(Paris) Voix envoûtante, physique androgyne, icône des nuits parisiennes revenue en grâce en 2001 avec Comme un boomerang en duo avec Étienne Daho, la chanteuse française Dani est décédée à 77 ans.

Dani – également actrice et mannequin, entre autres – est décédée lundi dans la soirée des « suites d’un malaise » dans la région de Tours où elle résidait, a indiqué mardi à l’AFP son gérant Lambert Boudier.

L’artiste venait de finir la tournée de son dernier album Horizons Dorés et achevait déjà la préparation d’un nouvel album.

Dani (Danièle Graule à l’état civil) avait choisi d’appeler ce prochain album Attention Départ. « Titre que j’ai interprété comme un nouveau départ », a commenté pour l’AFP Étienne Daho. « Ironie du sort, ce titre a une autre résonance aujourd’hui », ajoute le chanteur qui lui a « parlé hier (lundi) à 19 h 30 » : « Quand j’ai appris la nouvelle ce matin, je ne pouvais y croire ».

Pour Daho, l’artiste n’était « pas du tout conventionnelle », « aimait la marge » et « incarnait la rock attitude ».

Plusieurs personnalités du monde de la musique lui ont rendu hommage sur les réseaux sociaux, comme Jean-Louis Aubert : « Si triste, une si belle amie, si gentille et si libre. Au revoir ma Danette ».

« Elle était une égérie, une complice, une partageuse de bons moments », décrit Didier Barbelivien.

« Très chaotique »

Dani se dépeignait ainsi à l’AFP il y a deux ans, de sa voix aux délicates aspérités : « Ce n’est pas toujours facile de prendre des chemins pas comme les autres ». « C’est très chaotique, mais avec des belles rencontres ».

Elle fut la reine du « Paris by night » des années 70, aux commandes alors de L’Aventure, boîte de nuit branché, version française du Studio 54 de New York. Son mode de vie sans carcan se résumait dans sa chanson La vie à 25 ans (Y’a pas de d’mal à se faire du bien).

François Truffaut la choisit pour le rôle de Liliane dans La Nuit américaine, mise en abyme sur le monde du cinéma, Oscar 1974 du meilleur film étranger. Elle tourna aussi avec Roger Vadim, Claude Chabrol, Georges Lautner ou encore récemment Olivier Marchal.

Mais son parcours fut heurté. En 1987, l’ex-égérie yéyé avait raconté sa descente aux enfers dans Drogue la galère.

Boudée par les maisons de disques à cause de sa fréquentation des paradis artificiels, elle était donc revenue sur le devant de la scène avec Étienne Daho en 2001.

Ce dernier lui avait proposé de chanter Comme un boomerang, titre composé pour elle par Serge Gainsbourg, mais recalé pour l’Eurovision 1975 – car jugé trop osé – et oublié.

Dire que l’année, précédente, en 1974, la France – qui devait être représentée par Dani – se retira de l’Eurovision au moment du décès du président de la République Georges Pompidou. Une voyante lui avait d’ailleurs prédit qu’elle n’irait pas…

« Inconscience totale »

Au départ, Daho n’était que producteur d’un titre qu’il pensait taillé pour Dani seule. Mais la chanteuse insiste pour un duo avec lui. « Dani avait eu la bonne intuition et cette chanson, qui a eu un énorme succès à sa sortie, est dorénavant un classique », expose le chanteur à l’AFP.

Depuis, elle avait retrouvé un statut d’icône, qui l’embarrassait.

« Il y a un côté figé alors que j’ai l’impression d’être dans le mouvement », confiait-elle à l’AFP en 2020. Elle préférait parler d’un « parcours atypique » – mannequin, chanteuse, actrice, meneuse de revues, fleuriste…

PHOTO CHRISTOPHE ARCHAMBAULT, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Dani, en 2020.

« Est-ce qu’on m’a choisie ou est-ce que c’est moi qui ai choisi ? Va savoir ! », s’interrogeait Dani dans son autobiographie La nuit ne dure pas.

Tout commença pour elle quand elle quitta Perpignan pour Paris en 1963, à 19 ans.

« À mes débuts, j’étais dans l’inconscience totale. Espérant poser pour des photos de mode, j’ai frappé à la porte de Jours de France, le seul magazine qu’on lisait à Perpignan avec Elle », confiait-elle à l’AFP en 2016.

La semaine suivante, elle était en couverture. Elle posera au cours de sa carrière devant les objectifs de Helmut Newton ou Jean-Baptiste Mondino.