Aucun président dans l’histoire des États-Unis n’a autant fait rire de lui. Selon une étude de l’Université George Mason, près de Washington, les émissions de fin de soirée américaines ont d’ailleurs fait plus de 1060 blagues au sujet de Donald Trump au cours de ses 100 premiers jours à la Maison-Blanche. À une semaine de l’élection, coup d’œil sur la relation amour-haine que les humoristes entretiennent avec Donald Trump.

Jean-René Dufort n’aurait jamais pensé un jour qu’un président américain allait surpasser le prolifique George W. Bush en matière de clips utilisables pour son émission satirique Infoman. Mais Donald Trump a très largement dépassé ses attentes.

« Donald est dehors de la ligue ! lance-t-il au bout du fil. Chaque semaine, je me dis qu’on ne pourra pas aller plus loin, et il nous produit toujours plus de clips ! »

La vidéo grotesque de son retour à la Maison-Blanche après son hospitalisation, c’était nord-coréen !

Jean-René Dufort, animateur d’Infoman

« Il est un peu étourdissant même pour les comiques qui essayent de le suivre ! Et comme je dis souvent : c’est difficile de rajouter du sucre sur de la tarte au sucre ! », ajoute l’animateur d’Infoman, qui pourrait aisément consacrer chaque année une émission spéciale d’une heure à Donald Trump.

PHOTO GENE J. PUSKAR, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Le président Donald Trump est l’une des cibles privilégiées de nombreuses émissions de fin de soirée américaines.

Comment expliquer cet engouement planétaire pour ridiculiser Donald Trump ? Selon Jean-René Dufort, le président américain est un véritable objet humoristique universel.

« Habituellement, aux États-Unis, si tu ris d’un républicain, tu es démocrate, et inversement. Mais dans le cas de Trump, il fait l’unanimité ! Même les républicains le trouvent grotesque. Et il fait l’unanimité aussi comme objet en humour chez les comiques partout dans le monde », précise l’animateur d’Infoman.

La cible favorite en fin de soirée

Les émissions de fin de soirée américaines comme The Daily Show, The Late Show with Steven Colbert ou encore Saturday Night Live s’adressent traditionnellement davantage aux partisans démocrates et s’affichent ouvertement contre Donald Trump. Selon une autre étude de l’Université George Mason, en septembre seulement, 97 % des blagues portant sur les deux candidats à la présidence le visaient, soit 455 flèches décochées !

« La plupart de ces émissions sont anti-Trump depuis la course à la présidentielle de 2016. Ça s’est fait assez rapidement, leur camp était choisi. Ils martèlent le message que Trump n’aurait pas dû être le candidat élu », précise Julie Dufort, enseignante en science politique au collège André-Grasset et à l’École nationale de l’humour.

Et plus les émissions de fin de soirée s’en prennent à Donald Trump, plus elles semblent gagner en popularité. « En observant les cotes d’écoute, il y a une montée en popularité de ces émissions qui ont un humour davantage incisif par rapport à Donald Trump », explique Julie Dufort.

Le 7 octobre dernier, Donald Trump a publié sur son compte Twitter une attaque directe contre les émissions de fin de soirée. « Les animateurs de Late Night sont de mèche avec les démocrates avec leurs blagues répétitives et pas drôles, toujours anti-Trump ! Ne devrait-on pas avoir un temps d’antenne équitable ? »

En mai dernier, il avait déjà publié un message contre les animateurs des émissions de fin de soirée, qualifiant Stephen Colbert de « sans talent », Jimmy Fallon de « gars sympa » et Jimmy Kimmel de « désaxé ».

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER @ALVINFOO

Publicité se moquant de Donald Trump, publiée le 27 août dernier dans le New York Times, le Washington Post et le LA Times par l’animateur de The Daily Show, Trevor Noah

Animateur de The Daily Show, Trevor Noah a publié le 27 août dernier dans le New York Times, le Washington Post et le LA Times une publicité pleine page pour se moquer de Donald Trump. « Trevor Noah et son équipe parodient une publicité de cabinet d’avocats où il est inscrit : ‟Si vous êtes un ancien président sur le point de perdre votre immunité légale, contactez-nous.” C’est intéressant parce que par le passé, Trump avait utilisé cette technique en s’achetant de pleines pages dans les grands journaux. C’est une des bonnes satires que j’ai vues depuis le début de la campagne ! », lance la politologue Julie Dufort.

De l’humour à double tranchant ?

Cette propension à faire rire de lui aurait pourtant, dans une certaine mesure, contribué à mener Donald Trump à la Maison-Blanche. Selon Julie Dufort, en 2016, les moqueries au sujet de sa candidature ont dans une certaine mesure contribué à sous-estimer le candidat républicain.

Des humoristes se sont posé la question de savoir si ça ne serait pas contre-productif de se moquer de lui. Ils se demandent si, en 2016, on n’a pas assez pris au sérieux sa candidature en blaguant à son sujet et qu’on n’aurait pas suffisamment encouragé les gens à aller aux urnes et voter contre Trump. Cette année, les Late Night sont plus prudents. Ils sous-estiment moins ses chances d’obtenir un second mandat. Et plusieurs comiques tentent de faire sortir le vote, comme Amy Schumer, Sarah Silverman.

