Le RRR Band-Off fait monter sur scène des femmes et des personnes ne s’identifiant pas au genre qui leur a été assigné à leur naissance pour les aider à s’affirmer… et à prendre leur place dans le monde du rock.

Au sous-sol, un petit local calfeutré aux lumières tamisées. Des partitions traînent sur le sol pendant que retentissent les guitares au rythme que Trish impose à sa cymbale Charleston. « On reprend ! Un autre quatre temps ! » Le groupe entonne This is Love de la célèbre figure du rock alternatif PJ Harvey. Plus que deux jours avant de monter sur scène pour le RRR Band-Off.

Pour Trish Giurca, 25 ans, étudiante en bio-informatique, ce sera une grande première. Même si elle ne savait pas jouer de la musique, elle a fait le grand saut sans hésiter. 

« Je me disais que ça allait me permettre de me faire des amis, de rencontrer de nouvelles personnes et d’apprendre de leurs expériences. »

Dans le milieu scientifique où elle travaille, la communauté LGBT est peu représentée. Le Band-Off lui permet de renouer avec ce monde auquel elle appartient tout en relevant un défi. « J’ai toujours voulu apprendre la musique, dit-elle. Et c’est pour une bonne cause. »

Les fonds récoltés lors du RRR Band-Off seront versés au Rock Camp. Dans ce camp de jour, des filles et des jeunes de genres non conformes créent un groupe, écrivent une chanson et la jouent sur scène. Le tout en une semaine. C’est un moyen pour ces jeunes de s’épanouir, de s’affirmer et de cultiver leur leadership. « J’aurais tellement aimé avoir ça quand j’étais petite ! », s’exclame Marine Gourit, coorganisatrice du RRR Band-Off.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Au chant, Airin, qui utilise le pronom neutre « iel », du groupe Potato Jam Harvey

Le RRR Band-Off reprend le même concept, cette fois pour des adultes. Des groupes formés par tirage au sort il y a un mois et demi se produiront ce soir au Bar Le Ritz PDB dans le Mile Ex. Ils reprendront des titres de groupes de rock féminins.

Absence d’hommes cisgenres

Particularité de l’événement : sur scène comme derrière les tables de mixage et les caméras, vous ne verrez pas d’hommes cisgenres (qui acceptent le genre assigné à leur naissance). Le but ? « Promouvoir davantage la représentativité sur scène des femmes, des personnes trans et non binaires (ni hommes ni femmes) », annonce l’organisatrice. Selon elle, bien que les choses évoluent, le machisme est encore trop présent sur la scène rock.

Elle ajoute que les filles se lancent généralement dans la musique plus tard que les garçons. « Ce qui est encouragé dans le rock, c’est d’être agressif, de prendre sa place, dit-elle. Ce ne sont pas nécessairement des qualités encouragées chez les filles. Il y a donc cette volonté de pousser ce côté un peu énervé et rebelle chez les filles. »

Pour Trish, l’absence d’hommes cisgenres favorise une meilleure harmonie au sein du groupe. « Dans notre band, on prend des décisions à l’unanimité. Je pense que des fois, c’est un peu plus difficile dans des groupes où il y a des hommes », remarque-t-elle. 

Sans complexe

Le RRR Band-Off est aussi un espace où les gens peuvent se sentir à l’aise de pratiquer la musique sans se sentir jugés. « Pas besoin d’avoir une technique incroyable ou une expérience de 10 ans en musique pour jouer dans un groupe », précise Marine Gourit. 

Certaines participantes sont des novices et n’ont eu qu’une formation d’une heure dans le cadre de l’événement. Comme Trish. Elle a dû apprivoiser les baguettes. Et c’est plus difficile qu’il n’y paraît ! 

« Je pensais que la batterie était vraiment facile, mais en fait, ça prend beaucoup de coordination, d’efforts et de pratique. » Être dans cet espace bienveillant lui a permis de sortir de sa zone de confort. « Je n’ai jamais chanté devant des gens, confie-t-elle. Mais là, je suis plus à l’aise de chanter et de jouer d’un instrument. C’est vraiment une bonne façon de commencer. »

« On reprend ! Un autre quatre temps ! »

À l’approche de l’événement, l’anxiété laisse place à l’excitation. « J’ai hâte ! s’exclame Trish. Je pense que ça va être vraiment cool ! »

Le spectacle qui aura lieu ce soir à 20 h au Bar Le Ritz PDB sera ouvert au grand public (y compris les hommes cisgenres). La contribution suggérée à l’entrée : 20 $.

Consultez la page de l’événement : https://www.facebook.com/events/399603663969903/

Le genre sous toutes ses expressions

Le terme « cisgenre » désigne les personnes qui s’identifient au genre qui leur a été assigné à la naissance (homme ou femme). À l’inverse, les personnes de genres non conformes sont celles qui s’identifient à un genre différent de celui qui leur a été assigné à leur naissance. Cela comprend, entre autres, les hommes trans, les femmes trans, les personnes non binaires (qui ne s’identifient ni comme des hommes ni comme des femmes).