a plaidé quant à lui les relations sexuelles consensuelles et « passionnées » avec les deux plaignantes. Il a nié avoir étouffé la femme d’Ottawa.

Lors des audiences de détermination de la peine, plus tôt ce mois-ci, la femme d’Ottawa a déclaré au tribunal que l’incident l’avait laissée paralysée par la peur et le désespoir pendant des mois. « Je n’ai plus jamais été la même après ce jour-là, a-t-elle déclaré. Une part de moi est morte ce jour-là, une part que je ne retrouverai jamais. »

Après la lecture de la décision au tribunal, jeudi, Hoggard, vêtu d’un costume noir et d’une cravate sur une chemise blanche, s’est dirigé vers sa femme et l’a embrassée en lui disant au revoir. « Ne t’inquiète pas, je t’aime tellement, je te parlerai bientôt », lui a-t-il murmuré en l’étreignant.

Les constables lui ont alors passé les menottes et l’ont emmené hors de la salle d’audience, pour l’emmener en cellule.

Hoggard avait déjà fait appel du verdict de culpabilité rendu en juin. Et jeudi après-midi, son avocate demandait en Cour d’appel sa libération sous caution, en attendant la suite des procédures. Me Megan Savard a plaidé que le juge au procès avait commis plusieurs erreurs de droit, et elle a soutenu que Hoggard ne risquait pas de disparaître.

La Couronne s’est opposée à sa remise en liberté sous caution, arguant que l’application du verdict du jury et de la peine de la juge était primordiale pour maintenir la confiance du public dans le système judiciaire.

Le juge Grant Huscroft a mis l’affaire en délibéré.