Julie Dufort, enseignante en science politique au collège André-Grasset et à l’École nationale de l’humour

Chaque année à la Maison-Blanche, le président en fonction fait l’objet d’un bien-cuit de la part d’un humoriste qui anime le « souper des correspondants ». Depuis son élection, Donald Trump a mis fin à cette tradition qui datait des années 80.

« Il n’a jamais été au souper des correspondants de sa présidence. Par contre, il y a assisté quand Barack Obama était président. On avait alors ridiculisé son intérêt à se présenter à la présidence des États-Unis. Des conseillers proches de Donald Trump ont d’ailleurs dit que ça avait été une des raisons qui l’auraient poussé à se présenter », explique Julie Dufort.

> Regardez Seth Meyers se moquer de Donald Trump au souper des correspondants en 2011

Trump manquerait-il de sens de l’humour ? « Il n’aime vraiment pas faire rire de lui, observe Jean-René Dufort. Mais il a un sens de l’humour : les surnoms qu’il trouve aux autres politiciens sont absolument destructeurs et fonctionnent très bien, comme Crooked Hillary et Sleepy Joe. Ça relève de l’humour pur. Il est capable d’humour destructeur, il a le sens du punch, mais surtout de la communication, du liner. »

En 2015, Donald Trump avait pourtant accepté d’animer Saturday Night Live, se prêtant au jeu au point de danser sur la parodie du vidéoclip Hotline Bling de Drake.

Chose certaine, Donald Trump a la couenne dure pour ne pas perdre la face devant les multiples caricatures et parodies qui circulent à son sujet.

« Si on commençait à rire de moi comme ça à la télé, de façon aussi fréquente, ça ne prendrait pas longtemps pour que je sois détruit et déprimé dans mon salon en dessous de mon sofa, lance Jean-René Dufort. Lui, on dirait que c’est comme si on soufflait sur ses braises. Il est zéro dérangé. Il n’a aucun problème à monter après ça sur un stage et à prendre ça à son avantage ! Il est comme immunisé. C’est vraiment une bibitte. C’est un bouffon téflon ! »

Les meilleures parodies de Trump

Le lipsync de Sarah Cooper

Sarah Cooper est devenue un véritable phénomène viral avec ses vidéos sur TikTok au printemps dernier. L’humoriste fait du lipsync sur les déclarations les plus drôles de Donald Trump, ce qui a donné lieu à des capsules comme « How to Medical » ou « How to Mask » qui ont généré des millions de visionnements sur le réseau social. La comédienne aura très bientôt une émission spéciale sur Netflix ainsi qu’une série sur CBS. En août dernier, Sarah Cooper a fait une apparition lors de la soirée de clôture de la convention nationale démocrate.

L’imitation virale de J-L Cauvin

Diplômé en droit de l’Université de Georgetown devenu humoriste à New York, J-L Cauvin tente de faire sa marque avec ses imitations de Donald Trump depuis l’élection de celui-ci. C’est en pleine pandémie qu’il a réussi à faire parler de lui grâce à une imitation de 2 minutes du président américain présentant ses trucs pour remettre l’économie sur pied avant Pâques qui a été vue par 6,9 millions de personnes sur Twitter.

Le classique Alec Baldwin

Saturday Night Live parodie Donald Trump depuis plus de 30 ans. Qu’il soit magnat de l’immobilier, animateur de The Apprentice ou président des États-Unis, son personnage a toujours donné lieu à de savoureuses imitations de Phil Hartman, Darrell Hammond, Jason Sudeikis, Taran Killam et, depuis 2016, Alec Baldwin. Ce dernier est sans contredit l’un des meilleurs en la matière, malgré ce que peut bien en penser Donald Trump lui-même, qui n’a pas hésité à plusieurs reprises à publier ses critiques sur Twitter : « NBCNews est mauvais, mais Saturday Night Live est le pire de NBC. Pas drôle, les comédiens sont terribles, toujours un massacre. De la très mauvaise télévision ! », n’a-t-il pas hésité à déclarer.

Des pas de danse repris sur les réseaux sociaux

CAPTURE D’ÉCRAN DU COMPTE TWITTER @MAD_LIBERALS

@Mad_Liberals a publié un montage vidéo reprenant les pas de danse de Donald Trump sur l’air de Na Na Hey Hey Kiss Him Goodbye

Pour son premier rassemblement après son diagnostic positif à la COVID-19, Donal Trump a fait une entrée remarquée sur la scène de son rassemblement de Sanford, en Floride, le 17 octobre dernier en dansant sur l’air de YMCA de Village People. Une scène qui n’a pas manqué d’être frénétiquement reprise sur les réseaux sociaux en tous genres qui ont tous reçu leur lot d’hilarantes parodies, même au Québec.

> Regardez la parodie de @Mad_Liberals

> Regardez la parodie de @Simplement Québécois