Une chose est claire : que l’on adhère ou non à cette nouvelle proposition, Beyoncé offre un projet où chaque chanson respire le plaisir. Celui que la chanteuse a indéniablement eu à fabriquer cet album. Celui qu’elle tente de faire partager à ceux qui l’écouteront.

Renaissance est fait pour danser (pour voguer même, parfois), pour chanter, pour se libérer. Beyoncé, elle, semble avoir totalement lâché prise pour créer ce disque. On sent un laisser-aller dans sa plus récente offrande que même ses plus grandes œuvres n’ont pas.

« La création de cet album m’a permis de rêver et de trouver une évasion à une époque effrayante pour le monde. Cela m’a permis de me sentir libre et aventureuse à un moment où rien d’autre ne bougeait. Mon intention était de créer un lieu sûr, un lieu sans jugement », a-t-elle écrit dans un message sur les réseaux sociaux pour présenter le disque.

J’espère que vous trouverez de la joie dans cette musique. J’espère que cela vous incitera à lâcher prise. Ha ! Et à vous sentir aussi unique, forte et sexy que vous l’êtes.

Beyoncé, sur les réseaux sociaux

Renaissance est « un endroit pour être libre de perfectionnisme et de réflexion excessive. Un endroit pour crier, se libérer, ressentir la liberté », décrit-elle. L’album a été fait en plein cœur de la pandémie et ça se ressent dans l’intention de construire un espace où l’on peut tout évacuer, décompresser, revivre.

L’aperçu que nous a donné le simple house Break My Soul (paru en juin) n’était pas tout à fait trompeur, mais pas non plus complètement représentatif de l’essence de l’album. Une raison simple : Renaissance ne s’attache à aucun style en particulier. Queen Bey parvient à faire de tout – du house, du hip-hop, du R&B, de la dance-pop, du disco. L’album se consomme une chanson à la fois, tout comme il s’écoute en entier sans manquer de cohérence. Une atmosphère commune (celle des pistes de danse) demeure et unit le tout.

L’hommage à la house, à la dance-pop, est fait avec une intention de marquer la musique actuelle. Renaissance propose un son novateur tout en faisant appel aux tempos du passé. L’alliance est fructueuse et permet de mettre de l’avant cette mouvance qui a longtemps évolué sur la ligne de touche de la culture populaire. Beyoncé a su bien s’entourer (comme d’habitude) pour amener une multitude de sons travaillés à la perfection. Nova Wav (Rihanna, Ariana Grande), The-Dream (Britney Spears, Rihanna), Skrillex, Hit-Boy (Kanye West, Drake, Jay-Z) et bien d’autres grands noms de la production figurent dans la liste des collaborateurs de cet album de 16 morceaux.

Une créativité revendicatrice

Le travail d’échantillonnage permet à la nostalgie de s’immiscer partout, que l’on retrouve le I Feel Love de Donna Summer sur Summer Renaissance (le titre seulement évoque l’hommage à la reine du disco) ou le I’m Too Sexy de Right Said Fred dans la géniale Alien Superstar (une de nos favorites du disque).

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Le titre Renaissance peut aussi faire écho à la Black Renaissance (ou Harlem Renaissance, marquée par l’effervescence de la culture afro-américaine et qui a eu un nouveau soubresaut dans les dernières années). Le terme n’a probablement pas été choisi sans une pleine conscience de cette résonance. Beyoncé renaît avec ce septième album, six ans après le chef-d’œuvre Lemonade. Elle fait aussi écho au travail de tous les artistes noirs qui l’ont précédée, fait renaître leur œuvre à travers la sienne. « Merci à tous les pionniers qui sont à l’origine de la culture, à tous les anges déchus dont les contributions sont restées trop longtemps méconnues », affirme la chanteuse dans les remerciements de Renaissance.

Beyoncé poursuit dans l’esprit revendicateur (féministe, pour les droits civiques) qui marque ses créations depuis des années, insufflant encore et toujours dans ses morceaux des messages politiques, discrets ou non. Si l’air est plus léger dans les rythmes de Renaissance, les mots, eux, sont parfois contestataires. Elle oppose ces prises de position plus politiques à d’autres textes au caractère purement lubrique, imagé, sexy.

Renaissance est présenté comme l’« acte 1 ». Beyoncé a confirmé qu’il s’agit du volet initial d’une trilogie. Le niveau de créativité de l’artiste de 40 ans semble sans bornes. Si bien qu’on peut déjà s’attendre à ce qu’elle repousse toujours plus de limites, qu’elle nous amène de nouveau là où on ne l’attend pas et nous surprenne par la qualité de ce qu’elle a à nous offrir.

Renaissance

Dance, hip-hop

Renaissance

Beyoncé

Parkwood Columbia

7/10