La mort de George Floyd a été la bougie d’allumage du nouvel album de Corneille, Encre rose. Sa réponse face aux choses graves qui secouent le monde ? Danser en toute liberté, en misant sur l’amour et le vivre-ensemble.

Corneille n’a pas fait sa marque en chantant des banalités. Seul au monde et Parce qu’on vient de loin, ses premiers succès, évoquaient à mots à peine couverts le génocide rwandais dont il est un survivant. Il sait comment parler de la gravité des choses.

Il n’avait pas envie de composer de nouvelles chansons au printemps 2020 quand il a appris, comme tout le monde, que George Floyd, un Noir américain, était mort sous la botte d’un policier au Minnesota. L’appel a été plus fort. « J’ai fait le constat des limites qu’on a à se parler dans la société, dit-il. Il fallait que j’écrive quelque chose. »

Corneille dit qu’il aurait pu écrire un livre. Mais se retrouver seul devant une page blanche ne le motivait pas tellement. « Moi, je fais des chansons, et la musique me permettait de faire quelque chose de fun, de plaisant, de dansant aussi, de ne pas être juste dans l’introspection trop lourde, explique-t-il. Alors j’ai fait un album qui me permettait d’être dans la joie dans un moment où je n’en trouvais pas tant dans le cœur des gens. »

Encre rose, comme son titre le laisse entendre, n’est pas un disque grave. C’est au contraire un album aux atours légers, rempli de bons sentiments. La chanson titre parle de l’amour de la mère. Les hommes de ma vie est un hommage aux hommes qui ont été importants pour le chanteur. Pause, lancée l’an dernier, insiste sur la nécessité de l’espoir en l’avenir, alors que Rendez-vous à minuit invite à tendre la main et l’oreille aux autres.

« Avant de te condamner, je dois me forcer à t’écouter et à penser que tes raisons et tes propos, aussi bizarres que je puisse les trouver, sont peut-être valides », explique le chanteur. Pour lui, c’est une simple question d’être cohérent avec lui-même et avec sa volonté de vivre en société. « Il faut que je prenne sur moi, c’est ça la voie que j’ai choisie », insiste-t-il.

Retour aux sources

Ces élans de positivisme, qui tranchent avec l’air ambiant, sont nourris par les choix musicaux de Corneille. Encre rose est un disque trempé dans la soul et le R&B du tournant des années 1980, dont on reconnaît les sonorités et la sensibilité pop. On constate aussi que le chanteur est particulièrement à l’aise dans cet environnement-là : sa voix et ses mélodies coulent comme jamais.

Avec la rumba congolaise, la soul et le R&B de la fin des années 1970 et du début des années 1980 sont les musiques qui ont bercé son enfance. Ce sont celles qui le « touchent le plus sensoriellement », dit-il, en citant pêle-mêle Luther Vandross, Lionel Richie, Chaka Khan et Stevie Wonder, parmi ces artistes auxquels il revient sans cesse.

Il n’y a rien de plus fort que ce lien qu’on entretient avec nos vies antérieures par l’entremise de la musique.

Corneille

Il dit s’être senti tout naturellement à sa place dans cet univers. Encre rose est motivé par cette envie forte de rendre hommage aux musiques de son enfance. « Le besoin était plus fort que la réflexion, dit-il. Le cerveau a suivi l’instinct.

En regardant en arrière, il est fier d’avoir un parcours fait de multiples changements de direction plus ou moins importants. « Plus jeune, je pensais qu’il fallait choisir entre liberté artistique et succès. Plus le temps passe, moins on a la pression d’être dans le succès. Aujourd’hui, je peux vraiment être dans le plaisir. Pour le prochain album, je pourrais me dire : j’ai le goût de faire de la rumba congolaise et en faire. »

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Corneille a aussi pris la liberté de partager son retour sur disque avec un maximum de gens. Encre rose, lancé officiellement vendredi, est la matière première d’un spectacle qualifié d’expérience, filmé au début du mois de novembre à l’Espace Norbert de Sainte-Adèle et accessible depuis jeudi soir sur la plateforme WhiteBoxPlay. Corneille y interprète les 10 chansons de son nouveau disque, entouré de 7 musiciens et choristes, d’une chorale gospel et de danseurs.

« J’avais envie de faire ça parce que, généralement, je n’arrive pas à faire profiter mes publics en Europe ou en Afrique de mes lancements au Québec, explique-t-il. Je me suis dit : on a été habitué à consommer de la musique et des spectacles en ligne [pendant la pandémie], pourquoi ne pas le faire ? Je pense que je vais continuer à le faire dans l’avenir. »

Pour des informations et des billets pour le spectacle Encre rose – L’expérience : https://www.corneilleofficiel.com