Ben Harper, de nouveau entouré de son groupe original les Innocent Criminals, revient prôner la paix et le blues avec un album où il évoque notamment Michael Brown, le jeune Noir américain abattu par un policier en 2014 à Ferguson.

Il y a eu Trayvon Martin, un adolescent noir abattu par un vigile de quartier en 2012 en Floride, puis Ezell Ford, tué en août 2014 par la police de Los Angeles.

Mais le cas de Michael Brown, 18 ans, abattu dans le Missouri deux jours avant Ezell Ford, a été «mon point de bascule, je me suis retrouvé dos au mur», explique à l'AFP Ben Harper, dont le 13e album studio Call It What It Is sort vendredi.

«Il faut appeler ça par son nom: c'est un meurtre», lance le Californien sur la chanson titre, à l'entraînante intro bluesy, en citant le nom de ces trois jeunes morts dans l'Amérique de Barack Obama.

«On ne parle pas suffisamment régulièrement de l'aspect racial dans notre culture. Ce n'est pas parce que vous ne regardez pas un problème qu'il disparaît», prévient le chanteur à la voix calme et posée, dont les concerts résonnent plus souvent d'appels à la paix qu'à la révolte.

«Barack Obama est un vrai symbole dans le monde, mais peut-être que chez certains, le fait d'avoir un président noir a suscité quelques frustrations», souligne le chanteur, dont l'un des premiers succès, en 1994, fut Like A King, chanson où il évoquait Rodney King, un Noir passé à tabac en 1991 par des policiers à Los Angeles. L'acquittement de ces policiers, un an plus tard, avait déclenché de grandes émeutes dans la ville.

Autre retour aux sources chez l'Américain: le voilà de nouveau accompagné de son groupe original, les Innocent Criminals, une première depuis huit ans. Cet album scelle des retrouvailles orchestrées l'an dernier sur scène.

«Il faut savoir reconnaître quand c'est le bon moment», souligne Ben Harper qui a, ces dernières années, joué avec d'autres groupes - Fistful Of Mercy et Relentless Seven - mais aussi enregistré avec l'harmoniciste de blues Charlie Musselwhite puis sa propre mère, Ellen Harper.

Un café et une guitare

«Avec ma mère, nos voix sonnaient ensemble d'une façon qui n'aurait pas été possible avec quelqu'un d'autre. C'est la même chose avec ce groupe. On se connaît tous depuis plus de 20 ans. On se manquait mutuellement, nous avions encore des choses à dire en tant que groupe», explique le chanteur.

De nouveau raccord, Ben Harper et ses «criminels» renouent avec une musique blues-rock menée par la guitare «slide» de leur leader. Leurs fans retrouveront avec bonheur des ambiances rocailleuses (When Sex Was Dirty), avec des références reggae (Finding Our Way) ou quelques magnifiques ballades (Deeper and Deeper, All That Has Grown, Goodbye To You). Mais aussi des refrains lumineux plus inhabituels, comme ce Pink Balloon inspiré par ses filles.

À 46 ans, Ben Harper ne s'astreint plus à écrire «une chanson par jour» comme il aimait le faire par le passé, mais n'imagine pas pour autant une journée sans musique. «J'écris au moins un petit bout de chanson chaque jour, au moins une ligne ou deux, ou un refrain, mais je force moins les choses. Même s'il m'arrive encore d'écrire une chanson en une journée, comme Call It What It Is...»

Si son fils joue de la musique électronique, Ben Harper ressent pour sa part toujours le besoin de «poser ses mains sur une guitare». «Le matin, je commence toujours par prendre ma guitare slide. Un café et ma guitare slide, toujours!», glisse le chanteur qui se lancera dans une tournée européenne à partir de septembre. Une douzaine de dates sont prévues en France, Belgique, Luxembourg et Suisse.