Le duo n'a jamais été aussi répandu dans le jazz: une série d'albums vient témoigner de la richesse de cet «art de la conversation» et des infinies variations d'une formule où tous les alliages sont envisageables.

Charlie Haden & Jim Hall, publié sur le label Impulse!, rassemble une série de duos interprétés par le contrebassiste et le guitariste au Festival de jazz de Montréal en 1990.

La rondeur du son et le sens de la musicalité de Haden alliés à la finesse du phrasé de Jim Hall: l'association entre ces deux musiciens récemment disparus (en juillet 2014 pour le premier, en décembre 2013 pour le second) fonctionne à plein.

«Cette forme du duo permet une véritable rencontre, car il y a juste deux interlocuteurs, c'est vraiment une conversation», explique à l'AFP l'accordéoniste Vincent Peirani, qui affectionne cette formule et forme depuis un an un duo très complice avec Émile Parisien (saxophones).

Charlie Haden a beaucoup exploité ce filon: Ornette Coleman, Egberto Gismonti, Hank Jones, Pat Metheny, ont été quelques-un de ses «partenaires». Dans Last Dance (ECM), enregistré en 2008 et sorti en juin, il échange aussi avec le pianiste Keith Jarrett.

«Charlie Haden a permis à plein de musiciens d'entrevoir des possibilités», estime Vincent Peirani, pour qui «le duo est la meilleure manière de tenter de se connaître».

La formule a aussi séduit le contrebassiste Dave Holland et le pianiste Kenny Barron sur le disque The Art of the Conversation (Impulse!).

Ces deux grandes figures du jazz font route commune depuis 2012. Leur union débouche sur des échanges dynamiques, où Dave Holland répond à la richesse harmonique du jeu de Kenny Barron par sa vivacité et la précision de son tempo, entre compositions personnelles et standards be-bop.

Associations sans limites

«Le standard est un prétexte à la rencontre, à l'improvisation, aux surprises. On se donne un matériel donné au départ et après, c'est aux musiciens de converser d'une manière ou d'une autre. Il y a plein de manières de raconter les histoires et les standards, et encore plus en duo», affirme encore Vincent Peirani, dont 'Play', un duo Chick Corea-Bobby McFerrin, est un disque fétiche.

Un autre duo réunit deux jeunes musiciens, la trompettiste Airelle Besson et le guitariste Nelson Veras, sur l'album «Prélude» (Naïve). Un disque qui consacre l'union du son pur et lumineux de la trompette d'Airelle Besson et des accords chauds du guitariste brésilien.

Piano-contrebasse, contrebasse-guitare, accordéon-saxophone, trompette-guitare: les associations sont multiples et apparaissent sans limites.

Pour Chano et Josele (Sony Music), le pianiste Chano Dominguez, admirateur de Thelonious Monk, et le guitariste Nino Josele renouvellent ainsi le flamenco-jazz.

Sur Moderato Cantabile (ECM), le pianiste François Couturier a choisi Anja Lechner, violoncelliste venue du classique, pour servir avec recueillement les airs chargés de mélancolie de l'Arménien Komitas, du Gréco-arménien Gurdjieff et du Catalan Federico Monpou, compositeurs méconnus de la fin du XIXe et du début du XXe siècle.

La maison de disques ACT, très active sur ce format, a elle carrément lancé en début d'année une série baptisée Duo Art. La Strada Invisibile, septième album de la série, réunit la pianiste Rita Marcotulli et l'accordéoniste Luciano Biondini, pour un vagabondage entre jazz, improvisation et musiques populaires italiennes.