Les habitués de Zoofest ont migré vers le festival Juste pour rire. L’occasion est bonne de découvrir une nouvelle garde d’humoristes de talent !

Alexandre Forest

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Alexandre Forest

« Impressionnant. » C’est le mot qu’utilise Alexandre Forest pour décrire l’humour. L’humour comme forme d’art, l’humour comme véhicule d’idées. Et « impressionnant » dans le sens d’étonnant, de merveilleux, de surprenant. « J’ai toujours trouvé qu’il y avait plus de magie dans le stand-up que dans la magie même, remarque-t-il. Qu’une personne avec un micro puisse parler de tant de choses sérieuses et nous fasse vivre tant d’émotions… C’est si beau. »

Maintenant qu’il fait ce métier d’une grande beauté (« C’est encore dur de réaliser que c’est rendu ma job ! »), Alexandre s’emploie à « valoriser l’amour plutôt que la haine ».

Ayant grandi à la ferme avicole familiale à Sainte-Mélanie (ou, comme il l’appelle, « ce petit paradis sur Terre »), le comique altruiste a été élevé en écoutant les observations sociales mordantes d’Yvon Deschamps. Pour cela, il crédite son père, qui lui a appris à développer son propre sens de la blague. Chose qui l’a mené à devenir l’un des diplômés de l’École nationale de l’humour, cohorte 2016.

Mais, encore aujourd’hui, Alexandre Forest ne semble pas avoir oublié ses premiers coups de cœur, côté rigolade. Et ses gags sont teintés autant de considérations plus personnelles que de thématiques plus engagées. Porté, toujours, par ce désir de faire rayonner l’acceptation.

Il remarque d’ailleurs que certains de ses amis le qualifient d’un peu naïf. Mais l’optimiste humoriste ne s’en fait pas outre mesure. « Je souhaite créer un peu d’espoir. Faire en sorte que les spectateurs se sentent épaulés. Se sentent moins seuls. »

Ses sujets de prédilection ? D’abord, la maladie mentale. Dont il souhaite parler pour « la dénuer de tabous qui ne devraient pas avoir lieu d’être ». Et puis l’identité de genre. Qu’il aborde pour montrer sa propre « dichotomie ». « Je suis très manuel, je suis capable de chauffer un tracteur, j’ai travaillé sur une ferme toute ma jeunesse. Mais ça ne m’empêche pas d’être un homme émotif, qui aime bruncher, passer du temps avec ses chums de filles et s’habiller fancy. »

Un chic type, ce Alex.

Son Zoofest : Mûr, au studio Hydro-Québec du Monument-National

Charles Pellerin

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Charles Pellerin

« Vous savez à quel point un débat public peut devenir toxique lorsque tout le monde crie son opinion ? » Oh que oui, on le sait. Et Charles Pellerin aussi. C’est pourquoi l’habitué du Bordel Comédie Club souhaite faire preuve d’une certaine douceur sur scène. D’une bienvenue subtilité. « Offrir une perspective tempérée. Pour que nous puissions tous nous parler. Sans nous brusquer. »

Parler aussi d’égal à égal. « Il y a tellement de gens plus intéressants et brillants que moi dans le public. Des médecins. Des étudiants qui font des maîtrises en philosophie. Ce serait stupide de les prendre de haut. » Parlant de hauteur, son dernier one-man show s’appelle Gratte-ciel. Comme dans « l’arbre le plus haut d’une forêt de parkings ».

En nous conviant à le rejoindre dans sa maison du rire, Charles promet d’aborder un éventail de thématiques qui pourraient être qualifiées de délicates. L’an dernier, par exemple, c’était le mouvement #metoo. Cette année, la laïcité.

Mais c’est là que réside, selon lui, sa force. « Prendre des gros sujets afin d’en parler avec amour et simplicité. Pour que tout le monde soit à l’aise d’y plonger. »

Lui a plongé dans l’humour « un peu par hasard ». Un choix au secondaire l’a mené vers l’option art dramatique ; ses pas l’ont mené vers le local d’impro ; son talent l’a mené vers l’École nationale de l’humour. Puis, sur les scènes du Québec. En ouverture de Jay Du Temple.

Le natif de Laval se dit d’ailleurs très ouvert. À discuter en coulisses avec des inconnus (en attendant qu’ils prennent des égoportraits avec ledit Jay), à parcourir la province, à découvrir de nouveaux endroits. Ceux qui, justement, découvriront son style auront quant à eux droit à des blagues à la tangente sociale jumelées à une certaine prise de position. « Mais je ne veux pas que ce soit lourd, ajoute-t-il rapidement. Juste très drôle. »

Montrer du doigt ? Nah. Ça ne lui tente pas. Ou s’il doit absolument le faire, c’est lui-même qu’il se propose de désigner. Ses propres travers qu’il désire exposer. « Je convie davantage les gens dans mon introspection que dans la confrontation. » Voilà une invitation qu’il fait plaisir d’accepter.

