Pour son deuxième album, à 20 ans seulement, le rappeur montréalais Fredz a usé d’une plume plus introspective. Plutôt que de parler « de tout et de n’importe quoi », il a cherché à connecter avec son public sans cesse grandissant en se dévoilant un peu plus. Son opus Astronaute sort ce vendredi.

« Je ne l’ai pas remarqué en le faisant, mais [l’album] parle beaucoup plus de moi, dit Fredz, au bout du fil, en début d’entrevue. C’est assez nouveau. » Entre ses deux disques (Personne ne touche le ciel a paru à l’automne 2020), il y a eu « beaucoup, beaucoup de recherche et d’essais-erreurs ».

Si on reçoit ces jours-ci un ensemble de chansons inédites, pour Fredz, il s’agit du fruit de plusieurs mois de labeur. Il s’est lancé dans la confection d’Astronaute tout de suite après la sortie de l’album précédent. Le premier résultat qu’il a présenté à sa maison de disques, E.47, n’a pas fait l’unanimité. « Ils trouvaient qu’il y avait trop de chansons d’amour », confie le musicien.

Fredz a changé son approche. « J’écrivais des chansons qui étaient beaucoup des histoires, parfois loin de la réalité, explique-t-il. J’ai voulu en écrire pour les autres. J’ai voulu que quand tu écoutes mes chansons, tu puisses plus t’identifier [à elles]. » La meilleure façon de le faire est souvent de parler de soi-même, pour que des lieux communs se révèlent entre l’artiste et l’auditeur.

Son auditoire, justement, est très large. Au Québec, mais aussi en France, Fredz fait fureur auprès de la génération Z. Dans son rap, d’ailleurs, les styles français et québécois fusionnent comme si Loud et OrelSan (deux de ses inspirations) ne faisaient qu’un.

Écoutez À ce qu’il paraît sur YouTube

Fredz compte près de 300 000 écoutes mensuelles sur Spotify. Son simple À ce qu’il paraît, sorti en 2021, a accumulé 3 millions d’écoutes. Parmi tous ces gens qui consomment sa musique, il en est dont il reçoit des avis, des commentaires. Cette rétroaction nourrit sa création. « Je connais plus mon public maintenant. Avant, j’écrivais beaucoup pour moi et maintenant, je veux encore plus m’appliquer à chercher plus de monde », affirme le jeune rappeur.

Fait maison

« J’écris toujours dans ma chambre et j’enregistre de mon côté », précise Fredz, lorsqu’on le questionne sur son processus de création. Le succès ne l’empêche pas de vouloir garder le contrôle.

« Personne ne me comprend mieux que moi-même, dit-il. J’ai une bonne vision de ce que je veux et d’où je veux aller, donc pour moi, c’est important. » Ce qui ne veut pas dire qu’il travaille seul.

Je veux que les autres puissent me dire ce qu’ils pensent de la direction que je prends, c’est aussi important d’avoir cette opinion extérieure.

Fredz

« Quand la maison de disques a refusé la première version [de l’album], je ne comprenais pas au début, mais j’ai réalisé qu’ils avaient raison », ajoute-t-il.

Repéré par le rappeur français K. Maro, Fredz compte sur le soutien de l’équipe artistique de sa maison d’artistes, E.47, établie à Paris, à Los Angeles et à Montréal. Pour ce disque, il a « eu beaucoup plus de liens avec la France », dit-il. Il s’est d’ailleurs rendu à Paris la semaine dernière pour finalement rencontrer en personne ses collaborateurs des dernières années.

Tounz, réalisateur montréalais établi à Paris, signe ici la réalisation ainsi que tous les beats, dans lesquels on sent une touche organique prononcée sur le plan des instrumentations. Fredz a toujours eu une approche « DIY » (do it yourself) de la musique, que l’on entend encore sur ce nouvel opus, bien que le côté « fait maison » se marie avec une production léchée.

Pour ce qui est de la composition des textes, Fredz nous explique : « [Tounz] m’envoie les musiques et je pose les mots dessus. J’y vais phrase par phrase et souvent je ne sais même pas de quoi la chanson parle tant qu’elle n’est pas finie. » Le parolier préfère d’ailleurs se concentrer sur les mots plutôt que sur les productions. « Si j’étais capable de faire les deux, je le ferais, parce que j’aime beaucoup faire les choses seul. Mais c’est une bonne chose d’avoir une deuxième tête dans le projet. »

L’art du spectacle

La montée de Fredz a commencé avec ses freestyles, publiés sur les réseaux sociaux, que de plus en plus d’amateurs de rap ont repérés. Si tout s’est toujours passé de manière virtuelle, l’artiste en est maintenant à faire ses premiers pas sur scène.

Comme pour la confection d’Astronaute, il a adopté l’approche « essais-erreurs » pour perfectionner sa présence scénique, lui qui n’avait encore jamais présenté de spectacles. « C’est quelque chose de complètement nouveau, le live, et je n’ai lancé ma tournée qu’il y a un mois, raconte-t-il. On est au Québec, on va faire Osheaga et de gros festivals qui ne sont pas encore annoncés. À l’automne, on voudrait lancer la tournée en France. C’est cool, mais je pars de zéro. Le confinement m’a permis d’avoir un gros public, mais pas de m’améliorer sur scène. »

Quelques couacs qu’il se remémore en riant lui ont fait comprendre à la dure certains rouages de la scène. Mais que ce soit en spectacle ou dans la création, Fredz veut avancer, pour se rendre toujours plus loin. « Je continue d’apprendre, chaque jour un peu plus. »