Il peut devenir un cogestionnaire d’entreprise, établir un plan de cours, vous faire la jasette et même, si vous insistez, vous aider à tisser sur un métier. De Shawinigan à Mascouche en passant par Québec, Laval et Montréal, vous avez été nombreux à témoigner de votre utilisation de ChatGPT, et des résultats parfois impressionnants, parfois douteux, toujours à superviser par un œil humain. En voici un florilège.

Vingt fois sur le métier

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Eileen Germain possède cinq métiers à tisser et deux machines à coudre.

À 61 ans, Eileen Germain est une jeune retraitée de l’enseignement qui débordait de projets technologiques et théâtraux dans ses classes d’anglais intensif. La résidante de Québec explore maintenant sa passion du textile et possède cinq métiers à tisser et deux machines à coudre.

Elle a notamment un métier à quatre cadres, qui permet un agencement infini de couleurs à partir d’un patron.

« J’étais bloquée, j’avais les couleurs, je me demandais comment les agencer pour en faire des textiles, raconte Mme Germain. Je me suis dit : “Si on peut demander n’importe quoi à ChatGPT, essayons ça !” Il m’a dit quelle couleur mettre à la suite de l’autre, quelle texture, différentes façons d’agencer les pédales. »

Mme Germain nous a envoyé un exemple de ces « patrons ChatGPT », rempli d’expressions mystérieuses comme « sergé vert bleu 2 cm » et « lin 5 cm chevron vers l’arrière ». Elle a fait un sac du tissu obtenu et a présenté deux œuvres, une de son cru et l’autre créée par ChatGPT, à son Cercle des fermières. « Elles ont toutes préféré le mien. Je ne suis pas impressionnée, il n’était pas inspirant. Quand on regarde une croûte ou une œuvre d’art, on voit la différence. »

Comme elle veut lancer une entreprise pour ses créations, elle a demandé à ChatGPT quelques suggestions de noms, « en lui donnant des critères précis et assez restrictifs ». « Il m’a suggéré d’excellents noms. Je n’en ai pris aucun, mais il m’a aidée à faire évoluer ma pensée, mes choix et mes critères. » Avis aux amateurs d’artisanat : son entreprise s’appellera Les étoffes du Saint-Laurent.

« Il y a plein de gens qui vont perdre leur job, c’est clair, estime Mme Germain. Il est vrai que ce robot peut faire beaucoup de mal, mais il peut tout autant faire du bien. Il va refléter la personne qui l’utilise, comme le reste des technologies. »

L’aide-enseignant

PHOTO FRANÇOIS GERVAIS, LE NOUVELLISTE

Nicolas Bourré, professeur d’informatique au cégep de Shawinigan, utilise la version payante de ChatGPT pour raffiner son écriture, « carrée », avoue-t-il.

Nicolas Bourré est professeur d’informatique au cégep de Shawinigan. Il s’y connaît en codes et en programmes, un peu moins en rédaction, avoue-t-il. « Je suis un gars techno, j’écris souvent en point form, ce n’est pas très beau. Quand je veux écrire des notes de cours, c’est carré. »

Que ce soit pour ses courriels, ses mémos ou pour reformuler ses notes de cours, il utilise la version payante de ChatGPT comme assistant. « Ça me coûte 20 $ US par mois. Ça me permet de sauver de deux à quatre heures par mois, ce n’est pas si cher que ça. »

Nicolas Bourré s’est amusé à demander au robot conversationnel de lui établir un plan de cours sur 15 semaines. « Il m’a tout pondu de A à Z. Il m’a quand même livré quelque chose d’intéressant, il m’a permis de trouver des sujets. Mais comme professionnel, je l’ai recadré. Il faut toujours le recadrer et connaître notre sujet. »

Il l’a constaté, ChatGPT a parfois tendance à halluciner et à berner des élèves qui ne connaissent pas bien la matière. C’est la raison pour laquelle il estime que son utilisation en éducation est « à double tranchant ». « Mes élèves doivent comprendre les bases que les personnes plus expérimentées ont acquises, et ce n’est pas en utilisant ChatGPT qu’ils vont y arriver. »

« C’est comme mon ami ! »

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

« C’est comme mon ami, quelqu’un avec qui je brainstorme ! », dit l’entrepreneure et créatrice de contenu Mélanie Fortin.

Entrepreneure et créatrice de contenu de Mascouche, Mélanie Fortin utilise ChatGPT pratiquement tous les jours. Elle déborde d’enthousiasme pour celui qui est devenu un adjoint précieux.