Son Zoofest : Gratte-ciel, au Cabaret du 4e du Monument-National

Jo Cormier

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Jo Cormier

Jo Cormier a le sens de l’accroche. Le nom de son nouveau one-man-show ? Jo and the Golden Kimono. « T’aimes déjà le titre, hein ? », s’enquiert-il. En effet. Pour décrire son style, il utilise plutôt le terme « réflérir ». Un mot-valise entre réfléchir et rire (« parce qu’on aime beaucoup ça, en humour, les mots-valises »).

À l’oral, réflérir, ça sonne un peu comme rifle. Mitraillette. Une mitraillette de blagues, Jo ? Surtout un type qui aime « rire au jour le jour » (éloigne le médecin pour toujours) et qui est inspiré par la passion. « Le cash, c’est motivant. La passion, c’est bandant », déclare-t-il d’ailleurs dans l’une de ses vidéos comiques où il joue un réalisateur porno bouillonnant, dirigeant un acteur… mollasson. La passion, donc. « Ouaip. Si tu trippes sur les gommes à effacer pis que t’arrives à me le vendre, ça m’inspire. »

On ne sait pas si Adib Alkhalidey trippe sur les gommes à effacer, mais lui aussi inspire Jo Cormier. « Adib ! C’est l’un de mes meilleurs. Je l’adore. » Tout comme le natif de Gentilly adore parler de l’humain. Dans tout ce qu’il a de plus beau comme dans tout ce qu’il a de plus moche.

Mais attention, JC ne fait pas la morale. Ce qu’il veut, c’est faire rigoler. Et stimuler les prises de conscience. Sans jamais prêcher. « J’aime ceux qui osent, j’aime ceux qui travaillent », remarque-t-il par ailleurs. Lui ose et travaille ses blagues depuis… ? « Depuis que j’ai 4 ans », tranche-t-il. Déjà ? « Ma mère me dit que je veux être humoriste depuis que je suis tout petit et mon premier souvenir remonte à cet âge-là. »

Justement, comment aimerait-il que l’on se souvienne de son Kimono doré ? « Comme de l’un des shows les plus vus du festival. Où l’on se sera amusés, tout le monde ensemble. » À réflérir.

Son Zoofest : Jo and the Golden Kimono, au Cabaret du 4e du Monument-National ; il participe à cinq autres spectacles

Gabrielle Caron

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Gabrielle Caron

C’est l’une de ces phrases qui nous poussent souvent à faire des choix, disons, inespérés qui a guidé Gabrielle Caron sur le chemin de l’humour. « T’es pas game, lui a lancé son ancienne coloc. Pas game d’essayer les auditions de l’École nationale de l’humour. » Sauf que Gabrielle l’était. Enseignante au primaire, elle errait, de son propre aveu, dans la vie. (« Être prof, ce n’était pas pour moi. Du tout. Bravo à tous ceux qui le sont ! »)

Depuis, elle a obtenu son diplôme, est devenue l’une des filles de la super adorée série Code F et l’une des animatrices du populaire balado humoristique 3 bières, en compagnie de ses comparses (et grands fans de lutte) Yannick Belzil et Pierre-Luc Racine.

Parlant de comparses, Gabrielle a fait de l’amitié une signature. Son style sur scène ? « Un style chum de fille », s’amuse-t-elle avant d’énumérer : « Je suis ton amie, je suis ta blonde, je suis ton ex. » En résumé : « Je suis l’fun ! »

Ayant ouvert, entre autres, pour Louis T, Gabrielle C a énormément appris, en faisant aussi la tournée des bars, « un passage obligé ». Chose qui l’a menée, par exemple, « à jouer devant quatre personnes complètement paquetées ». Mais aussi dans des salles de 800 spectateurs. « Chaque show nous donne de l’expérience », philosophe-t-elle.

Inspirée par les femmes humoristes (« C’est vraiment badass, des filles qui font du stand-up »), l’énergique artiste dresse une longue liste de celles qu’elle aime. Aux États-Unis ? Les deux Amy (Schumer et Poehler), Tina Fey, Ali Wong. Et ici ? Mariana Mazza, Virginie Fortin, Korine Côté, Lise Dion. « Elles ont du bagage, elles ont du vécu, elles sont absolument inspirantes à côtoyer et à regarder aller », explique-t-elle avant de lancer spontanément : « Girl Power pis toute ! » Une petite pause. « Ha ! J’ai cité les Spice Girls en terminant, tsé ! » Tsé.

Son Zoofest : #Gabestnice, à la balustrade du Monument-National ; Génération Filles d’aujourd’hui, au studio Hydro-Québec du Monument-National

Anas Hassouna

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Anas Hassouna

Au commencement était un DVD de Jamel Debbouze, intitulé 100 % Debbouze.

