Entre électro-pop dansante et œuvre documentaire sur l’identité de genre, le premier album de Narcisse, La fin n’arrive jamais, est un des projets les plus singuliers de la rentrée. Portrait d’un artiste total.

Le projet

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Il s’en est passé, des choses, depuis qu’on a découvert Narcisse lors de la finale des Francouvertes en novembre 2020. Entre autres, une signature avec le label de Québec Pantoum Records, puis « le grand chemin » de la création d’un premier album, fait de « beaucoup d’exaltation, de doutes et de remises en question », raconte l’artiste qui fait aujourd’hui son entrée dans la cour des grands. Pas question de se dénaturer par contre, et Narcisse propose toujours un son résolument dansant, très inspiré de l’europop des années 1980. « J’aime ce qui est groovy, avec un sax pour venir appuyer tout ça. Je devais rester cohérent avec ce que les gens connaissaient de Narcisse, mais je l’ai poussé un peu plus loin, avec plus d’instruments organiques, de la batterie, de la guitare. »

Le propos

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La fin n’arrive jamais est un album personnel qui ressemble un peu au journal d’une éclosion. « C’est un peu ça, le mythe de Narcisse : quand il décède, il devient une fleur. Tout est un cycle dans la vie. » Fan d’albums concepts, Narcisse a voulu raconter une histoire à travers ses chansons, mais aussi entre celles-ci, en y insérant quatre « interstices. ». On peut y entendre des bouts de discussion avec des gens de son entourage en lien avec les thèmes abordés, sur l’identité de genre, les stéréotypes ou le polyamour. « Je me suis dit que ce serait l’fun de documenter ce qui se passe autour de moi. » Résultat : un album intime oui, mais qui se conjugue au « nous ». « Cet album, c’est moi, mais cette histoire n’est pas juste la mienne. »

L’identité de genre

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L’identité de genre est au cœur de cet album qui parle beaucoup du regard sur soi, celui des autres et le nôtre. « Je ne voulais pas faire d’album militant. Mais comme je parle de ma réalité, c’est forcément politique parce que je suis une personne non binaire. Alors c’est apparu de façon naturelle », explique Narcisse, qui a voulu s’éloigner du côté féminin de son ancien prénom, Marjorie, et qui s’appelle maintenant Jorie Pedneault. Il lui rend d’ailleurs un dernier hommage dans la chanson Marjorie. « Il existera pour toujours, mais il représente quand même une forme de violence pour moi. » Les modèles non binaires, dans la culture québécoise, n’existent pas vraiment. Narcisse serait « honoré » d’en devenir un, mais ne veut pas non plus s’« autoproclamer » comme tel. « Mais si c’est ce qui arrive et si ça peut aider, ça va me faire plaisir de porter le flambeau. »

La performance

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Narcisse est un projet multidisciplinaire axé sur la performance et l’art vivant, à l’image d’un Hubert Lenoir auquel on le compare souvent. « Aussi quand le set up le permet, on aime avoir de la peinture en direct… mais ce n’est pas toutes les salles qui tripent à nous voir arriver avec des gallons de peinture ! On aime créer une expérience sensorielle. » Pour livrer ses textes dans le mode « spoken », Narcisse a aussi travaillé sa voix avec le metteur en scène et comédien Olivier Artaud, qui a fait la dramaturgie de l’album. « On a parlé d’intention, on s’est rapprochés du travail de théâtre. C’est bien beau, réciter des phrases, mais qu’est-ce qu’elles veulent dire ? J’ai eu l’impression de plus creuser, de laisser la place à l’émotion et de sortir de mes patterns. »

La suite

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Pour aimer, il faut apprendre à s’aimer soi-même, dit Jorie dans un des interludes de l’album. « Je pense que c’est la quête de chaque humain, et c’est un peu ça, le message derrière Narcisse. Mais j’ai le feeling que c’est le travail d’une vie. » La musique fait partie de cette démarche pour l’artiste de 28 ans, qui est arrivé « tard » dans le milieu et qui a reçu un apprentissage accéléré au cours des deux dernières années. « Je trouve que le rapport à l’âge est un peu malsain en musique. Parfois, je me demande si j’ai raté le bateau, mais j’ai fini par me raisonner. Je me dis que les choses prennent le temps qu’il faut. » Alors que son album vient tout juste de sortir, Narcisse a hâte de renouer avec le public « en vrai, qui bouge », espère que les gens prendront le temps d’écouter l’album « de A à Z » et, surtout, qu’il ouvrira quelques portes. « Il déconstruit plusieurs concepts sur l’identité de genre, la monogamie, le succès, et il est rempli de discussions. S’il peut en créer, le but sera atteint. »

La fin n’arrive jamais

Électro-pop

La fin n’arrive jamais

Narcisse

Pantoum Records