La pandémie n’a pas mis un frein aux élans de Zaz. Elle avait déjà décidé de tout arrêter quand le monde s’est confiné au printemps 2020. Ce temps d’arrêt lui était plus que nécessaire après 20 ans de musique et une bonne décennie de succès phénoménal. Isabelle Geoffroy, qui sort aujourd’hui son cinquième album, avait besoin de se retrouver, au point de souhaiter que « Zaz meure ».

La dernière fois qu’on a vu Zaz à Montréal, en 2019, elle venait d’enchanter le Centre Bell. Les lumières de l’amphithéâtre étaient rallumées, une partie de la foule s’en était allée, mais la chanteuse était encore sur scène à saluer et à remercier les gens de l’accueil qu’ils venaient de lui faire.

Sa grande tournée terminée, elle devait reprendre la route pour une série de concerts plus intimes. « J’ai dit non, raconte Zaz, lors d’une discussion sur Zoom, en début de semaine. Je devais m’occuper de moi. » Le confinement décrété au début de la pandémie a confirmé sa décision. « J’étais tout Zaz, toujours tournée vers l’extérieur, à mener dix mille projets, détaille-t-elle. Là, tout d’un coup, je revenais à une intériorité. »

Ce passage n’a pas été facile. Réapprendre à vivre avec elle-même, comme elle le dit, a fait remonter des choses bien moins lumineuses que celles qu’elle porte dans des chansons comme On ira ou Je veux. « Ce n’était pas beau à voir, et comme je suis excessive, il fallait que Zaz meure ! », dit-elle, en se moquant un peu d’elle-même.

[Ma chanson] Si jamais j’oublie n’a jamais résonné autant pour moi que ces deux dernières années.

Zaz

Ce n’est pas que son identité artistique soit si lourde à porter. Ni même son métier, bien qu’il lui impose un rythme de vie effréné, fait de multiples voyages. « Le problème, ce n’est pas Zaz. C’est que pendant un moment, je ne me suis plus occupée d’Isa, précise la chanteuse née Isabelle Geoffroy. Il faut un équilibre, parce que c’est Isa qui nourrit Zaz, pas Zaz qui nourrit Isa. »

Un printemps en automne

Isa, son nouvel album, n’est pas une collection de chansons grises. Il débute sur un élan introspectif empreint d’espoir avec Les jours heureux et glisse tout doucement vers des morceaux moins gais, mais toujours animés par un cœur battant. « J’avais besoin, après ce grand hiver [que j’ai vécu], de retourner vers les gens pour partager. » Son album sort à l’automne, mais pour elle, il a l’effet d’un printemps.

Ce nouveau disque, au ton très personnel, a été conçu avec l’aide de nombreux auteurs et compositeurs. « C’est tout mon paradoxe ! », s’amuse à dire la chanteuse. Qu’il soit si proche d’elle ne relève pas du hasard : elle a envoyé un cahier de charges à une foule de collaborateurs en précisant les thèmes qu’elle souhaitait aborder.

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« De nombreuses chansons très différentes me sont arrivées, mais qui parlaient de mon ressenti », précise-t-elle. Ce que tu es dans ma vie parle du lien qu’elle développe avec sa belle-fille. Comme tu voudras évoque sa relation avec un père diminué par l’âge. Ce morceau est porté par une guitare toute délicate. Le plus souvent, Zaz pose sa voix plus retenue qu’à l’ordinaire dans un écrin sonore fait de percussions (électroniques ou pas), agrémenté ici de piano, là de violon. Ou tout ça à la fois.

Isa est sans doute son album le plus subtilement arrangé. « J’avais vraiment envie de sensation de matières et de textures », raconte la chanteuse, qui a travaillé avec Reyn, réalisateur néerlandais qui s’est associé dans le passé à Vanessa Paradis, Benjamin Biolay et Stephan Eicher. Zaz a le sentiment de s’être incarnée sur le plan sonore auprès de celui qu’elle considère comme un poète.

Zaz n’était pas en mode guerrière lorsqu’elle a abordé ces chansons et ce disque. Or, cette approche plus nuancée, plus vulnérable, lui va comme un gant. Surtout que, derrière cette douceur apparente, on la sent toujours aussi vive. Ce repli sur elle-même n’était visiblement qu’une façon de mieux reprendre son élan. La voilà prête à affronter la route pour une longue tournée qui la mènera au Québec à l’automne 2022.

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