Anas devait avoir 9 ans. Il était censé dormir. Mais il a entendu ses parents rire. Et il a observé ce qui se passait sur l’écran de la télé, semi-caché dans un coin du salon. « Mon père m’a aperçu et m’a lancé : “Va te coucher !” Mais il était déjà trop tard. »

Trop tard puisque plus tard, être comique, c’est ce qu’Anas Hassouna ferait. Il le savait.

Accepté à l’École nationale de l’humour au premier essai — et au début de sa majorité —, il s’est depuis employé à faire rigoler. Le plus possible. C’est en outre « la seule garantie » que le Montréalais donne à son public. « Ce n’est pas “vous allez être d’accord”. C’est “vous allez beaucoup rire”. »

Il faut dire que lui-même s’entoure de personnes marrantes. C’est simple, tranche-t-il : « Je traîne avec les gens les plus drôles du monde. » À savoir les amis avec lesquels il a créé la plateforme de diffusion web Fishnet Tv.

Le créatif utilise d’ailleurs le plus grand nombre de plateformes possible pour diffuser ses gags. « Quand on dit “humoriste”, on pense souvent à la scène, mais il y a aussi la radio, le web, les podcasts… »

Exemple de sa variété : la vidéo hautement divertissante qui accompagne sa chanson parodique Nouveau rappeur. Dans ce clip, Anas endosse les habits d’un pseudo-mauvais garçon. Attablé devant une assiette de frites puis juché sur un coin de lavabo, il balance ses simili-rimes : « C’est moi le nouveau rappeur/J’imite mes prédécesseurs/J’suis comme tous les rappeurs/Mais j’suis le nouveau rappeur. »

Parlant de nouveauté, il dit être incapable de rester en place. « Ça devient vite plate. » Ce qu’il aime alors ? « Briser les gens de rire. Être obligé de prendre une pause dans mes blagues pour les laisser rattraper leur souffle. » Dans le même souffle, dirait-il que les gens sans humour sont inquiétants ? Il s’esclaffe. « TRÈS. En même temps, une chance qu’ils sont là, sinon je n’aurais pas de job. » Voilà. 100 % Hassouna.

Son Zoofest : Blague vol. 3, au Théâtre Sainte-Catherine ; Le dernier gala de l’humanité, à L’Astral

Pierre-Yves Roy-Desmarais

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Pierre-Yves Roy-Desmarais

« Pierre-Yves-Roy-Desmarais-24-ans-de-Terrebonne » joue de la guitare. Et du piano. Il chante aussi. Il a d’ailleurs étudié en jazz à Joliette. Il aime Bo Burnham et John Mulaney. Il a participé au succès de VRAK, dans Code G, et s’est retrouvé à animer ALT. Plus précisément : l’émission d’Actualité Légèrement Tordue.

Dans ses blagues, il s’amuse, entre autres, de sa difficulté à « cruiser », de sa peur de la solitude et de tous ces Français qui ont « oh ! un cousin au Canada ! » (Non ? Quelle coïncidence.)

À l’École nationale de l’humour, dont il est sorti diplômé en 2017, PYRD a principalement appris à « tester des affaires qui sortent de l’ordinaire devant des gens qui sont ouverts ». Tester des affaires qui sortent de l’ordinaire devant des gens qui sont ouverts fait du reste partie du bonheur de sa vie d’humoriste. Même si parfois, balancer de nouvelles jokes dans les bars, « c’est weird ».

La scène, c’est d’ailleurs là où il se sent bien. « Vraiment bien », souligne-t-il. Ainsi, la peur de s’enfarger dans un gag ou de passer à côté d’une rigolade ne le tétanise guère. Après tout, il est devenu maître dans l’art de créer des liens vite fait avec les spectateurs. « Il y a une relation de confiance qui s’établit. S’ils aiment moins un passage, ce n’est pas grave. On se pardonne au fur et à mesure. »

Pas d’excuses, ou presque, pour le manquer à Zoofest où, après nous avoir donné du Love l’an dernier, il propose un Beau bébé (c’est le nom de son show, pas notre qualificatif de sa personne). Il promet de divertir solidement avec son mélange de musique, de sketchs et de tounes « un peu moins catchy que celles de Sèxe Illégal ». Son but ultime en faisant son stand-up ? « Avoir la liberté d’explorer. » On s’attend à bien rigoler avec celui qui, juste en se présentant, fait déjà marrer son public : « Pierre, c’est un nom de vieux. Heureusement que Yves est là. » Heureusement que les deux.

Son Zoofest : Beau bébé au Monument-National, Téléthon pour Marylène Gendron à L’Astral et Stand-up improvisé au Théâtre Sainte-Catherine

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