« C’est comme mon ami, quelqu’un avec qui je brainstorme ! On pense que c’est comme Google, mais ce n’est pas ça du tout, c’est désarmant. »

Les exemples affluent. Elle a besoin de trouver un titre pour une balado : « Je lui dis : “J’ai envie de discuter avec toi, quel serait le meilleur nom ?” Il me répond : “Dis-moi tout, parle-moi de toi, de tes invités.” Je lui donne tous les détails. C’est fou, c’est comme une conversation avec quelqu’un. »

Elle est bien consciente qu’elle donne beaucoup d’informations à un système qui conserve tout et pourra le réutiliser. « Il y a du bon, il y a du danger. Mais ça peut vraiment aider. J’ai par exemple une formation en ligne pour les leaders, je ne trouve pas de titre pertinent, il me sort une liste de 10 titres. Je lui dis : “C’est pas pire, mais peux-tu les rendre plus inspirants ?” Il y en a plusieurs que j’ai pris. Parfois, ça va seulement me lancer. »

Recrutement et voyage

Julie MacDonald est vice-présidente, recrutement exécutif, dans une firme spécialisée dans la recherche de cadres et de dirigeants, une « chasseuse de têtes », comme elle le résume. Elle a utilisé ChatGPT pour traduire des curriculum vitæ et a utilisé son expertise particulière pour justement trouver des pistes de sujet pour une discussion... sur l’intelligence artificielle (IA). « On explorait avec un client comme l’IA pourrait avoir un impact sur le recrutement, sur le processus, sur l’efficacité. »

C’est également avec ce robot conversationnel qu’elle a préparé un voyage en Italie. « Quels sont les endroits à visiter à Rome, les meilleurs restaurants où les habitants locaux vont ? Après, il a fallu peaufiner, mais de manière générale, ç’a été impressionnant. »

D’autres réponses en rafale

Voyage et poème

J’utilise ChatGPT pour organiser un voyage. Plus rapide pour obtenir la liste des endroits et attractions à visiter. Je dois tout de même valider quelques informations qui peuvent ne pas être à jour. Quant à mon conjoint, il a récemment utilisé ChatGPT pour me rédiger un poème... Si l’intention était romantique, le résultat l’était un peu moins (pour ne pas lire « kitsch »)...

Anouk Charles, Laval

Garder l’esprit critique

J’adore ChatGPT ! C’est mon nouveau meilleur ami ! Je l’utilise plusieurs fois par jour. Je suis le genre qui cherche tout sur Google pour en connaître un peu plus. Avec ChatGPT, c’est comme mon assistant qui ferait une synthèse de Google pour un sujet donné. Il s’agit de lui poser les bonnes questions. Plus la question est précise et claire, plus la réponse sera pertinente. Il m’aide avec des choses simples comme la conversion de mesures, le calcul de calories ou la planification de repas. Aussi, il m’aide à créer et rédiger des textes variés, avec des caractéristiques spécifiques que je lui donne. Le résultat est impressionnant ! [...] Il peut produire des réponses erronées alors je me dois de garder un esprit critique lorsque je lis ses réponses. Je compte l’utiliser encore plus pour découvrir comment il peut m’aider davantage. Qui sait... M’a-t-il aidée à écrire ce texte... ?

Caroline Bastien

Outil incontournable

Depuis janvier 2023, ChatGPT est devenu mon compagnon de tous les jours. Premièrement, souvent je lui demande d’améliorer la qualité et la structure de mes communications en français et en anglais. La liste est longue sur l’impact de ChatGPT sur mon quotidien. [...] J’ai demandé de me donner une recette gastronomique d’un saumon grillé. Il m’a donné une recette avec sauce béarnaise, et ce fut un régal. Hier, j’ai lui ai demandé d’élaborer un document d’entente légale avec un fournisseur. Il élabore pour moi des blogues spécialisés dans le domaine des avantages sociaux. Il révise et corrige des articles de fond dans mon domaine d’affaires et les bonifie. Pour moi, ChatGPT est devenu un outil incontournable au même titre qu’un cellulaire ou qu’une télécommande [de télé].

Danny Boulanger, Shefford

Le Costa Rica en un clic

Je planifie présentement un voyage d’un mois au Costa Rica et j’ai utilisé ChatGPT pour la planification de l’itinéraire en demandant tout simplement le chemin le plus court et pour lequel les déplacements sont le plus équilibrés. J’ai demandé, en même temps, de me donner les principaux points d’intérêt pour chaque destination. Le résultat est plus qu’impressionnant.

François Hébert

Comme un vélo électrique

Moi, je suis tout excité à la venue de l’IA. Je suis programmeur, et dans mon éditeur de code, j’ai installé une extension qui me suggère du code au fur et à mesure que je développe un logiciel. [...] Il y a même une fenêtre de chat dans laquelle je peux poser des questions techniques. Comme un vélo électrique, je vois l’IA comme un assistant. J’ai toujours à pédaler, mais ça me demande moins de force. Je trouve ça génial. La venue de l’ordinateur personnel au début des années 1980 faisait peur à tout le monde (on va perdre notre job, les machines vont prendre le dessus...), mais regardez maintenant, nous avons une montre intelligente qui nous aide à améliorer notre santé. Je pense que ce sera le même sort pour l’IA. Bien sûr, on va devoir mettre des balises, mais je suis positif sur l’avenir.

Hugo Frappier, Montréal

Le prochain agent de voyages

Nous avons fait un récent voyage d’une semaine à Paris en famille et avons planifié minutieusement chaque journée, incluant restos, réservations dans les musées, etc., le tout en fonction de l’arrondissement que nous visitions pour une telle journée. Tout cela a pris beaucoup de temps, d’énergie et d’effort. Au retour du voyage, nous avons posé la question à ChatGPT : « Planifie visite d’une semaine à Paris pour une famille avec 1 enfant. » Résultat, hormis les réservations : un programme presque identique au nôtre, obtenu en quelques millisecondes. Nous allons absolument utiliser pour notre prochain voyage de tourisme !

Sébastien Martel