Un jeudi sur deux, La Presse propose un retour sur ce qui retient l’attention dans le domaine de l’immobilier résidentiel et commercial

Des PME manufacturières font face à d’importantes hausses de loyer ces jours-ci.

Edgar Belleau est président de Câblages informatiques Instacable, un fabricant de faisceaux de câbles pour le secteur des télécoms comptant 14 employés. Logé au 2800, rue Joseph-A.-Bombardier, dans le secteur de l’A440, près de l’A13 à Laval, l’homme de 63 ans paie 7,50 $ de loyer le pied carré. Son bail arrive à échéance en juillet prochain.

Son propriétaire Pure Industriel, qui appartient à l’américaine Blackstone et à la Caisse de dépôt, lui demande désormais le triple, soit 23,50 $.

Dans un entretien, M. Belleau confie chercher dans la couronne nord un local 40 % plus petit, afin de minimiser la facture.

Le cas de M. Belleau, qui a d’abord été rendu public par le Journal de Montréal, est loin d’être unique, si on se fie aux propos de Bruce Cowper, associé directeur de Cresa, agence immobilière spécialisée dans la représentation de locataires.

« Dans une transaction que je viens de conclure, raconte-t-il, le loyer se situait autour de 6 $ net [le pied carré], montant qui avait été fixé pendant cinq ans. À l’échéance, faute d’options, le client a renouvelé son bail malgré une augmentation de 300 % du loyer net avec des indexations annuelles variant de 3 % à 5 %. Pour moi, c’est très nouveau comme comportement de la part des propriétaires. »

« J’imagine que des entreprises trouvent ça très difficile, poursuit le courtier d’expérience. À mon avis, il y aura certainement des gens qui vont fermer boutique puisqu’ils seront incapables de supporter ces niveaux de loyer. »

Au 4e trimestre 2022, le loyer net demandé s’élevait à 14,56 $ le pied carré en moyenne dans la région de Montréal, selon l’étude de marché réalisée par l’agence Cresa. Le taux de disponibilité des locaux industriels était de seulement 1,1 %.

« Je m’attends à ce que les conditions de marché demeurent les mêmes en 2023 [en dépit de la hausse des taux d’intérêt] parce que la disponibilité des locaux reste rare. Ça va demeurer difficile pour les locataires », croit Bruce Cowper.

Prix prestigieux pour Ivanhoé Cambridge

La Caisse de dépôt n’en a pas fait grand cas, mais la présidente et cheffe de la direction de sa filiale immobilière, Nathalie Palladitcheff, a reçu début mars le prestigieux prix Carrière de la publication spécialisée PERE (pour Private Equity Real Estate).

« Je porte le prix, mais c’est évidemment tout Ivanhoé Cambridge et la Caisse qui sont derrière. Je ne suis que l’ambassadrice. Mais c’est évidemment un sujet de fierté. Je suis particulièrement fière parce que c’est la première fois qu’une Canadienne remporte ce prix », confie Mme Palladitcheff dans un entretien à La Presse. D’origine française, la PDG a obtenu sa citoyenneté canadienne il y a 18 mois.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

La présidente et cheffe de la direction d’Ivanhoé Cambridge, Nathalie Palladitcheff

Ce prix est attribué après consultation des principaux dirigeants des plus grands investisseurs immobiliers de la planète.

Cette récompense vient souligner le travail de repositionnement du portefeuille d’Ivanhoé Cambridge, qu’a entrepris Mme Palladitcheff dès son arrivée à la tête de l’organisation.

« Quand j’ai été nommée, explique-t-elle, on avait comme catégories d’actif, dans l’ordre, les centres commerciaux, les bureaux, le résidentiel et la logistique. Aujourd’hui, c’est exactement l’inverse. »

Les centres commerciaux sont en déclin avec la montée en force du commerce électronique.

Ivanhoé, sous les ordres de Mme Palladitcheff, a également décidé de se concentrer sur son rôle d’investisseur et de cesser d’agir à titre de société d’exploitation immobilière intégrée verticalement. Ivanhoé a ainsi confié en impartition la gestion de ses centres commerciaux canadiens à l’américaine JLL. Environ 330 employés ont quitté Ivanhoé pour un nouvel employeur.

Il s’agissait d’une décision audacieuse puisqu'Ivanhoé tournait le dos à ses origines, la société étant active dans l’exploitation de centres commerciaux depuis sa fondation en 1954 par l’épicier Sam Steinberg.

« Je pense que ce qui est reconnu à travers ce prix est le fait qu’on a été assez avant-gardistes dans notre capacité à bouger avant que ça soit trop tard, dit-elle. Il y a beaucoup de nos pairs qui voient que les choix qu’on a faits, que ce soit sur la construction du portefeuille, le modèle d’affaires ou nos engagements en matière d'ESG et de diversité, sont des choix qui sont payants. »

La filiale a livré un rendement de 12,4 % en 2022 en dépit de la remontée des taux d’intérêt, habituellement néfaste au secteur immobilier. En parallèle, le sous-indice immobilier du S&P 500 a fait - 26 % l’année dernière, tandis que celui de la Bourse de Toronto (S&P/TSX Composite Real Estate Index) a obtenu – 1,5 %.

Le rendement d’Ivanhoé Cambridge avait été de + 12,1 % en 2021 et de - 15,6 %, lors de la première année complète de Mme Palladitcheff à sa tête.

Montréal : bonifications exigées au programme d’accession à la propriété

Depuis 2018, la Ville de Montréal offre un soutien financier aux premiers acheteurs. L’enveloppe budgétaire prévue à cette fin n’est pas entièrement utilisée. L’opposition officielle déposera au prochain conseil municipal une motion en vue d’optimiser le programme.

L’opposition demande que le programme fixe un plafond aux revenus des ménages admissibles en fonction d’une approche dégressive. Une aide moins importante serait accordée à partir d’un certain seuil pour disparaître complètement à un niveau supérieur de revenus.

« L’administration est en train de donner des subventions même aux acheteurs qui ont les reins solides pour qui la crise d’abordabilité du logement n’est pas un problème. », déplore le conseiller Julien Hénault-Ratelle, porte-parole de l’opposition officielle en matière de développement économique.

En contrepartie, l’élu d’Ensemble Montréal souhaite que le programme accorde une aide additionnelle aux ménages monoparentaux, souvent moins nantis que les ménages biparentaux.

Finalement, les conseillers élus sous la bannière du parti Ensemble Montréal recommandent d’augmenter de 5 à 7 ans la période de contrôle du respect des conditions du programme sans avoir à augmenter le budget prévu à cette fin. Environ 12 % des cas audités ne respectent pas les critères d’admissibilité du programme, souligne le conseiller du district de Tétreaultville.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Les condos Maestria au centre-ville de Montréal

Le programme verse jusqu’à 15 000 $ à l’achat d’une propriété neuve de 610 000 $ au moins au centre-ville pour une famille avec enfant. Ce montant est de 10 000 $ hors centre-ville pour une propriété d’une valeur maximale de 540 000 $. Pour une propriété existante de 725 000 $ et moins, l’aide varie de 5000 $ à 7000 $.

Du côté du cabinet du comité exécutif, on dit être en train d’analyser la proposition de l’opposition et de voir les impacts que différents changements aux critères pourraient avoir sur l’atteinte des objectifs du programme.