Les candidats issus du milieu artistique ont tous perdu leurs élections. La Presse fait le point avec Anne Casabonne, qui s’est présentée sous la bannière conservatrice, et Pierre-Luc Brillant1, qui a fait campagne avec le Parti québécois. Mathieu Gratton, qui représentait les libéraux, a préféré tourner la page et retourner à la scène sans tambour ni trompette.

Quelques jours après le raz-de-marée caquiste, la comédienne Anne Casabonne fait un bilan somme toute positif de son engagement politique avec les conservateurs. En revanche, elle se pose beaucoup de questions quant à son retour sur les plateaux de tournage.

Malgré ses deux défaites en quelques mois — lors de l’élection partielle dans Marie-Victorin en janvier et le 3 octobre dans la circonscription d’Iberville —, Anne Casabonne fait un bilan positif de son engagement politique.

« Mon objectif était d’acquérir une expérience, faire mes classes et faire avancer les idées du parti [conservateur]. Je savais très bien que mes chances étaient limitées. Le portrait général était déjà tracé », confie-t-elle.

Anne Casabonne parle d’une défaite « en demi-teinte » — même si elle est arrivée quatrième avec 11 % des voix —, vu la « progression remarquable » du parti depuis 2018. Elle évoque aussi la « richesse » de ses rencontres avec les électeurs, qui ont exprimé leurs préoccupations, notamment en ce qui a trait à la « lourdeur de la bureaucratie ».

On s’en souvient, Anne Casabonne s’est engagée dans l’équipe d’Éric Duhaime pendant la pandémie, à la fin de l’été 2021, après avoir remis en question l’efficacité du vaccin — « Le vaccin, c’est de la marde », avait-elle déclaré dans une vidéo, avant de préciser : « Une marde qui n’empêche pas de rattraper le virus et/ou de donner le virus. »

Elle avait par la suite annoncé qu’elle se retirait du métier temporairement. « En tant que comédienne, ça ne me tente pas de favoriser une partie du public plutôt qu’une autre par rapport à leur statut vaccinal », avait-elle indiqué. Aujourd’hui, elle revendique avant tout le droit de poser des questions et d’exprimer un avis divergent.

Il ne faut pas se laisser envahir par la peur, s’empêcher de poser des questions. Pendant la pandémie, ce que je déplorais, c’est que c’est la peur qui nous dictait de mettre notre masque et de fermer nos gueules. Cette peur-là nous empêchait de rationaliser des choses, de réfléchir et d’entendre la réflexion des autres.

Anne Casabonne

« La vérité, c’est que je suis hypocondriaque et hypersanitaire, poursuit la comédienne, et je voyais plein d’incohérences dans l’application de certaines mesures. Sur les plateaux de tournage, je voulais porter un masque propre après chaque utilisation, mais les gens suivaient les normes imposées sans poser de questions. Aujourd’hui, on sait qu’avec ce type de virus, il n’y a rien qui garantit que les masques fonctionnent à 100 %. »

Pas de regrets

Pendant la campagne, le ton a parfois été acrimonieux ou baveux. Au lendemain du premier débat des chefs, Anne Casabonne ne s’est pas privée, par exemple, de se moquer de François Legault lors d’un rassemblement qu’elle animait — sur la manière de porter ses lunettes ou encore son air renfrogné qu’elle a baptisé « duck face ».

Regrette-t-elle certains propos ? « Absolument pas ! s’exclame Anne Casabonne. C’était une taquinerie, j’animais une foule, et puis ça fait partie de l’analyse corporelle qu’on fait des candidats qui participent à un débat. J’ai mon tempérament, ma couleur. Est-ce qu’on essaie de me formater pour que je sois une candidate idéale ? Est-ce qu’on est rendu là ? »

Fort bien. Mais qu’est-ce qui l’attend maintenant ? A-t-elle envie de faire un retour sur les plateaux de tournage ou sur les scènes de théâtre ? « Je ne sais pas, avoue Anne Casabonne. Fabienne Larouche voulait que je reprenne mon personnage de Roxane dans Sans rendez-vous 2, mais j’ai reculé là-dessus… »

J’ai été offusquée de voir que les artistes ne s’élevaient pas au-dessus de leurs peurs… Les artistes sont là pour faire réfléchir, pour rire du roi… Je me suis demandé : à quoi ça sert d’être une artiste si on n’a même pas le droit de parler ? Regardez ce qui s’est passé avec Guillaume Lemay-Thivierge !

Anne Casabonne

Au fil des derniers mois, elle a pris conscience qu’une partie du milieu artistique lui avait tourné le dos. « Ceux qui parlent fort, je ne vais pas nommer qui que ce soit. Mais la majorité des gens ont jugé qu’il fallait se conformer sans poser de questions. Je ne juge pas les gens qui ont peur, mais je remets en question la peur qui envahit les gens et qui les empêche de réfléchir. »

A-t-elle peur de se remettre à jouer ? « Non, répond Anne Casabonne. Jouer a toujours été ma passion, sauf que je me questionne sur le milieu. Est-ce que je vais encore avoir du plaisir ? À quoi ça sert, le talent, si on n’est pas capable d’écouter les réflexions de quelqu’un ? Si j’ai envie d’écrire là-dessus, est-ce qu’on va me cracher dessus ? Juste parce que je me pose des questions ? »

Bref, la comédienne va participer au bilan du Parti conservateur à la fin d’octobre et voir si elle continuera ou non de militer, sous une forme ou une autre. Mais pour ce qui est d’un retour sur scène ou sur les plateaux, sa décision n’est pas encore prise. « En ce moment, ça me tente de m’occuper des animaux. Je trouve que l’humain est un peu réactif. De quelque côté que ce soit. » Sinon, elle est en réflexion sur sa vie artistique. « Pour l’instant, ça me tente juste de prendre des vacances, on verra pour la suite. »

1. Lisez notre texte sur Pierre-Luc Brillant