Vincent Vallières est l’un de ces rares artistes qui, dès le texte de présentation de son album, arrivent à viser juste et bien. C’est encore le cas avec Toute beauté n’est pas perdue, son huitième en carrière.

« Je choisis de garder la fenêtre ouverte, écrit-il. Le cœur aussi. Je choisis de croire en la bienveillance ordinaire, celle qui se retrouve dans les gestes simples qui me rappellent ce que je suis, ce que nous sommes, qui nous permettent d’avancer ensemble un jour à la fois. »

Cette empathie et cette profonde humanité transpirent de partout dans le nouvel opus de l’auteur-compositeur-interprète de 42 ans, album sensible où il semble regarder le temps qui a passé avec un certain étonnement : plus rien n’est pareil, il y a des deuils à faire, mais il faut continuer à vivre, à aimer et à souffrir.

Ce sont peut-être d’ailleurs les chansons les plus réussies de l’album : le poignant duo avec Marjo Tout n’est pas pour toujours, dont le titre dit déjà tout, ou La somme, espèce de bilan de vie écrit comme un journal intime, vibrant, dépouillé et l’émotion au fil du rasoir, au ton si juste qu’il est impossible de ne pas pleurer en l’écoutant.

Mais Vallières n’est pas Vallières s’il ne s’intéresse pas aux histoires de ses semblables – excellente Elle n’entend plus battre son cœur, hymne lucide et compréhensif aux mères de famille – ou s’il ne parle pas d’amour et de joies simples. On retrouve toutefois chez lui une gravité nouvelle, que ce soit sur Le paysage de ton silence, plus parlée que chantée et transportée par un fond de rythme hip-hop, ou la douloureuse Le jardin se meurt qui, malgré son groove lancinant, parle de couple qui éclate et de rêve inachevé…

Aura de sagesse

Bref, on l’a rarement vu aussi sombre et, franchement, cette nouvelle patine lui va plutôt bien en lui donnant une certaine aura de sagesse. Cette maturité se sent aussi dans son écriture beaucoup plus soutenue qu’avant – l’auteur a presque complètement délaissé le langage parlé – et dans son folk-rock de plus en plus profond, avec ses orgies de guitares Fender et autres Gibson, mais qui accepte d’autres influences et laisse entrevoir un fond un peu plus pesant. Tout cela étant le résultat du travail effectué avec son ami guitariste et réalisateur depuis deux albums, André Papanicolaou, et son directeur artistique et complice, Martin Léon.

Bien sûr, le voyage n’est pas linéaire, et c’est peut-être ce qu’on pourrait lui reprocher : même jolies, comme ce délicat duo avec Ingrid St-Pierre intitulé On dansera sous la pluie, les chansons plus légères détonnent un peu de l’ensemble.

Mais à l’image du reste de sa carrière qui s’étale sur plus de 20 ans, Vincent Vallières sait encore trouver les mots et saisir l’air du temps de sa génération, qu’il résume les mois pandémiques (puissante Ensemble parmi les autres) ou le blues du temps qui file trop vite. Toujours aussi pertinent, et avec une sincérité aussi désarmante que crédible. Pas de faux-semblant possible avec un artiste qui s’interpelle même lui-même, comme dans la première chanson de l’album (Heille Vallières).

Et c’est pourquoi, quand il nous dit, sur Homme de rien : « Ne t’en fais pas/Ça ira/Ça ira », franchement, on a plus que jamais envie de le croire.

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IMAGE FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Toute beauté n’est pas perdue

Folk-rock
Vincent Vallières
Toute beauté n’est pas perdue
La maison fauve
★★★★