En 1983, j'étais amoureux de Pat Benatar. La chanteuse de hard rock américaine était en pleine ascension. Je passais des heures à l'admirer sur la pochette de Precious Time, un de mes premiers 33 tours.

Un jour, je lui ai écrit pour lui déclarer mon amour. Comment avais-je trouvé son adresse? Aucune idée. Mais, trois mois plus tard, j'ai reçu sa réponse. Déception: pas une lettre, même pas un autographe, mais un dépliant publicitaire annonçant... son mariage avec son guitariste Neil Giraldo.

Je les ai maudits tous les deux et j'ai jeté mon exemplaire de Precious Time par la fenêtre. Entre Pat et moi, c'était terminé.

Trente ans plus tard, j'apprends que Pat Benatar est toujours en vie. Et qu'elle vient à Montréal pour un spectacle à trois têtes, avec les groupes Journey et Loverboy (ce soir au Centre Bell). Ma chance, me dis-je, de régler mes comptes avec elle une fois pour toutes.

Mais le mauvais karma se poursuit: quand je demande une entrevue, sa compagnie de gérance me répond que je devrai plutôt parler avec... son mari Neil Giraldo. Coudonc, Patricia, tu fais exprès? T'as pas fini de me mettre ton Neil entre les pattes?

«Il ne faut pas le prendre personnel, lance Neil Giraldo en riant. C'est juste que j'étais là avant...»

Bon. Je dis à Neil que je n'ai rien contre lui personnellement. Mais que, franchement, j'aurais préféré parler à sa femme. Il m'explique que le couple se partage désormais toutes les entrevues, ce qui reflète un peu mieux l'état d'esprit du groupe original.

«Quand on a commencé, il y a 34 ans, on était un band. C'est la maison de disques qui a voulu mettre Pat de l'avant. Mais la vérité, c'est qu'on a toujours été là tous les deux. Elle chantait, mais c'est moi qui composais, réalisais et jouais de la guitare.»

Sauf en de rares exceptions, Neil Giraldo affirme que cette situation ne l'a pas vraiment affecté. «Je suis relax», dit-il. Pour sa femme, par contre, ce fut un peu plus difficile. «Elle était frustrée que les gens ne sachent pas le fond de l'histoire. Elle ne voulait pas être la belle fille sur la pochette. Elle voulait être dans un groupe de rock. À la longue, ça a commencé à la mettre en colère.»

Les choses ont changé il y a 10 ans, quand le couple a décidé de «se vendre» sous les deux noms, à la demande de la chanteuse. Indissociables dans la vie, Neil et Pat font désormais équipe de façon officielle, que ce soit sur les photos de presse ou pour les entrevues, au grand désespoir de votre serviteur.

Un peu de fatigue?

Révélée en 1979 par l'album In the Heat of the Night, Pat Benatar fut une icône du hard rock féminin des années 80, pas trop loin de Joan Jett.

Mise en orbite par des tubes comme Fire and Ice, Precious Time, Promises in the Dark, Hit Me With Your Best Shot, Shadows of the Night et la «power ballade» Love Is A Battlefield, elle a multiplié les disques platine et vendu au moins 22 millions d'albums.

Les années 90 et 2000 ont toutefois été moins fastes pour cette pionnière du mouvement «Girl Power». Snobée par le top 40, Pat Benatar s'est faite plus discrète, se contentant de tournées estivales à saveur nostalgique et réservant l'essentiel de son temps à sa famille (le couple a deux filles) entre ses maisons de Maui et de Malibu. Même le retour des années 80 n'y fera rien: son dernier album de chansons originales (Go, paru en 2003) se serait écoulé à moins de 35 000 exemplaires. Honnête, mais loin des 8 millions d'exemplaires vendus de Precious Time!

«C'est vrai qu'après ces années folles, il y avait un peu de fatigue, avoue Neil Giraldo. Pendant une certaine période, il fallait qu'on sorte un disque tous les neuf mois, alors, quand notre contrat s'est terminé, on s'est dit qu'on pouvait se permettre de prendre ça plus relax. On a eu des offres de maisons de disques, mais on n'avait pas vraiment envie.»

Ramollis par le succès? Le guitariste jure que non. À respectivement 59 et 56 ans, Pat et Neil auraient quelques projets dans le collimateur. Mais notre homme refuse d'en dire plus. Si c'est pour un divorce, qu'il me fasse signe. Ça me fera grand plaisir de les aider...

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Pat Benatar, Loverboy et Journey, ce soir à 19h au Centre Bell.