Il est 22 h tapantes quand les premières notes de Bateaux-mouches résonnent, vendredi soir, faisant vibrer le sol et les murs du MTelus. Eddy de Pretto est dans la place. La musique se tait et c’est a cappella, débarqué au beau milieu de la foule, qu’il entonne les paroles de la chanson tirée de son tout dernier album, le magnifique À tous les bâtards. La foule est en liesse.

Quel début de spectacle ! Et la suite n’a pas déçu. Acclamé par le public, de Pretto explique qu’il va donner un spectacle a capella, un spectacle en douceur. On y croit presque (on est même enthousiaste à l’idée), puis les lumières s’allument et, sur la scène, ses musiciens envoient tout ce qu’ils ont. De nouveau, la salle tremble sous nos pieds. Ce ne sera pas a cappella. Ce ne sera pas en douceur – bien que des moments de profonde délicatesse nous attendent plus tard durant le concert. Aucune retenue pour cette prestation lumineuse que de Pretto confie avoir attendue pendant très longtemps.

Montréal est un lieu tout spécial pour l’auteur-compositeur-interprète français, qui n’y était pas revenu pour un spectacle depuis quatre ans. Il prend le temps de dire combien il est heureux d’être là.

Eddy de Pretto sait animer une foule. Il pourrait se contenter de chanter, et le public montréalais, déjà conquis, serait comblé. Mais il prend le temps nécessaire pour échanger avec son MTelus rempli à ras bord. Montréal aime Eddy de Pretto, et il le lui rend bien. C’est beau à voir.

Photo Denis Germain, Collaboration spéciale

Eddy de Pretto – et la foule – au MTelus

Quand Créteil-Soleil débute, la basse vrombit et le chanteur fait ce qu’il fait de mieux. Sa voix est juste, son énergie est contagieuse, son interprétation éblouit. Il remet ça chaque fois ensuite.

Il faut dire que de Pretto est bien servi par son répertoire. Ses deux albums, Cure et À tous les bâtards, sont bien fournis en morceaux à la prose et aux rythmes fabuleux. Ajoutez-y une incontestable aptitude à donner une formidable performance. Résultat : une soirée mémorable, qui durera plus d’une heure et demie, mais qui passera tout de même trop vite.

Quartier des lunes, La Fronde, La fête de trop, Parfaitement, Random : on navigue entre les titres de 2018 (Cure) et de 2021 (À tous les bâtards). Il présente ensuite une chanson inédite, « une chanson triste », qui sortira bientôt.

La voix d’Eddy de Pretto est unique, forte. Il n’hésite donc pas à revenir à l’a cappella, pour que les sons de son micro à eux seuls enchantent l’auditoire.

L’effet est saisissant également lorsqu’il s’assoit pour des interprétations piano-voix, notamment sur les si jolies Rose Tati et Pause (un duo avec la Française Yseult, que l’on entend sur enregistrement).

Le roi des « bâtards »

« Ces deux albums m’ont sauvé la vie, vous m’avez sauvé la vie, vraiment. Parce que ô combien c’est dur d’assumer qui l’on est », confie-t-il, en milieu de spectacle, avant de continuer sur À quoi bon. Eddy de Pretto est le porte-parole de « tous les bâtards », de tous ceux qui ne rentrent pas dans les cases et qui doivent se démener pour le droit d’être qui ils sont vraiment. Beaucoup peuvent se reconnaître d’une manière ou d’une autre dans l’expérience que décrit le rouquin dans ses chansons. Vendredi soir en a été la preuve. De l’autre côté de l’Atlantique, les mots du Français résonnent.

« Est-ce qu’il y a des bizarres ici à Montréal ? », demande de Pretto, avant la pièce Freaks, l’hymne à « tous les monstres », « les parias », « les seuls ».

Après le rappel, de nouveau installé tout près de la foule, il termine sur Kid, puis revient à Bateaux-mouches, cette fois accompagné de ses (très talentueux) musiciens. Il quitte la scène avec éclat. La boucle est magnifiquement bouclée.

On espère qu’il ne s’écoulera pas quatre autres années avant son retour. On a tous besoin de moments comme ceux que nous offre Eddy de Pretto.