Art souterrain prend de l'ampleur avec une 10e édition foisonnante consacrée au travail. Une centaine d'artistes d'ici et d'ailleurs exposeront leurs oeuvres d'art contemporain, du 3 au 25 mars, dans les corridors du sous-sol montréalais et dans neuf lieux satellites. Remontant à l'air libre, le festival créé par Frédéric Loury prend une nouvelle dimension.

Art souterrain prend de l'ampleur avec une 10e édition foisonnante consacrée au travail. Une centaine d'artistes d'ici et d'ailleurs exposeront leurs oeuvres d'art contemporain, du 3 au 25 mars, dans les corridors du sous-sol montréalais et dans neuf lieux satellites. Remontant à l'air libre, le festival créé par Frédéric Loury prend une nouvelle dimension.

Deux commissaires invitées. Des oeuvres de 94 artistes dont 37 de l'étranger. Un circuit de 6 km animé par 98 projets. Neuf espaces culturels associés, dont la Grande Bibliothèque, la Fonderie Darling, l'Arsenal, le Cinéma du Parc et la Galerie Simon Blais. Quelque 70 activités, dont une pour les 6 à 12 ans qui partiront à la chasse à l'oeuvre d'art perdue ! Un budget de 350 000 $ et l'aide de 8 partenaires publics et 43 privés. Créé en 2009, Art souterrain se transforme en un événement consistant, évoluant vers une sorte de biennale ayant lieu... chaque hiver ! « Une annuale ! », dit Frédéric Loury avec son sourire ravageur.

Le fondateur et directeur général d'Art souterrain, qui tient son festival à bout de bras depuis neuf ans, se réjouit d'être passé à la vitesse supérieure. Il faut dire qu'il n'a pas chômé, entouré de précieux bénévoles, de six employés permanents et de partenaires qui n'ont jamais été aussi nombreux à soutenir le festival. 

Au boulot !

Le travail est la charpente de ce 10e millésime intitulé Labor Improbus (« travailler sans relâche », en latin). Art souterrain se déroulant dans le principal quartier commercial et d'affaires de Montréal, cette thématique s'imposait un jour ou l'autre. 

« Quelque 350 000 personnes travaillent dans le centre-ville. C'est donc notamment à elles que s'adresse cette année le festival avec des expos consacrées aux différents angles qui découlent du thème de l'activité professionnelle », explique Frédéric Loury, fondateur d'Art souterrain.

Les trois commissaires - Pascale Beaudet, Émeline Rosendo et Frédéric Loury - veulent aiguiser la curiosité des employés du centre-ville. Parmi les angles d'attaque : le rapport entre employeurs et employés, la séduction des entreprises pour retenir leur main-d'oeuvre, les exigences des « milléniaux » plus enclins à changer d'emploi ainsi que des sujets plus corsés tels que la prostitution, l'esclavagisme, l'absentéisme, les maladies professionnelles, le travail des immigrants ou la crise économique.

« Il y aura des installations, des photos, des sculptures, des vidéos et des performances, avec des oeuvres plus critiques en provenance de l'Europe et des corpus insolites venant de pays comme la Chine, l'Inde ou les pays arabes », dit Frédéric Loury. 

Martin Parr

Pour son premier solo au Canada, le photographe britannique Martin Parr exposera Life's a Beach. Une série sur les vacanciers menée dans six pays. L'artiste finlandaise Pilvi Takala est de retour à Art souterrain avec sa performance The Trainee (La stagiaire), réalisée en 2008 alors qu'elle « travaillait » pour la firme Deloitte, à Amsterdam. Une expérience qui montre qu'au travail, comme ailleurs, des codes sociaux précis régissent nos comportements. 

Artiste cubain installé en Europe, Adrian Melis abordera dans une vidéo la routine professionnelle dans l'île des Caraïbes. « Si l'idée de travail est souvent associée à une contrainte, à des douleurs ou à des obligations, son approche, entre humour et critique, est rafraîchissante », dit Frédéric Loury. 

On aura aussi droit à la magnifique série Swedish Dads du photographe suédois Johan Bävman, un corpus sur des pères qui gardent leur progéniture pendant que maman travaille. « Un sujet de société qui fait réfléchir aux changements des dernières années et à la nouvelle quête du bonheur, un sujet à montrer dans un espace public », dit M. Loury. 

Le photographe néerlandais Jan Banning présentera sa série Bureaucratics, 30 clichés de fonctionnaires de huit pays, assis derrière leur bureau ; le Français Florent Lamouroux, ses milliers de figurines d'ouvriers ; le Mexicain Alejandro Cartagena, ses images de travailleurs transfrontaliers. Le Français Raphaël Dallaporta s'est intéressé à l'esclavage domestique et l'Italien Paolo Patrizi, au réseau de prostituées nigérianes dans son pays.

Lors de la Nuit blanche, le 3 mars, de 18 h à 1 h, une série de performances seront proposées à la Place Bonaventure, avec des interventions de Carolina Mayorga, Chun Hua Catherine Dong, Sophie-Anne Bélisle et Jacqueline Van de Geer.

À la programmation souterraine s'ajoutent cette année des activités dans neuf lieux satellites. Signalons qu'à la Grande Bibliothèque, les artistes québécois Moridja Kitenge Banza, Sébastien Cliche et Marc-Antoine K. Phaneuf signent Éclats de mémoire - Quand l'art retravaille le passé, une expo inspirée des collections patrimoniales de Bibliothèque et Archives nationales du Québec.

Parmi les autres artistes canadiens participants, citons Michel Goulet, Adad Hannah, Karine Giboulo, Alana Riley, Jannick Deslauriers, Steve Bates, Patrick Bérubé, Olivia Boudreau, Mathieu Cardin, Alexandre David, Johannes Zits, Éliane Excoffier, Stanley Février, Stéphane La Rue et Nelson Henricks.

Art souterrain, ce sera aussi cette année une série de visites guidées, des ateliers avec des artistes, des parcours organisés pour les étudiants et leurs professeurs et d'autres préparés pour les employés du centre-ville qui veulent faire une pause artistique sur l'heure du midi pour aller admirer les oeuvres et s'interroger sur la façon dont ces créations examinent le travail. Ce fameux travail, activité essentielle pour assurer notre survie et notre confort, tant matériel qu'intellectuel. 

Une réflexion qui s'annonce donc nourrissante sur la place du travail dans nos vies en 2018.