Après avoir lancé quatre séries de chansons, Helena Deland franchit la grande étape du premier album avec Someone New. Pour l’autrice-compositrice-interprète, l’inspiration a foisonné avec assurance et gratification… quand elle s’est inventé une version plus confiante d’elle-même. Entrevue.

Le déclic

Helena Deland a toujours écrit des chansons « à gauche et à droite ». « Mais il y a eu un déclic à un certain moment », raconte-t-elle. Celui du souffle nécessaire à la création d’un premier album en tant que tel. « Cela a été laborieux avant de commencer, mais j’ai fini par trouver un fil conducteur. Il y a un moment où j’ai constaté que j’avais le fantasme de devenir quelqu’un d’autre pour faire un album. Quelqu’un de confiant qui accomplit les choses avec du succès. »

Voler de ses propres ailes

Sous contrat avec Luminelle Recordings, Helena Deland n’a eu que des critiques favorables pour ses mini-albums (sa chanson Claudion a été écoutée 2,8 millions de fois sur Spotify). Or, avant Someone New, elle n’avait travaillé essentiellement qu’avec un seul réalisateur : Jesse Mac Cormack. « Il est très expérimenté et cela est devenu presque difficile pour moi d’accepter le succès de mes EP. J’avais un syndrome de l’imposteur… Mais c’est ce sentiment qui m’a menée vers mon premier album. »

Quelqu’un de nouveau

D’où le titre de l’album Someone New et de plein d’idées sous-jacentes. « C’est confrontant d’avoir à présenter une personne réinventée. Mais c’est devenu super inspirant quand je me suis mise à me demander pourquoi je me sens si inadéquate », raconte Helena Deland. L’artiste a alors eu l’impression d’entamer un nouveau chapitre de sa vie et d’être enfin libérée de « la pression d’être heureux » qu’exacerbent les réseaux sociaux.

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Someone New

La chanson-titre, où Helena Deland répète « I Am Stuck », est venue en premier en moins d’une journée en août 2018. « J’étais envahie par des idées. Celles de mes insécurités les plus saillantes. » Six mois plus tard, Helena Deland était à New York pour tester des collaborations avec des réalisateurs. Le déclic a eu lieu avec Gab Wax (War on Drugs, Soccer Mommy) et Jake Portrait. Deux pros qui peuvent réaliser un tube en quelques heures à peine. Helena Deland est repartie à Montréal avec des versions de Someone New et de Lylz. « J’avais peur de me retrouver à nouveau dans un rapport d’admiration avec le sentiment que l’album m’échappe. » Pour les autres chansons, elle a donc travaillé à son rythme avec son ami Valentin Ignat (avec qui elle avait été virée comme barista dans un café), qui a étudié en électroacoustique. Un réalisateur à suivre, sans aucun doute.

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Kendrick Lamar

Fille d’un père francophone et d’une mère irlandaise, Helena Deland a grandi à Québec. Attirée par les mots, elle a étudié en littérature à l’UQAM. « J’ai un amour pour la narration longue et la musique se prête à cela aussi. Je dirais que le musicien contemporain qui le fait le mieux est Kendrick Lamar. Ses albums nous amènent ailleurs à travers des aventures digressives comprises dans une finalité claire. C’est vraiment une chose vers laquelle j’essaie de tendre. J’avais du moins ce souci-là en tête avec Someone New. »

Viscérale

Qu’il soit question de beauté ou de rapports intimes, les chansons d’Helena Deland nous amènent — avec un angle bien à elle et une prose sentie — à méditer sur nos existences et sur la quête du féminisme en 2020. Avec Smoking at the Gas Station, l’autrice exprime clairement ce sentiment d’« insatisfaction » perpétuelle par rapport à notre image. Seven Hours raconte le tournant où les deux membres d’un couple sentent qu’il y a « une distance infranchissable » entre eux. Les chansons Pale et Dog sont viscérales. Et sa musique folk se montre décomplexée grâce à des arrangements électro désirables et des incisions rock.

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À voir

Le dernier spectacle d’Helena Deland a eu lieu à Paris en première partie d’Iggy Pop devant le foyer historique de la Gaîté Lyrique, dans le cadre d’Arte festival. « La Blogothèque faisait la prise de vues et de son », précise-t-elle. Le résultat ? Magnifique. Helena Deland interprète justement Someone New.